« En 1985, la première fois que Haussimont a décroché les quatre fleurs des villes et villages fleuris, il n’y avait aucun jardin. Seuls des balcons fleuris avaient justifié le label », rappelle Bruno Roulot, maire du village de la Marne depuis 2001. L’aménagement de sept jardins et la gestion différencié des espaces verts ont jalonné sa route vers la reconquête de la nature.
« Tout est réparable »
Fort de sa vision à long terme, d’une équipe de bénévoles et d’un jardinier municipal, Bruno Roulot déroule depuis sa première élection un programme qui transforme la commune de 144 habitants en fer de lance de la biodiversité : jardins thématiques, mares alimentées en eau par des éoliennes et équipées de caméras pour permettre l’observation des insectes en salle, piste cyclable conduisant au dernier bosquet rescapé des deux remembrements d’après-guerre...
« Tout est réparable », estime l’élu de la région de la Champagne crayeuse, morne plaine défrichée après-guerre pour laisser la place à la grande culture, « au cœur de la diagonale du vide et au milieu de nulle part », comme il se plaît à le rappeler. Seuls les arbres inclus dans des emprises militaires ont pu échapper aux abattages.
Sources multiples
Des sources d’inspiration multiples et le sens des opportunités ont guidé les deux décennies d’aménagement : Haussimont a récupéré des pavés du chantier de la place Jeanne-d’Arc de Reims ; la commune s’est inscrite dans l’appel à projets d’Etat sur la stimulation des cinq sens dans l’espace public. Un voyage à Montréal a déterminé Bruno Roulot à dépasser en qualité le jardin des sens de la métropole québécoise.

Cinq chambres structurent le jardin sensoriel, alimenté en eau par des éoliennes.
« Fan du Sahara, j’ai réalisé une oasis », résume le maire de la commune de l’agglomération de Châlons-en-Champagne, membre du bureau de l’agence d’urbanisme, qui a régulièrement soutenu les stratégies foncières mises en place par la commune pour reconquérir la biodiversité. Les pics de température de l’été dernier ont conforté cette politique : la survie de l’îlot de nature de Haussimont a reposé sur l’eau des mares, pompées par des éoliennes.
Retour de la biodiversité
106 espèces d’oiseaux, 43 pour les papillons, 31 pour les sauterelles, 23 pour les libellules, et 340 espèces de plantes : sans équivalent dans les environs, l’inventaire de la biodiversité réalisé en 2012 par la Ligue pour la protection des oiseaux nourrit l’optimisme de Bruno Roulot.
Une communication tous azimuts donne à un nombre croissant de visiteurs l’occasion de prendre connaissance de ces résultats. La biodiversité s’ajoute aux équipements sportifs multigénérationnels et gratuits, pour stimuler l’attractivité du village, comme en témoigne le kit d’initiation à l’escalade installé sur la paroi du château d’eau.

Une communication tous azimuts stimule la notoriété multi-générationnelle du village.
Changement de braquet
L’étape suivante, en cours de formalisation, associera 11 communes et quelque 80 exploitants agricoles volontaires, y compris la famille Roulot, pour métamorphoser 30 000 hectares : le plan biodiversité en gestation avec l'association Symbiose se traduira par la multiplication des bosquets au bord des champs, pour inviter les pollinisateurs et auxiliaires à prendre le relais des produits phytosanitaires.
Pour résumer sa pensée, Bruno Roulot aime citer Romain Gary : « Il faut toujours connaître les limites du possible, pas pour s’arrêter, mais pour tenter l’impossible ».