Commande publique : le projet de loi SVE adopté en première lecture au Sénat

Le vote solennel par les sénateurs du projet de loi de simplification de la vie économique a eu lieu ce mardi 22 octobre. Tour d’horizon des mesures « commande publique » de ce texte porté par le précédent gouvernement et fortement remanié par les sénateurs lors de son examen avant la dissolution de l'Assemblée nationale.

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Le vote solennel par le Sénat du projet de loi SVE a eu lieu le mardi 22 octobre.

Comme si de rien n’était. Mardi 22 octobre, le Sénat a repris son travail sur le projet de loi de simplification de la vie économique (SVE) là où il s’était arrêté avant la dissolution de l’Assemblée nationale en juin dernier - c’est-à-dire, au stade des explications de vote et du scrutin public solennel. En séance publique, les sénateurs ont entériné (par 232 voix pour et 103 contre) les modifications qu'ils avaient apportées au texte lors de son examen avant l’été.

Pour mémoire, ce texte, présenté par l’ancien exécutif et fruit d’une consultation citoyenne ainsi que d’un rapport parlementaire, a pour objectif de « simplifier la vie des entreprises, afin de leur permettre de se développer », peut-on lire dans son exposé des motifs.

« Place » prend davantage de place

Composé de 28 articles, le projet de loi tel que déposé par le précédent gouvernement comportait trois mesures consacrées à la commande publique. La première (article 4) pour rendre l’utilisation de la plateforme de dématérialisation des procédures de marchés publics « Place » obligatoire pour les opérateurs de l’Etat, les hôpitaux et les organismes de sécurité sociale. Aujourd’hui, seul l’Etat est tenu d’y recourir pour publier ses procédures (arrêté du 20 mai 2020). Lors de l’examen du projet de loi en juin, le Sénat a en outre ajouté une disposition permettant aux collectivités territoriales d’utiliser librement cette plateforme. 

Pas d’unification du contentieux

Les sénateurs ont en revanche supprimé l’article 5, qui visait à unifier le contentieux de la commande publique de sorte que tous les litiges soient du ressort de la juridiction administrative. Le texte prévoyait à cet effet d’étendre la qualification de contrat administratif aux marchés publics et aux concessions passés par des personnes de droit privé soumises au Code de la commande publique (CCP). Une proposition qui avait suscité l’ire des entreprises publiques locales et des bailleurs sociaux, directement concernés.

Des dérogations pour l’éolien en mer

Le Sénat a également procédé à quelques ajustements de l’article 16 créant de nouveaux assouplissements aux règles de la commande publique pour les marchés relatifs aux projets d’installations de production d’énergie renouvelable en mer. D’une part, en précisant que la possibilité de ne pas allotir, prévue dans le texte initial, est circonscrite aux marchés d’un montant supérieur à 10M € HT. D’autre part, en retirant la mesure permettant de déroger au paiement direct du sous-traitant.

Pérenniser le seuil de 100 000 euros pour les travaux

Par ailleurs, les sénateurs ont adopté en séance publique une dizaine d’amendements pour enrichir le volet « commande publique » du projet de loi. Le premier vise à pérenniser le seuil de 100 000 euros en deçà duquel les marchés publics de travaux sont dispensés de publicité et de mise en concurrence. Ce plafond rehaussé par rapport à celui des marchés de services et de fournitures (40 000 €), qui avait été institué provisoirement par la loi Asap (art. 142) de 2020 puis prolongé à titre temporaire par un décret du 28 décembre 2022, doit en principe disparaître le 31 décembre 2024.

Les variantes autorisées de plein droit

Les sénateurs ont aussi adopté l’amendement prévoyant d’inverser la règle actuelle en matière de variantes dans les procédures formalisées des pouvoirs adjudicateurs. Il s’agit d’autoriser par principe la présentation par les candidats d’offres alternatives, en sus de leur offre de base. Actuellement ces variantes sont proscrites, sauf indication contraire de l’acheteur (articles R. 2151-8 et suivants du CCP).

Autre mesure ajoutée par amendement : un article pour préciser que la notification du marché au titulaire ne doit pas intervenir plus d’un an après la décision d’attribution.

Achat circulaire… et innovant

Un article sur l’achat circulaire fait son apparition. Il a pour objet d’intégrer les marchés dans lesquels est prévu le recours à des matériaux issus du réemploi, du recyclage ou de la réutilisation dans la catégorie des achats innovants au sens de l'article R. 2122-9-1 du CCP. Ce qui permettrait de les passer sans formalités préalables s’ils portent sur un montant inférieur à 100 000 €.

Deux mesures pour les opérations immobilières

Deux dispositions portent sur les opérations immobilières publiques. La première pour créer une nouvelle catégorie de marché public global sectoriel (art. L. 2171-4 et suivants du CCP), dédiée à la conception, la construction et l’aménagement d’équipements ou d’infrastructures publics au sein d’un ensemble immobilier comprenant un programme de logement. Il prévoit également la possibilité de transférer au promoteur la maîtrise d’ouvrage globale du projet.

La deuxième vise à ajouter les ventes (Vefa) et baux en l’état futur d’achèvement (Befa) publics au sein des contrats exclus de la commande publique (art. L. 2512-5 du CCP).

Maîtrise d’ouvrage publique et Semop

Un autre article consiste à préciser que les règles de la commande publique relatives à la sous-traitance (art. L. 2193-1 et suivants) ne sont applicables que pour les marchés dans lesquels la maîtrise d’ouvrage est conservée par l’acheteur. Il s’agit principalement d’exclure le paiement direct dans les projets où la personne publique a transféré la maîtrise d’ouvrage à une personne privée.

Par ailleurs, a été ajouté un article qui vise à étendre le dispositif des sociétés d’économie mixte à opération unique (Semop) à tous les acheteurs publics. Pour l’heure, les Semop sont réservées aux collectivités territoriales (art. L. 1541-1 et suivants du Code général des collectivités territoriales).

Un « Small business act » ultramarin

A noter également une mesure pour l’Outre-mer. Elle prévoit la possibilité, dans les régions, départements et collectivités d’outre-mer, d’intégrer une clause réservant une part minimale (20 %) d’exécution aux PME et artisans locaux dans les marchés publics d’un montant supérieur à 500 000 €. Cette disposition ne serait applicable que pendant cinq ans.

Un motif d'exclusion supplémentaire

Enfin, les sénateurs ont prévu un nouveau cas d’exclusion des procédures de passation des marchés publics pour les entreprises qui n’ont pas déposé leurs comptes annuels (art. L. 232-21 du Code de commerce). Il s’agit d’un motif d’exclusion de plein droit, qui s'ajouterait à la liste des articles L. 2141-1 et suivants du CCP.

Des décrets attendus

Outre le projet de loi SVE, le plan de simplification présenté par le précédent exécutif comportait également une série de mesures réglementaires. Ainsi Bercy prévoyait notamment de permettre dès 2026 aux entreprises de candidater aux marchés publics en uniquement leur numéro Siret.

Deuxième décret « commande publique » annoncé : celui pour aligner le taux d’avance minimal dans les marchés publics des collectivités (10 %) sur celui des marchés de l’Etat (30 %) (art. R. 2191-7 du CCP), ainsi que le taux maximal de retenue de garantie qui passerait de 5 % à 3 % dans les marchés des collectivités (art. R. 2191-33 du CCP).

Reste à savoir si le nouvel exécutif compte reprendre ces mesures.

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