L'enseignement passe par la parole… à condition que celle-ci soit intelligible ! Ce qui n’était pas le cas dans cet amphithéâtre de l’Ecole normale supérieure (ENS) de Cachan (Val-de-Marne), pourtant plusieurs fois remis aux normes, mais sans égard pour l’acoustique. Les durées de réverbération mesurées avant travaux montraient en effet des valeurs supérieures à 1,5 s pour toutes les fréquences, dépassant même 2 s pour certaines. Résultat : chevauchement des phonèmes, brouillage des messages, fatigue des locuteurs et des auditeurs. Que faire pour abaisser ces durées à un seuil acceptable (autour de 0,6 s à toutes les fréquences) ?
Prenant prétexte de la situation, Gérard Bernier, maître de conférences au département Génie civil de l’ENS l’a soumise à la réflexion de ses étudiants dans le cadre de travaux d’études et de recherche (TER). Charge à eux de préconiser un traitement acoustique à la fois résistant, esthétique et pérenne. Et parce qu’il avait participé chez Eiffage TP à un cycle de formation continue sur les bétons et que ses travaux actuels portent, entre autres, sur les bétons spéciaux, Gérard Bernier a fait le pari que des plaques préfabriquées de béton fibré à ultra-hautes performances (BFUHP) commercialisées sous le nom de Sika Ceracem-BSI, pouvaient répondre à ces exigences. Après deux années d’études, un mois de préfabrication et une semaine de pose, la preuve en a été apportée : l’amphithéâtre est désormais opérationnel et doté d’une acoustique « haute-fidélité ».
Plaques manuportables.
L’affaiblissement des basses fréquences (125-250 Hz) est obtenu par les vibrations amorties des plaques. Compte tenu de leur mode de fixation, celles-ci présentent en effet un comportement dissipatif calé sur certaines fréquences. Pour y parvenir en respectant les contraintes mécaniques, des plaques manuportables (558 x 618 x 20 mm) de 13 kg chacune ont été retenues. Elles sont fixées aux angles, sur un support de bois, avec interposition d’une bague résiliente en caoutchouc.
Les fréquences moyennes sont piégées à l’aide de cavités formant résonateurs de Helmholtz (un dispositif d’absorption sélective, paramétrable notamment en fonction de son volume et de la taille de son ouverture). Ces résonateurs ont été centrés sur des fréquences voisines de 500 Hz, moyennant des perforations carrées de 15 mm de côté, espacées de 18 mm, pratiquées sur des plaques disposées à 60 mm de la paroi.
Enfin, les hautes fréquences sont absorbées par le matelas de laine minérale (Cloisolène LR de chez Isover) de 40 mm d’épaisseur disposé dans la cavité située derrière les plaques. Le traitement esthétique de l’ensemble, conduit avec l’architecte Frédéric Kuhn (Eiffage TP), a notamment consisté à harmoniser le calepinage des éléments, leur dimensionnement et leur couleur ocre. Toutes sont traitées anti-graffitis (revêtement Graphistop 2 de chez Piéri).
Les mesures acoustiques réalisées à réception par Caroline de Sa, professeur agrégée dans le même département Génie civil, montrent des durées de réverbération proches de 0,5s pour l’ensemble des fréquences. Pari gagné.


