C’est ce que l’on peut appeler le poids des habitudes. « Nous travaillons à 90 % pour des projets tertiaires en climatisation, chauffage, désenfumage, courants forts et faibles, protection incendie », explique Pierre Cousin, directeur du département « fluides plomberie » du bureau d’études SFICA. « Pour les applications « plomberie », en eau chaude et froide sous pression, cela fait effectivement deux ou trois décennies que les matériaux de synthèse ont montré leur validité, sans pour autant détrôner le cuivre ; les raisons sont multiples. »
À l’origine, les fabricants de matériaux plastiques ont proposé une alternative au cuivre, en réponse aux problèmes de corrosion que posait ce matériau, en eau chaude comme en eau froide. Depuis, le cuivre s’est considérablement amélioré, mais un certain nombre de prescripteurs ont eu le temps d’apprécier les qualités des produits de synthèse. « Aujourd’hui, souligne cet ingénieur, il existe encore une frontière entre les bureaux d’étude prescripteurs qui n’ont pas d’a priori, ni dans un sens ni dans un autre, et les professionnels de la pose. Dans l’ensemble, les plombiers restent plutôt réfractaires aux produits de synthèse. Pour moi, les raisons sont d’abord culturelles. L’acte de souder se situe au cœur de leur métier, les entreprises ont peur en s’éloignant du cuivre de perdre ce qui fait leur raison d’être. Plus globalement, le monde du bâtiment est très lent à évoluer, le matériau « plastique » sous toutes ses déclinaisons n’est pas perçu comme « noble ». Pourtant, le succès par exemple de la fenêtre PVC montre qu’une évolution de fond est possible. A contrario, le cuivre garde des atouts réels en terme de recyclabilité, c’est souvent plus compliqué pour les matériaux de synthèse. »
D’abord le HTA
« Dans les projets tertiaires, continue-t-il, où nous sommes très présents, le système HTA (ou PVCC, PVC surchloré) développé par Girpi est de loin le plus répandu dans les applications « plomberie ». Au milieu des années quatre-vingt, son ancêtre le Friatherm fabriqué par Friatec, déjà à base de PVC, avait montré la validité de cette technique pour des opérations importantes. » Viennent ensuite le cuivre, puis le procédé Mepla de Geberit qui est apprécié par les installateurs pour sa rapidité de mise en œuvre : le tube est glissé sur le raccord et pressé avec l’outil, la mise en service est immédiate.
L’usage des matériaux de synthèse nécessite une approche spécifique du supportage et des contraintes de dilatation. « En raison de leur constitution, ils ne doivent pas être « bridés » sur leurs supports ; des supports adaptés existent, et des lyres de dilatation doivent être prévues en fonction d’abaques précis fournis par les fabricants. »
Dépasser les idées reçues
Les promoteurs des matériaux de synthèse mettent en avant la résistance de ces produits à l’entartrage, mais aussi à la formation de biofilm, ce qui en fait un argument de taille vis-à-vis de la lutte contre les légionelles. « A mon sens, retient Pierre Cousin, ces affirmations doivent être relativisées. Les problèmes d’entartrage sont d’abord liés à la qualité de l’eau, le matériau utilisé pouvant réduire ou exacerber le phénomène, sans pour autant représenter la cause de fond. Cette remarque vaut également pour les légionelles. Ce n’est pas ou peu le produit qui compte, c’est la conception de l’installation. De plus, on sait aujourd’hui traiter le problème, en provoquant des chocs thermiques et en évitant les zones de température comprises entre 25 et 45 °C, zone de formation potentielle des légionelles. Dans ce cadre, les rubans chauffants ont montré leur efficacité, et je suis surpris d’un certain retour en arrière. Le ruban chauffant permet d’abandonner le retour, avec à la clé la suppression de l’équilibrage, des tés de réglage, des circulateurs… On revient à nouveau à la complexité du bouclage pour de multiples raisons. Une des causes invoquées est que le ruban chauffant ne répond aux instructions du Conseil supérieur d’hygiène publique de France vis-à-vis de la lutte contre les formations de légionelles. Pourtant, c’est une solution simple qui a démontré son efficacité. »
Des atouts en rénovation
Lors de rénovations en locaux habités, les matériaux de synthèse présentent des atouts évidents : pas de flamme, pas de risque d’incendie, pas de dégradation des revêtements décoratifs, pas de matériel lourd à traîner d’un appartement à l’autre et d’un étage à l’autre, des chantiers propres.
De plus, les entreprises acquises à ces matériaux reconnaissent un coût souvent compétitif, particulièrement dans les gros diamètres. Elles apprécient également de ne plus être encombrés par du matériel de soudure, qui est aussi parfois l’objet de convoitises sur les chantiers.
Enfin, même en cas de rénovations partielles, les différents fabricants fournissent des pièces de liaison autorisant des raccords fiables avec l’installation existante, quelle que soit la nature du matériau en place.

