La fiche d’impact fait l’effet d’une douche froide : seules 2500 communes bénéficieraient du filet de sécurité promis au printemps par l’Etat pour compenser les pertes de recettes fiscales. A partir du projet de décret relatif aux conditions de mise en œuvre de l'article 21 de la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 (troisième loi de finances rectificative pour 2020), la banque des Territoires calcule le montant de cette compensation à 120 millions d’euros pour les finances communales.
Amertume
Le reste de la manne se répartirait entre une centaine d’établissements publics de coopération intercommunale, à hauteur de 110 millions d’euros, tandis que des syndicats mixtes de transport et de tourisme se partageraient 80 millions d’euros. Ce total maximal estimé à 310 millions d’euros laisse un goût amer aux collectivités qui se souviennent de la fourchette haute de l’évaluation publiée le 2 juin par le ministère de la Cohésion des territoires : 750 millions d’euros, pour 12 000 à 14 000 communes.
Bercy justifie les nouvelles projections par un impact de la crise sanitaire moins douloureux que prévu : « Le ministère a retenu par exemple que la perte de recettes issues de la taxe de séjour ne serait plus que de 21% (au lieu de 40% estimés auparavant) et que les recettes de droits de mutation à titre onéreux (DMTO) baisseraient de 15% (au lieu de 20%) », rapporte la Banque des Territoires.
Villages miraculés
La compensation applique au bloc local la règle suivante : « Leurs recettes fiscales et domaniales en 2020 ne seront pas inférieures à celles perçues en moyenne entre 2017 et 2019 », rappelle le ministère de l’Economie dans le rapport de présentation du projet de décret.
Pour les grandes villes et les métropoles fédérées par l’association France Urbaine, l’application de ce dispositif ressemble à un camouflet : les villages de moins de 1000 habitants regrouperaient 80 % des 2500 à 3000 communes bénéficiaires, selon ses estimations glanées lors de la réunion du comité des finances locales du 29 octobre.
Effet de panier
S’agissant des intercommunalités, France Urbaine pointe une règle qui favorise les 8 % d’autorités organisatrices de la mobilité organisées en syndicats mixtes, « éligibles à la compensation dans la mesure où elles disposent d’un panier de recettes fiscales restreint à leur activité, à savoir le versement mobilité ». Cet effet de panier résulterait d’un « parti pris de globalisation de l’ensemble des recettes fiscales et domaniales ». Résultat : le projet de décret laisse « la grande majorité des AOM » sur le bord de la route, selon France Urbaine.
A l’autre extrémité de l’échelle de taille des villes, la même frustration s’exprime : alors qu’elle anticipe une aggravation des pertes de recette avec la seconde vague de Covid 19, l’association des petites villes de France (APVF) se voit « écartée définitivement » du bénéfice de la compensation. « Cette forte diminution du soutien financier de l’Etat fait peser un risque conséquent sur la capacité d’autofinancement et d’investissement des petites villes et donc leur faculté de soutenir la relance économique sur leur territoire », dénonce l’APVF.
Consolation
Seul lot de consolation pour maintenir un semblant d’entente entre l’Etat et les collectivités, les modalités de versement des compensations trouvent grâce aux yeux de ces dernières : les bénéficiaires de la compensation toucheront leurs premiers acomptes d’ici à la fin novembre, avant un second versement attendu pour le printemps prochain. Mais selon les estimations de France Urbaine, la clause de compensation ne bénéficiera qu’à 7 % des collectivités potentiellement concernées.