Sur quelle stratégie repose le projet de redéveloppement de Seine Aval ?
Notre démarche n’est pas celle de l’ingénieur qui veut tout planifier mais celle de la mise en relief. Notre objectif consiste à identifier des lieux sur lesquels nous pourrons nous appuyer et qui seront autant de leviers de transformation du territoire. A l’image de ce qui s’est fait à l’Emscher Park qui a su tirer parti de ses faiblesses – ses grandes friches industrielles – pour se métamorphoser. Sur un territoire de la taille de Seine Aval, l’objectif n’est pas tant la cohérence que la mise en mouvement.
Bien sûr, nous ne pouvons pas nous passer totalement d’une vision d’ensemble. Nous venons de sélectionner trois équipes – Obras (F. Bonnet), Antoine Grumbach (avec J.-R. Mazaud et H. Saudecerre) et LIN (F. Geipel) – dans le cadre d’un marché de définition sur la composition urbaine et paysagère de Seine Aval. Une autre étude, réalisée par le Syndicat des transports d’Ile-de-France, avec l’Epamsa, sur les besoins de déplacements à moyen et long terme, permettra de structurer l’offre de transports sur le territoire.
Comment allez-vous enclencher la mise en mouvement du territoire ?
Il faut donner à voir. Si la ZAC Mantes-Université nous permet d’être tout de suite opérationnels sur une grosse opération, il faut aussi lancer des projets de tailles diverses pour que le processus embrase toutes les communes. Les conventions d’études déjà signées avec six villes de Seine Aval (voir carte pages précédentes) vont permettre d’élaborer, en co-maîtrise d’ouvrage, des opérations d’aménagement. Nous espérons que deux seront au moins juridiquement engagées d’ici à la fin de l’année et que le premier coup de pioche sera donné en 2009. Sur le plan économique, la mise en mouvement repose aussi sur un opérateur ad hoc, l’Audas (Agence d’urbanisme et de développement de Seine Aval).
Sur quels sites se joue la réussite de Seine Aval ?
Partout car il s’agit bien d’une dynamique collective, mais en particulier sur cinq grands secteurs. Le premier, le cœur de la boucle de Chanteloup était regardé par chacune des communes concernées – Andrésy, Chanteloup-les-Vignes, Carrières-sous-Poissy et Triel-sur-Seine – comme sa périphérie. Il s’agit d’inverser le regard et de penser la boucle en termes de centralité. Ensuite, l’ouest du Mantois, situé entre Mantes-la-Jolie et Buchelay, à l’ouest, et Rosny, à l’est. La qualité des espaces et le rapport à la Seine sont autant d’atouts pour y créer un écoquartier. Mais ce projet ne peut être imaginé sans la création d’un transport en commun en site propre reliant Rosny et la gare de Mantes et sans une amélioration de la desserte routière, ce qui renvoie au péage de Buchelay.Trois autres secteurs sont concernés mais leur développement s’inscrit à plus long terme : le Bonniérois avec la Plaine de Freneuse, les Mureaux, où la transformation du cœur de ville est un préalable, et l’entrée de l’opération d’intérêt national (OIN) autour de Poissy et d’Orgeval, l’un des rares secteurs où il n’y a pas concordance avec le schéma directeur de la région Ile-de-France.
Le protocole signé le 31 janvier prévoit l’élaboration d’un schéma de cohérence commerciale…
Le commerce est l’un des éléments, voire l’élément le plus structurant du développement urbain. C’est aussi un vrai sujet au sens du développement durable. Il faut ringardiser le commerce de périphérie. Les 51 maires ont donné leur accord pour que soit définie une stratégie commune qui privilégie le commerce en ville. En attendant, les décisions sur les projets en cours sont suspendues.
Comment vous positionnez-vous par rapport au débat sur le Grand Paris ?
Je pense qu’une approche purement institutionnelle se heurterait inévitablement au débat proximité contre cohérence. Il faut raisonner en termes de projets et de maîtrise d’ouvrage collective. S’il y a un projet, la question du financement se résoudra facilement.
Il faut imaginer l’engagement simultané de plusieurs dizaines de projets de tous ordres (équipement, aménagement, transports, espaces naturels…) sur tout le territoire francilien, qui permettraient de changer le regard que l’on porte sur la région capitale. Et si certains sont un peu déraisonnables, un peu fous, tant mieux !
J’aimerais penser que notre démarche en Seine Aval où nous n’avons pas fait de super-intercommunalité ni prétendu tout résoudre, mais essayer de créer du mouvement et de l’enthousiasme, pourrait, toutes proportions gardées, donner un avant-goût d’un Grand Paris réussi.
propos recueillis par Nathalie Moutarde
