« A mi-mandat, c’est un acte fondamental que nous venons de poser en votant l’adoption du projet de plan local d’urbanisme bioclimatique », s’est félicité Anne Hidalgo, le 5 juin, à l’issue d’une journée de discussions. En introduction du débat, la maire de Paris avait rappelé les lignes-force de ce nouveau document d’urbanismedont l’élaboration a débuté en juillet 2020 : accélérer et amplifier les actions déjà mises en œuvre pour adapter Paris au changement climatique tout en continuant à créer du logement social et abordable. « Nous voulons faire de la capitale une ville agréable, où il fait bon vivre, qui restera attractive dans les prochaines années malgré l’élévation des températures », a résumé la maire.
Des règles au-delà de la RE2020
Le Paris de 2050 étant déjà construit à 80/90 %, ce PLU bioclimatique (PLU-B) « est un PLU de la transformation et de la transition écologique. Les nouvelles règles encouragent le plus possible la réhabilitation plutôt que la démolition-reconstruction. Il pousse aussi les curseurs au maximum à la fois pour économiser l’énergie, mieux protéger du froid l’hiver mais aussi améliorer le confort d’été », a souligné Jacques Baudrier (PC), adjoint à la maire de Paris, notamment chargé de la transition écologique du bâti. Les performances énergétiques devront ainsi être supérieures aux prescriptions de la RE2020. Il faudra compter de 5 à 15 % en plus, en matière de consommation énergétique pour les bureaux et les logements ; plus de 10 % à plus de 20 % en matière d’intégration d’énergies renouvelables, respectivement pour les logements et les bureaux.
Arrêt des façades entièrement vitrées
« Les protections solaires en extérieur seront rendues obligatoires et associées à l’arrêt de façades entièrement vitrées. Jusqu’alors le béton était la norme et les matériaux biosourcés, l’exception. Dans le nouveau PLU, ce sera le contraire », a encore détaillé Jacques Baudrier. Avec deux autres adjointes – Anne-Claire Boux (politique de la ville) et Anouch Toranian (vie associative, participation citoyenne, débat public) -, l’élu communiste a participé activement à l’élaboration du PLU-B, sous la houlette d’Emmanuel Grégoire, premier adjoint, en charge de l’urbanisme.
Création de 55 ha d’espaces verts
Ces interventions sur le bâti se doublent de nombreuses mesures pour renforcer la végétalisation de la ville. « La nature est le grand projet de ce PLU », a indiqué Emmanuel Grégoire. Il prévoit notamment la création de 55 ha d’espaces verts. « L’espace public devient aussi un axe fort de l’aménagement du territoire avec 110 ha à débitumer. Des parcelles privées fléchées au PLU représentant un potentiel de 40 ha, comme les grands parkings de surface, pourraient elles aussi être débitumées et végétalisées », a ajouté Jacques Baudrier.
Une autre disposition concerne la végétalisation des cœurs d’îlots : pour toute construction, un minimum de 30 % de pleine terre sera demandé pour les parcelles à partir de 150 m2, ce taux pouvant atteindre jusqu’à 65 % pour les emprises de plus de 3 500 m2. Par ailleurs, les espaces verts protégés seront sanctuarisés, 250 arbres remarquables et 100 000 arbres d’alignement seront protégés…
Zone d’hyperdéficit en logement social
S’agissant du logement, le PLU doit permettre d’atteindre l’objectif de 40 % de logement public - 30 % de social, 10 % de logement abordable - à l’horizon 2035. Il renforce ainsi certaines dispositions existantes comme la servitude de mixité sociale.
Jusqu’alors, dans la zone de déficit (secteurs comptant entre 10 et 25 % de logement social), toute opération de logements privés de plus de 800 m2 devait intégrer 30 % d’habitat social. Non seulement, le seuil de déclenchement est abaissé à 500 m2 mais le taux passe à 35 %. De plus, le règlement crée une zone d’hyperdéficit (secteurs avec moins de 10 % de logement social) dans laquelle l’obligation de réaliser des HLM atteint 50 %. Dans le secteur non déficitaire en logement social, les programmes de logements privés de plus de 500 m2 devront intégrer 30 % de BRS.
Création de la servitude de mixité fonctionnelle
Le PLU-B instaure par ailleurs une servitude de mixité fonctionnelle : toute construction, changement de destination ou restructuration lourde de bureaux de plus de 5 000 m2devra inclure 10 % de logements. Sera considérée comme restructuration lourde toute opération supprimant au moins 15 % des éléments structurels du bâtiment. Autre mesure en faveur du logement social : le « pastillage » (ou emplacement réservé) d’environ 400 immeubles de bureaux. Les parcelles concernées sont grevées d’une servitude : à l’occasion d’une restructuration lourde, le propriétaire d’un tel bien devra le transforme en logements. S’il ne souhaite pas mettre en œuvre cette reconversion, il aura la possibilité de mettre la Ville en demeure de l’acquérir.
Arrêt définitif du PLU fin 2024 ou début 2025
Hormis la tour Triangle, en chantier, la hauteur reste limitée à 37 m. Des surélévations d’un niveau plus combles seront possibles (à condition de respecter ce velum) « s’il s’agit de construction de logement qui présentent un intérêt pour l’environnement ou la qualité de vie », précise la délibération. A titre d’exemple, l’exécutif cite souvent le cas des copropriétés qui surélèvent leur immeuble d’un étage pour financer les travaux de rénovation énergétique. Les bâtiments des années 1960-1970 pourront être surélevés de trois niveaux dans le respect du plafond de hauteur.
Avec ce vote s’ouvre une longue période de consultation avec d’abord la saisine pour avis des personnes publiques associées puis l’enquête publique. Le PLU bioclimatique parisien devrait être définitivement arrêté fin 2024 ou début 2025.