Pour répondre à la tension croissante sur les ressources en eau, aujourd'hui aggravée par le changement climatique, de nouvelles méthodes d'assainissement sont expérimentées. Parmi elles, la lombrifiltration, qui présente de nombreux atouts comme en atteste sa première mise en œuvre à Anglet (Pyrénées-Atlantiques). En un an, le lombrifiltre a fait la preuve de son efficacité : il abat 90 à 95 % des matières en suspension dans les eaux usées, contre 45 à 60 % pour une fosse septique. Le tout sans maintenance, ni vidange. « Ce système de traitement des eaux usées consiste à encapsuler vers de terre et micro-organismes afin de digérer la matière organique et d'éviter la production de boues », explique Jean-Baptiste Dussaussois, responsable innovation et valorisation à l'Institut national pour la transition énergétique et environnementale du bâtiment Nobatek/Inef4.
Dans les pays qui subissent déjà des pénuries d'eau, cette solution séduit par son côté modulaire et économique. Le dispositif se compose d'une cuve cylindrique, qui peut être en métal, en béton, en plastique ou même en géotextile. Une enveloppe de 1,90 m de haut et 1,40 m de diamètre suffit pour traiter les eaux usées d'une maison de cinq équivalents-habitant. L'intérieur est garni de matériaux organiques locaux (des chutes de noix de coco en Inde, des chutes de pin en France) dans lesquels les organismes biologiques, également d'origine locale, creusent des galeries et dégradent la matière. En partie haute de la cuve, une pompe asperge d'eaux usées le substrat sans noyer lombrics et bactéries. Sur les côtés, des aérations assurent l'apport en oxygène. Déjà breveté, le lombrifiltre peut être enterré comme une fosse septique classique.
Un potentiel phénoménal. Depuis les premiers démonstrateurs en Irlande et en Espagne, son fonctionnement est testé sous toutes les latitudes, sur une dizaine de sites, de l'Inde au Chili, en passant par l'Ecosse ou la Roumanie. Les données attestent que les rejets répondent à toutes les normes, quelles que soient les réglementations. En fonction du niveau de filtration attendu, le lombrifiltre peut être complété d'autres cuves contenant cette fois micro-algues ou zooplancton. Enfin, des UV peuvent être utilisés pour désinfecter l'eau lors d'une dernière étape.

Selon les promoteurs de la lombrifiltration, le potentiel de marché est phénoménal. « Surtout en Europe, si on prend en compte les avantages en termes de durabilité, de facilité d'installation et de maintenance par rapport aux systèmes traditionnels, ou en complément pour pallier les surcharges », analyse Rosolino Tarenzi, directeur technique de Redi, filiale d'Aliaxis, une multinationale spécialisée dans le transport de fluides qui envisage de commercialiser le dispositif.
Ce potentiel d'adaptation a constitué un volet important de la R & D autour de cette technologie, qui a bénéficié d'un budget de 8,1 millions d'euros dans le cadre du projet européen Innoqua (1). Lancé en juin 2016 et coordonné par Nobatek/Inef4, celui-ci doit se terminer en novembre.