L’un des grands objectifs de la réforme des CCAG, martelé pendant des mois, consiste en un rééquilibrage des relations contractuelles en faveur des entreprises. En ce sens, une des mesures fortes est le plafonnement des pénalités de retard à 10 % du montant du marché. Autre avancée notable sur le même sujet : l’organisation d’une procédure contradictoire préalable à l’application des pénalités, y compris en cas de non-respect des obligations sociales ou environnementales.
Plafonnement et procédure contradictoire
Présente lors d’une conférence organisée par l’Association des Professionnels européens de la carte d'achat (Apeca) le 30 septembre, Laure Bédier, directrice des affaires juridiques de Bercy est revenue sur ces deux nouveautés. Elle rappelle tout d’abord que le plafonnement des pénalités de retard « vise à éviter que les acheteurs publics ne mettent en place des pénalités trop élevées qui dissuaderaient les entreprises, et notamment les plus petites, de candidater aux marchés publics ». En outre, ajoute-t-elle, « l’idée originale était de plafonner l’ensemble des pénalités, mais, faute de consensus, seules les pénalités de retard ont eu droit à un tel traitement. »
Au sujet de la procédure contradictoire, Laure Bédier assure que cela permet d’éviter les applications de sanction automatique qui peuvent avoir pour effet de mettre en danger la poursuite des prestations. « Il faut bien avoir à l’esprit que cette procédure contradictoire n’est pas qu’en faveur de l’entreprise, c’est aussi une sécurité pour l’acheteur, d’où la nécessité de réfléchir vraiment avant de proposer des dérogations ».
Des annonces bien accueillies
Du côté des entreprises, ces nouveautés sont évidemment les bienvenues. Christelle de Oliveira, présidente de la CPME des Deux-Sèvres indique que « ce plafonnement des pénalités de retard à 10 % est un levier important pour l’accès des PME à la commande publique, car cela permet un engagement sur le plan économique plus serein ».
Sans surprise non plus, Nicolas Mohr, directeur général de la Médiation des entreprises, salue la généralisation de la procédure contradictoire. « Trop souvent, nous constatons que les discussions sur les pénalités sont reportées lors du calcul du solde final du marché. Or, ce n’est pas la voie la plus efficace, ni pour le maître d’ouvrage qui souhaite la bonne exécution des marchés, ni pour les entreprises qui veulent le juste paiement de leurs prestations. Cette procédure contradictoire prévue par les nouveaux CCAG est donc complètement dans l’esprit du dialogue que l’on recommande. Elle permet de s’expliquer et de mieux comprendre les contraintes réciproques du titulaire et du maître d’ouvrage lors de l’exécution du contrat. »
La pénalité, résultat de torts partagés
Lionel Ferraris, directeur des politiques publiques et du pilotage de l'offre chez l’Ugap, présente de son côté une tout autre approche. « Il y a quelques années, la pénalité de retard était un acte largement unilatéral avec une forme de présomption de mauvaise volonté de la part du fournisseur. Aujourd’hui, ça doit être un instrument de management de la relation fournisseur, ce management partant du sourcing jusqu’à la fin de l’exécution du marché, voire au-delà. Et dans ce contexte, la pénalité est la traduction de quelque chose qui s’est mal passé ».
Il estime, en outre, qu’il y a toujours une forme de torts partagés entre l’entreprise et l’acheteur. « Le déclenchement d’une pénalité peut, par exemple, résulter d’une mauvaise définition du besoin ». Aussi, conseille-t-il d’évoquer le sujet dès le sourcing, en discutant avec les entreprises sur les risques potentiels.