Selon la Banque mondiale, les besoins d'investissements en infrastructures dans le monde s'établiraient entre 1 200 et 1 500 milliards de dollars (1 140 et 1 425 milliards d'euros). Avec un marché mondial qui représente aujourd'hui autour de 340 milliards de dollars (323 milliards d'euros), il resterait donc beaucoup à faire. De quoi donner le sourire aux entreprises françaises du secteur qui exportent, et qui occupent depuis plusieurs années la place de leader du BTP à l'international.
Après les chiffres d'Euroconstruct publiés la semaine dernière et qui affichent un regain d'optimisme pour le BTP européen (« Le Moniteur » du 25 juin 1999, page 25), les Français réunis au sein du Syndicat des entrepreneurs français internationaux (Sefi) ont présenté leurs résultats pour l'année 1998. « Nos résultats sont bons, mais nous pourrions être encore meilleurs », estime Alain Dupont, président du Sefi. « Nous aimerions surtout pouvoir jouer à armes égales avec nos concurrents étrangers, qui sont bien souvent soutenus dans leurs efforts par la puissance publique de leur pays d'origine.»
Coordination pour le Kosovo
«Aux Etats-Unis, une équipe placée auprès du Président, à la Maison-Blanche, fixe chaque année avec les entreprises américaines les dossiers qui les intéressent. En France, l'ensemble des ministères devraient créer un poste équivalent pour soutenir des actions à l'export ». Abordée sous l'angle interministériel, cette question fait aujourd'hui l'objet de discussions à Paris, aux côtés du Medef.
L'actualité du moment pourrait d'ailleurs faire office de galop d'essai : une coordination interministérielle est déjà en place pour la reconstruction du Kosovo. Un « monsieur reconstruction » devrait être nommé au Medef, avec qui le Sefi travaille. Peu loquace sur le sujet, le syndicat confirme que des experts ont été envoyés sur place pour établir un état des lieux, et que les entreprises françaises de BTP devraient bénéficier du soutien de l'Etat sur ce marché. Il semblerait toutefois que la province du Kosovo n'ait pas été aussi touchée qu'on le pensait au départ. Les principaux ouvrages détruits se trouvent en Serbie, où l'aide internationale reste soumise à l'évolution politique du régime.
91,2 milliards de francs à l'international en 1998
Globalement, c'est-à-dire en comptant la Yougoslavie entière (avec le Kosovo, le Monténégro et la Serbie) et la Macédoine, l'enveloppe est actuellement évaluée à 25 milliards d'euros. Un chiffre que le Sefi ne serait pas surpris de voir à terme doubler. Les financements transiteraient par la Banque mondiale et la Banque européenne d'investissement, et se répartiraient comme suit : 150 millions d'euros pour des opérations humanitaires de court terme (déjà approuvés par la Commission européenne) ; 800 millions à 1 milliard d'euros pour les travaux d'urgence, notamment les logements ; et environ 4 milliards d'euros par an pendant cinq ans pour les infrastructures.
L'année dernière, les entreprises françaises ont réalisé un chiffre d'affaires de 91,2 milliards de francs (13,9 milliards d'euros) à l'international, soit une hausse de 4,3 % par rapport à l'exercice 1997. Leur internationalisation se poursuit clairement, leur activité exportatrice ayant représenté 39 % de leur activité globale en 1998, contre 37,4 % l'année précédente. « Dans l'ensemble de nos opérations, nous développons un savoir-faire à forte valeur ajoutée, et une ingénierie technique et financière de plus en plus sophistiquée, dont une manifestation est la concession ou BOT (1) », explique Alain Dupont. « Ces formules de recours par les Etats à la gestion privée, largement encouragée par les institutions multilatérales, sont appelées à se développer dans le monde face aux immenses besoins en infrastructures, et à la réduction parallèle des capacités d'investissement public ».
Les métiers à l'international ont ainsi beaucoup évolué selon le Sefi, la construction d'ouvrages d'art, de travaux publics et de bâtiment s'élargissant à la réalisation d'équipements et d'infrastructures de services (voir graphique). Les routes et terrassements conservent et améliorent leur première place, à 22 % (contre 19,4 % en 1997). Sont aussi en hausse très significative, en valeur absolue, l'électricité et l'énergie (21,7 %), l'offshore (10,4 %) et les canalisations (4,7 %). En revanche, le bâtiment (16,4 %), le génie civil (14,2 %) et les fondations (3,5 %) sont en recul.
(1) Build operate transfer.
GRAPHIQUES : Exportations françaises de BTP et d'infrastructures en 1998 , Répartition par zone gographique : L'Asie et le Proche et Moyen-Orient se sont tassés en 1998, tandis que l'Amérique du nord a fortement augmenté, pour atteindre désormais 12,3 % des débouchés, encore loin derrière l'Union européenne.
Répartition par activité : Les routes et les terrassements conservent et améliorent leur première place (22 % contre 19,4 % en 1997), devant l'électricité et l'énergie (stable) et le bâtiment (16,4 % contre 20,8 % en 1997).