Les foyers à l’ouest de Strasbourg (Bas-Rhin) commencent à deviner la pièce majeure des travaux d’extention du réseau de chaleur de ce secteur de l’agglomération : la construction de la nouvelle centrale de production associée a débuté depuis quelques jours. Engie Solutions, le délégataire de service public retenu en 2022 par l’Eurométropole, lui dédie une puissance de 23 mégawatts au moyen de deux générateurs qui seront alimentés par la biomasse.
A ce titre, l’équipement forme l’épine dorsale de la conversion aux énergies locales et renouvelables de ce réseau né dans les années 1970, et qui ne connaissait alors comme sources que le gaz et le fioul. « L’engagement contractuel consiste à atteindre 88 % d’énergies renouvelables », souligne Lise Damien-Marten, responsable de projet chez Engie Solutions. La nouvelle chaufferie s’installe, symboliquement, dans le quartier de Hautepierre, juste à côté de l’actuel équipement au gaz qui continuera à tourner, et, précisément, à l’endroit où le fioul était stocké jusqu’alors. Pour augmenter son rendement, l’énergéticien couple des pompes à chaleur. Pour le traitement des émissions, il ajoute à un laveur-condenseur et, au filtre à manches, l’injection d’urée, de chaux et de charbon actif pour éliminer respectivement les oxydes d’azote (Nox), l’acide chlorhydrique (HCl) et les dioxines-furannes - hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) « aboutissant à une réduction de 78 % des émissions de CO2 », selon l’énergéticien.
Doublement du réseau
Construite par l’entreprise lyonnaise Sofialex, l’installation de production à basse température (moins de 110 °C) sera opérationnelle début 2026. Elle s’inscrit dans l’investissement de 92 millions d’euros fixé par la délégation de service public pour moderniser et étendre le réseau de chaleur urbain qui irrigue un secteur ouest autour du quartier et du centre hospitalier universitaire (CHU) de Hautepierre. La filiale dédiée d’Engie Solutions, Energies Vertes Ouest Strasbourg (Evos) est chargée de doubler les capacités : chauffer 25 000 équivalents-logements contre quelque 13 000 aujourd’hui par une production de 225 gigawattheures (Gwh) annuels, en portant la longueur des tranchées de canalisations à 50 km contre 23. Le déploiement des linéaires supplémentaires a débuté courant 2023, et il suit son cours prévu. « Nous en sommes à 15 km de tranchées nouvelles réalisées et une dizaine d’autres doivent s’ajouter dans l’année, de sorte à terminer le déploiement début 2026. Nous totaliserons 300 points de livraison de chaleur à partir des 155 préexistants, tous rénovés », indique Lise Damien-Marten.

Le programme d’extension porte sur la construction de 27 km de canalisations supplémentaires aux 23 km actuelles. © Alban Hefti pour Strasbourg Eurométropole
Evos, qui s’appuie sur la maîtrise d’œuvre d’Artelia, a choisi de décomposer les marchés de pose en plusieurs sections, à rythme annuel et en allotissement. L’opération la plus technique a consisté à creuser une galerie sous l’autoroute urbaine M351 de façon à y faire passer des canalisations supplémentaires de renfort de l’existant, en tenant compte du propre calendrier de l’Eurométropole qui procédait, dans le même temps, à l’aménagement de voies dédiées aux transports en commun, le projet dénommé Transport en site propre de l’ouest (TSPO). Ce chantier spécifique a été réalisé par Terélian (groupe Vinci), l’an dernier.
Chauffage urbain pour 70 000 logements strasbourgeois à terme
Les livraisons concomitantes de la chaufferie biomasse et des derniers kilomètres de réseau doivent permettre de rendre de dernier, complètement redimensionné, opérationnel à l’aube de l’hiver 2026-2027. L’opération est réalisée en parallèle de l’extension de 35 km d’un autre réseau de chaleur majeur de l’agglomération, « Strasbourg-Centre », qu’assure son délégataire l’énergéticien local Réseaux de chaleurs urbains d’Alsace (R-CUA) jusqu’en 2029 pour un investissement de 110 millions d’euros.
L’Eurométropole a également programmé la création d’un réseau en première couronne nord, dont elle mène actuellement les consultations pour un objectif de production de 110 à 140 Gwh/an. Au total, la chaleur urbaine, très majoritairement d’origine renouvelable, doit représenter au début de la prochaine décennie une production cumulée de quelque 850 Gwh, en mesure de chauffer quelque 70 000 logements et ses équivalents.