De l’eau chaude en fosse : une solution de stockage thermique à grande échelle

L’agglomération paloise se penche, au côté d’Engie Solutions et de Newheat, sur le stockage en fosse dans le cadre du programme européen Treasure. Objectif : stocker le surplus d’énergie renouvelable disponible en été pour alimenter la future extension du réseau de chaleur de Pau en période hivernale.

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La faisabilité d'une fosse de stockage d'eau chaude est à l'étude pour alimenter l'extension du futur réseau de chaleur de la communauté d'agglomération de Pau.

Comment dépasser l’intermittence des énergies renouvelables ? Entre la chaleur produite de façon excédentaire pendant l’été et les pics de consommation hivernale, une solution connue consiste à stocker le surplus de chaleur en inter saison de façon à limiter l’appoint en gaz durant les mois les plus froids. Mais si elle est répandue pour de petits volumes au moyen de ballons tampons, qu’elle fait ses débuts sur la scène de la géothermie, cette solution n’est qu’au balbutiement de son développement à grande échelle.

C’est pourquoi la jeune entreprise Newheat - spécialisée dans le solaire thermique, et qui développe à travers l’Europe des solutions de stockage de chaleur renouvelable – et Engie Solutions avec la Communauté d’agglomération Pau Béarn Pyrénées annonçait fin juin leur participation conjointe a un programme européen de recherche et développement, nommé Treasure.

Un projet européen

Soutenu par l’Union européenne à hauteur de 9,9 millions d’euros, il vise à faire la démonstration de la pertinence de grands systèmes de stockage d'énergie thermique en fosse (ou Pit Thermal Energy Storage – PTES).  Ce système, qui consiste à accumuler et à décharger la chaleur au sein d'une fosse contenant de l'eau faisant alors office de fluide caloporteur, existe déjà, notamment au Danemark. En tout, une dizaine d'installation ponctue l'Europe.

Il s’agit maintenant d’améliorer leur conception, leurs procédures de développement et leur exploitation dans d’autres contextes territoriaux, au travers de 15 initiatives réparties dans cinq pays du continent et portées par 24 partenaires.

20 000 m3 pour Pau

La seule initiative tricolores retenue, qui constitue une première en France, concerne donc cette étude menée par Newheat et Engie Solutions, qui vise à développer un système de stockage de chaleur en fosse de grande capacité pour le relier à la future extension du réseau de chaleur urbain de l’agglomération paloise (Pyrénées-Atlantiques). « Il s’agit d’adresser de grands volumes, de 50 à 100 000 m3 de capacité de stockage, pour des réseaux de taille importante, celui de Pau fournissant 132 GWh d’énergie pour le chauffage et l’eau chaude sanitaire de 11 000 équivalents logements », détaille Cédric Maisonneuve, directeur du bureau d’études Territoire Sud Engie Solutions.

Le réseau de chaleur de Pau
La Communauté d’agglomération Pau Béarn Pyrénées a inauguré le 8 décembre 2023 le réseau de chaleur de Pau, qui compte 44 kilomètres de réseau et 169 sous-stations. Il alimente en chaleur 208 abonnés, soit l'équivalent de 11 000 logements, auxquels il fournit chauffage et eau chaude sanitaire pour 77,5 MW souscrits et 132 GWh d’énergie consommée.
Opéré par Pau Béarn Pyrénées Énergies Services (filiale commune d’ENGIE Solutions et de la Banque des Territoires), ce réseau est alimenté à 50 % par l'usine de valorisation énergétique de Lescar, à 25 % par la centrale biomasse implantée à Lons et à 25 % par la centrale gaz de l’Université de Pau et des Pays de l’Adour.
Le projet Treasure s’inscrit au travers « d’opportunités d’extension et de raccordement de nouveaux clients à hauteur de 25 %, tout en visant une amélioration du taux de couverture des énergies renouvelables au-delà des 75 % actuels », souligne dans un communiqué François Bayrou, président de la Communauté d’agglomération paloise.

Quelle faisabilité pour un démonstrateur ? 

La première phase du projet français, qui implique des études techniques, économiques et environnementales détaillées devrait durer un an, afin de déterminer la faisabilité d'un démonstrateur en fonctionnement. « Pour y parvenir, il faudra d’abord identifier un foncier disponible de plus de 5000 m² de surface, et mener des études de sol pour analyser sa composition avant de creuser à 5 ou 10 m de profondeur », explique Cédric Maisonneuve.

S’il est construit, le bassin de stockage sera ensuite drapé d’une couverture thermique, pour éviter les déperditions de chaleur vers l’extérieur et maximiser le rendement énergétique. « Tout l'enjeu consiste ici à améliorer les performances des matériaux employés et la résistance dans le temps du dispositif. Les études devront d’ailleurs être cumulées avec celle sur la gestion des eaux pluviales », poursuit-il.

De la même manière, les modèles de calculs thermiques employés pour dimensionner et simuler ce type de projet au mieux feront l’objet de développement. « L’objectif est de définir les paramètres clés permettant d’avoir un projet de stockage vertueux et apportant une stabilité tarifaire pour les abonnés du réseau de chaleur de Pau », rappelle le directeur du bureau d’études.

L'exemple du Danemark

Dans le cadre du programme européen, les équipes pourront aussi s’appuyer sur le retour d’expérience des installations de stockage en fosse de Høje-Taastrup en Danemark, certainement la plus grande d’Europe avec une capacité de 70 000 m3, et celle de Lidzbark Warminski en Pologne.

Le consortium Treasure prévoit in fine de fournir au moins trois grands démonstrateurs opérationnels et contrôlés et quatre démonstrateurs supplémentaires à un stade de développement plus précoce d’ici décembre 2027. En cas de résultats probants, cette innovation pourrait se voir dupliquée pour d’autres réseaux de chaleur urbains.

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