Décryptage

Comment va fonctionner l’Agence nationale de la cohésion des territoires

Le décret statutaire relatif à l’Agence nationale de la cohésion des territoires est paru au Journal officiel du 19 novembre 2019. Composition du conseil d’administration, rôle du comité national de coordination (composé de l’Anru, Anah, Ademe, Cerema, CDC), ressources de l’agence, comités locaux de cohésion territoriale… le texte détaille les missions et le mode de gouvernance de cet établissement public créé par la loi du 22 juillet dernier, qui fusionne au 1er janvier 2020 le CGET, l’Epareca et l’agence du numérique.

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Yves Le Breton, futur directeur général de l’Agence nationale de la cohésion des territoires.

Le décret n° 2019-1190 du 18 novembre 2019, pris en application de la loi du 22 juillet 2019 portant création d’une Agence nationale de la cohésion des territoires au 1er janvier 2020, et en fixant les règles d’organisation et le fonctionnement, est paru au JO du 19. 

Le texte est composé de 15 articles, dont une partie s’applique dès le 20 novembre 2019, et une autre (articles 2 à 5) entre en vigueur au 1er janvier 2020, date du transfert du personnel. Le conseil d’administration doit se réunir toutefois auparavant pour adopter le budget de l’agence et élire son président et son vice-président. Le décret impose que ce soit "avant le 15 décembre 2019", ce sera "entre le 10 et le 15 décembre", précise à AEF info Yves Le Breton, futur directeur général de l’agence, croisé le 19 novembre sur le salon des maires. Cette première réunion du CA sera, selon le décret, présidée par le doyen d’âge des représentants des collectivités.

Un lien fort avec les préfets, délégués territoriaux de l’agence

La première disposition du décret indique que l’ANCT est placée sous la tutelle des ministres chargés de l’aménagement du territoire, des collectivités territoriales et de la politique de la ville. Et qu’elle peut, "à leur demande", apporter son concours aux collectivités d’outre-mer dans des conditions définies par voie de convention.

Le décret indique bien, dès l’article 1, que l’agence "apporte son concours au préfet de région et au préfet de département", lequel tiendra le rôle de délégué territorial de l’agence dans son territoire. Ce concours se traduit par "une mission de veille et d’alerte" qui se manifeste par des "travaux d’observation de la politique de la ville et de la politique d’aménagement du territoire" et des "travaux de réflexions prospectives et stratégiques en direction des territoires, notamment en matière de transition numérique, écologique, démographique, de mutations économiques et de coopération transfrontalière". L’ANCT contribue également à la mise en place de dispositifs d’innovation et d’expérimentation de politiques publiques dans les territoires.

Yves Le Breton insiste sur "le développement d’une offre d’ingénierie - aider à monter des appels à projets par exemple - au profit des territoires qui ne disposent pas d’une ingénierie propre". "Il ne s’agit pas d’être en concurrence [avec des cabinets conseils ou d’autres opérateurs], mais de venir en complémentarité et de développer une expertise propre à l’ANCT."

Un CA de 33 membres, dont 16 représentants de l’État et 10 des collectivités

Le conseil d’administration de l’ANCT est composé de 33 membres avec voix délibérative. Outre 2 députés et 2 sénateurs, il comprend : 16 représentants de l’État dans les ministères (1) ; 1 représentant de la Caisse des dépôts ; 10 représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements "dont au moins un élu représentant une collectivité d’outre-mer", chaque association d’élus ayant un unique représentant quelle que soit sa taille (2), deux représentants du personnel. Un suppléant est désigné pour les membres autres que les parlementaires selon les mêmes modalités que pour les membres titulaires.

Assistent au conseil avec voix consultative : un représentant de l’Anru, un représentant de l’Anah, un représentant de l’Ademe et un représentant du Cerema (soit les opérateurs membres du comité national de coordination, moins la Caisse des Dépôts qui dispose d’une voix délibérative) ainsi que le directeur général de l’ANCT, le contrôleur budgétaire et l’agent comptable de l’établissement, le DGCL, commissaire du Gouvernement. Plus, au titre des personnalités qualifiées, un membre du Cese et un membre d’un conseil citoyen nommé par le ministre chargé de l’aménagement du territoire. "Peut en outre assister [au CA] toute personne dont le président juge la présence utile".

Le Comité national de coordination

Le comité national de coordination de l’ANCT, mentionné à l’article L. 1233-4, comprend, outre le DG de l’ANCT : le DG de l’Anru, le DG de l’Anah, le président de l’Ademe, le DG du Cerema, le DG de la Caisse des dépôts (ou leurs représentants). Le comité se réunit une fois par mois "pour assurer le suivi de l’exécution des conventions pluriannuelles".

Ces conventions pluriannuelles d’intervention et de participation financière, prévoient l’articulation entre les objectifs de l’ANCT et les projets ou stratégies des opérateurs signataires, ainsi que la mobilisation des moyens humains et financiers pour la mise en œuvre des actions de l’ANCT. Elles prévoient également les modalités selon lesquelles le délégué territorial est "le référent unique des collectivités territoriales pour les projets soutenus par l’ANCT" ainsi que les modalités de communication sur les projets soutenus par l’ANCT et leur articulation avec celle de ces opérateurs.

La durée du mandat des membres autres que les parlementaires est de trois ans, y compris celui du président qui est renouvelable une fois. À l’exception des parlementaires et des représentants du personnel, les membres du CA sont nommés par arrêté du ministre chargé de l’aménagement du territoire, et les représentants de l’État sur proposition de leur ministre.

Le rôle du CA

Les axes de travail de l’ANCT seront "tous discutés au sein du conseil d’administration", a assuré Yves Le Breton ce mardi sur le salon des maires, précisant que l’idée est bien "la poursuite des programmes en cours, comme Action cœur de ville, ou dont les prémisses ont été données, comme Petites villes de demain."

Selon le décret, le conseil d’administration de l’ANCT délibère notamment sur :

►   le budget initial et ses modifications, les emprunts, le compte financier et l’affectation du résultat de l’exercice ;

►   les orientations générales de l’établissement et des programmes d’appui territorialisés ;

►   les créations, cessions ou suppressions de filiales et les acquisitions, extensions et cessions de participations de l’ANCT mentionnées à l’article L. 1233-2 du CGCT ;

►   les conditions générales d’organisation et de fonctionnement de l’ANCT, dont le règlement intérieur de l’établissement ainsi que son propre règlement intérieur qui précise notamment les modalités de prévention des conflits d’intérêts ;

►   les conditions générales de recrutement, d’emploi et de rémunération du personnel ;

►   les conventions pluriannuelles passées avec l’État et l’Anru, l’Anah, l’Ademe, le Cerema et la Caisse des Dépôts, qui participent au financement et à la mise en œuvre des actions de l’ANCT. Ainsi que sur le bilan de la mise en œuvre de ces conventions, dressé à la fin de chaque année civile ;

►  le rapport annuel d’activité ;

►  les actions en justice et, "au-delà d’un seuil qu’il détermine, les transactions" ;

►  l’acceptation ou le refus des dons et legs ;

►  les conventions nécessaires au fonctionnement de l’agence et ses marchés.

Le conseil d’administration peut déléguer tout ou partie de certaines de ces compétences au directeur général de l’agence : celles concernant les filiales de l’Agence, les transactions ; les dons et legs et les conventions nécessaires au fonctionnement de l’agence et ses marchés.

Le CA se réunit au moins trois fois par an sur convocation de son président. Le commissaire du Gouvernement peut demander sa réunion extraordinaire sur un ordre du jour déterminé.

Les délibérations du conseil d’administration sont exécutoires de plein droit dès leur transmission au commissaire du gouvernement. Les délibérations concernant les prises, extensions et cessions de participations financières sont en revanche exécutoires de plein droit 15 jours après leur réception par le commissaire du Gouvernement "à moins qu’il n’y ait fait opposition dans ce délai".

Les missions du DG

Les responsabilités du directeur général de l’ANCT sont décrites dans le décret. Il prépare les délibérations du CA et en assure l’exécution ; il prépare et exécute le budget ; il est ordonnateur des recettes et des dépenses ; il dirige le personnel de l’établissement et à ce titre, il "a autorité sur l’ensemble des personnels, définit leurs attributions, nomme à toutes les fonctions pour lesquelles aucune autre autorité n’a reçu pouvoir de nomination et recrute les personnels contractuels".

Le DG de l’ANCT décide également des investissements et signe les contrats, conventions et marchés, actes d’aliénation, d’acquisition ou de location. Il représente l’agence en justice et dans tous les actes de la vie civile, il conclut et signe les transactions dans les conditions fixées par le conseil d’administration. Il est responsable de l’exécution de la convention permettant à l’agence d’impulser, d’aider à concevoir et d’accompagner les projets et les initiatives portés par l’État, les collectivités, les réseaux d’entreprises et les associations dans le domaine du numérique, visant à assurer la couverture de l’ensemble du territoire national par des réseaux de communications électroniques mobiles et fixes à très haut débit (convention mentionnée au III de l’article 2 de la loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019).

À la fin de chaque année civile, le DG transmet le bilan de la mise en œuvre des conventions pluriannuelles passées entre l’État et l’Anru, l’Anah, l’Ademe, le Cerema et la Caisse des Dépôts, aux ministres chargés de la tutelle de l’établissement, après son examen par le conseil d’administration.

Les Comités locaux de cohésion territoriale

Le préfet de département est délégué territorial de l’agence dans son territoire. Il peut nommer "délégué territorial adjoint" le DDT ou "d’autres personnels de l’État en service dans ce département". Le délégué territorial de l’agence assure le secrétariat du comité local de cohésion territoriale.

Le décret donne des précisions sur les comités locaux de cohésion territoriale, créés par la loi du 22 juillet 2019 et mentionnés à l’article L. 1232-2, et dont le rôle est d’être informés des demandes d’accompagnement émanant des collectivités territoriales et de leurs groupements, puis des suites qui leur sont données et, le cas échéant, de la mise en œuvre des projets concernés. Selon le décret, ces comités comprennent des représentants de l’État et de ses établissements publics, dont les représentants des établissements membres du comité national de coordination, des représentants des collectivités territoriales et des représentants des institutions, structures ou opérateurs, rattachés ou non à une collectivité territoriale intervenant dans le champ de l’ingénierie au profit des collectivités territoriales et de leurs groupements. La composition de chaque comité est définie par arrêté du préfet de département.

Un comité régional de financeurs

Le comité local de cohésion territoriale se réunit "autant que de besoin et au moins deux fois par an" dans chaque département. Il peut en effet "procéder à toute audition qu’il estime nécessaire au bon accomplissement de ses missions". Le délégué territorial de l’agence transmet chaque année le bilan d’activité de l’accompagnement des collectivités territoriales au DG de l’agence.

Le délégué territorial de l’agence anime également un comité régional des financeurs associant les représentants locaux des opérateurs membres du comité national de coordination. "Ce comité régional a pour objet de mobiliser les crédits nécessaires pour accompagner les collectivités territoriales à réaliser leurs projets de territoire", précise le décret.

Lorsqu’un projet de territoire concerne plus d’un département, le préfet de région désigne un délégué territorial chargé de la coordination du projet.

Ressources et moyens de l’agence

L’ANCT est soumise aux dispositions des titres Ier et III du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique. À partir du 1er janvier 2021, elle tiendra une comptabilité analytique.

Elle dispose des ressources prévues à l’article L. 1233-1 du CGCT, à savoir : des contributions et subventions de l’État et d’autres personnes publiques ; des financements par des personnes privées ; le produit des aliénations ; des dons et legs ; des revenus de biens meubles et immeubles ; la rémunération de ses prestations de services au titre des missions prévues au IV de l’article L. 1231-2 (missions précédemment exercées par l’Epareca) ; et "d’une manière générale, toutes les recettes autorisées par les lois et règlements". Elle est soumise, pour ses emprunts, aux règles fixées par le I de l’article 12 de la loi du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014. Elle perçoit également les dividendes et résultats de ses filiales et des sociétés au capital desquelles elle a pris des participations.

Le décret précise que des régies de recettes et des régies d’avances peuvent être créées.

L’ANCT s’appuiera également sur les ressources des membres de son comité national de coordination (Anru, Anah, Ademe, Cerema, CDC, voir encadré ci-dessus), définies dans le cadre des conventions pluriannuelles d’intervention et de participation financière signées avec chacun d’entre eux.

Effets induits

Un chapitre du décret est consacré aux dispositions modifiant d’autres textes, avec une règle générale : l’ANCT est désormais représentée dans les instances où le CGET, l’Epareca et/ou l’agence du numérique l’étaient auparavant, comme au Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire, l’observatoire des territoires, dans les instances en charge de la politique de la ville, à l’autorité nationale pour les programmes de coopération territoriale européenne, le conseil national de la montagne…

Quatre articles (articles 6 à 9) sont dédiés aux (complexes) conditions de transfert des contrats de travail des salariés du CGET, de l’Epareca et de l’agence du numérique vers l’ANCT. Les articles 10 et 11 précisent le transfert au 1er janvier 2020 des "droits, biens et obligations" de l’Epareca, et notamment que "le détail du transfert des immobilisations de l’État fait l’objet d’un arrêté conjoint des ministres chargés de l’aménagement du territoire et du budget".

(1) 2 représentants du ministre chargé de l’aménagement du territoire ; 2 représentants du ministre chargé des collectivités territoriales ; 1 représentant du ministre chargé du budget ; 1 représentant du ministre chargé des communications électroniques ; 1 représentant du ministre chargé de la culture ; 1 représentant du ministre chargé du développement durable ; 1 représentant du ministre chargé de l’éducation nationale ; 1 représentant du ministre de l'intérieur ; 1 représentant du ministre chargé du logement ; 1 représentant du ministre chargé des outre-mer ; 1 représentant du ministre chargé de la politique de la ville ; 1 représentant du ministre chargé de la recherche ; 1 représentant du ministre chargé de la santé ; 1 représentant du ministre chargé des transports.

(2) 1 représentant de l’Association des maires de France ; 1 représentant de l’Assemblée des communautés de France ; 1 représentant de l’Assemblée des départements de France ; 1 représentant de l’Association Régions de France ; 1 représentant de l’Association Villes de France ; 1 représentant l’association des maires ruraux de France ; 1 représentant de l’association Villes et banlieues ; 1 représentant de l’association France Urbaine ; 1 représentant de l’association des petites villes de France ; 1 représentant de l’association nationale des élus de la montagne.

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