De l’échafaudage au rugby

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Mohed Altrad, fondateur du groupe Altrad et président du Montpellier Hérault Rugby -

Depuis deux ans, Mohed Altrad, président-fondateur du groupe du même nom spécialisé dans l’échafaudage et la bétonnière, dirige le club de rugby de Montpellier. Un nouveau rôle pour cet homme très actif, auteur de trois romans dont l’un a été sélectionné par l’Education nationale pour être lu au collège et au lycée.

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Mohed Altrad n’a jamais joué au rugby, mais il a le flair d’un grand demi d’ouverture. Toute sa vie, il a su saisir la balle au bond. Un jour de 1985, d’abord, lorsqu’il a repris une entreprise d’échafaudage de 150 salariés. Celle qui est devenue, sous son impulsion, le groupe Altrad, l’un des leaders mondiaux de l’échafaudage et de la bétonnière (fabrication, location et vente) avec 7 000 salariés et 730 millions d’euros de chiffre d’affaires cette année.

En mai 2011, Mohed Altrad prend encore le contre-pied en devenant président du Montpellier Hérault Rugby (MHR). Le club a alors besoin de plus de 2 millions d’euros pour survivre. Mohed Altrad, né en Syrie d’une famille de Bédouins mais enraciné dans la région montpelliéraine, est sondé. Il accepte d’injecter ses deniers personnels, devenant ainsi premier actionnaire du club puis président dans la foulée. « M’investir dans le MHR, c’est un peu faire un renvoi d’ascenseur à cette région dans laquelle je me suis construit », justifie-t-il de sa voix douce. Il impose toutefois ses conditions : que les collectivités maintiennent les subventions et ne se mêlent pas de la gestion du club. La force de Mohed Altrad est là : son investissement personnel est toujours conditionné par le respect du contrat passé.

Concilier efficacité et relations humaines

C’est en effet d’une main de fer que cet homme, à la gestuelle élégamment nonchalante, préside aux destinées du groupe Altrad et du MHR. Lorsqu’il reprend le club, il assainit ses finances et licencie le tiers du personnel administratif. Certains l’accusent alors d’être sans cœur. « Ceux-là ne savent pas ce que signifie diriger une entreprise », commente-t-il sobrement. Et ne savent pas que lorsqu’un homme du désert met son grain de sable quelque part, il se montre généralement très prévoyant, en suivant les « procédures » (un mot qui revient souvent dans sa bouche) qui lui semblent devoir s’imposer. « Il a le souci de la qualité des relations humaines, explique Christian Bouchenoire, directeur commercial d’Altrad. Mais cela ne prend jamais le pas sur l’efficacité. » En bon négociateur, Mohed Altrad fait volontiers le premier pas, dans l’attente d’un retour consistant. « Il donne a priori sa confiance à ses collaborateurs en leur donnant les moyens de remplir leur mission, observe Christian Bouchenoire. Ce qui les place dans une position de réussite nécessaire. » N’est-ce pas la démarche idéale pour tirer le meilleur de ses salariés ? « On travaille plus chez Altrad qu’ailleurs, indique Christian Bouchenoire. Les collaborateurs ont plus de responsabilités, ils se montrent donc plus investis. » Cet état d’esprit a permis au groupe de survivre à plusieurs crises. En 2009, il n’a pas perdu d’argent. « J’avais senti venir la crise, explique Mohed Altrad, toujours instinctif. Nous avons pris des mesures très tôt, en supprimant 600 postes, diminuant les stocks… Et nous recentrant sur l’activité location, qui représente aujourd’hui la moitié de notre activité. »

D’aucuns trouveront ces méthodes trop radicales. En tout cas, pour la première fois de son histoire, le MHR n’a pas perdu d’argent cette année. Une performance que le club doit à « l’exigence » de Mohed Altrad, selon Denis Navizet, son directeur général. « Quand on négocie avec un fournisseur pour un prix de 100, il va demander 50. Et il va l’obtenir… », commente-t-il. Comment ? En jouant d’un certain charisme. « Il inspire la confiance, se maîtrise en toutes circonstances, continue Denis Navizet. Si vous êtes énervé, il vous calme en trois mots : ç’en est presque énervant ! Mais j’apprends beaucoup, car on ne croise pas beaucoup de personnes comme ça dans sa vie. »

C’est vrai qu’il est rare d’entendre quelqu’un vous dire que la lecture de « Madame Bovary » a joué un grand rôle pour lui. « En Syrie, adolescent, j’ai lu une traduction arabe du roman de Flaubert, se souvient Mohed Altrad. J’ai été fasciné par la subtilité des descriptions. Aujourd’hui, de moins en moins de gens lisent, c’est affligeant. » En tant qu’écrivain - il est l’auteur de trois romans -, Mohed Altrad reste, comme à son habitude, discipliné, suivant les conseils de son éditeur. Son quatrième roman devrait avoir pour thème l’exil. « C’est quitter une terre pour aller vers une autre, mais cette définition s’applique mal à mon cas : la terre que j’ai quittée n’était pas un lieu stable, mais une étendue désertique. » C’est peut-être parce que Mohed Altrad a été très tôt habitué à vivre n’importe où qu’il n’a jamais perdu le Nord.

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