L’arbre urbain se coule dans le modèle climatique Cooltrees

La modélisation de l’impact des arbres sur le rafraîchissement des villes franchit un cap. Entamé en 2017, le projet Cooltrees apportera d’ici à la fin de cette année une partie des réponses au défi posé par l’Agence nationale de la recherche, au titre des « systèmes urbains durables ».

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L'équipe Cooltrees mesure les interactions climatiques entre les arbres, le sol et les bâtiments, dans les jardins du palais universitaire de Strasbourg.

Dans deux allées de tilleuls des jardins du palais universitaire de Strasbourg, les spécialistes des arbres urbains croisent leur savoir-faire avec les ingénieurs topographes et les géographes climatologues.

L’arbre interagit avec la ville

Comment les plantes interagissent-elles avec les bâtiments de grès rose et les revêtements de sol gravillonnés hérités de la période de l’annexion de l’Alsace Lorraine ? Depuis 2017, Marc Saudreau coordonne l’équipe de recherche Cooltrees, concentrée sur cette question.

Implantées à quelques centaines de mètres du palais universitaire, deux équipes strasbourgeoises secondent son laboratoire de physique et physiologie intégrative de l’arbre en environnement fluctuant (Piaf), rattaché à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) de Clermont-Ferrand : le département topographie de l’institut national des sciences appliquées (Insa) et la faculté de géographie de la capitale alsacienne. Les soutiens de l’Eurométropole de Strasbourg et de l’association Plante & Cité complètent le tour de table du projet de 752 000 euros.

« Dans l’idéal, nous aurions préféré tester des arbres sur une voirie plus passante, mais la fragilité de l’instrumentation nous a conduits à choisir un site moins exposé, tout en restant représentatif d’un contexte urbain », explique Marc Saudreau.

Mémoire topographique

La représentation en trois dimensions de l’architecture des arbres mobilise deux techniques maîtrisées par les ingénieurs topographes : la télédétection par laser – couramment désignée par l’acronyme lidar issu de l’anglais light detection and ranging – et la photogrammétrie. Sous la surface de la canopée, ces outils décomposent les branches, les troncs et jusqu’au modelé du sol.

« Les modèles météorologiques préexistants n’appréhendent pas la rugosité de la ville : tout est aplati, ce qui ne permet pas d’introduire les effets d’ombre et de hauteur caractéristiques des canyons urbains, très importants pour appréhender la chaleur ressentie », note Marc Saudreau.

Ce constat ressort d’une précédente recherche de référence sur le sujet : Vegdud, déjà conduite avec les financements de l’ANR et la participation de l’Eurométropole de Strasbourg, entre 2007 et 2014. « Il manquait à ce projet un site instrumenté », poursuit Marc Saudreau.

La quête de l’évapotranspiration

A la description topographique des arbres, les géographes ajoutent la mesure des échanges d’air et d’humidité entre les végétaux et l’atmosphère urbaine. L’équipe coordonnée par le Piaf concentre son attention sur le graal des chevaliers du rafraîchissement urbain : l’évapotranspiration, nom donné aux flux humides et rafraîchissants émis par les plantes. A Strasbourg, la proximité de la nappe rhénane entretient cette propriété conditionnée par une bonne irrigation.

Microdendrométrie

Pour mesurer l’évapotranspiration, Cooltrees bénéficie d’une instrumentation mise au point avec la métropole du Grand Lyon dans le projet Biotop, financé par l’Union européenne en 2017 et 2018, et consacré aux applications de l’internet des objets (IOT). Les microdendromètres sans fils mis en place sur l’avenue Garibaldi, dans le quartier de la Part Dieu, ont permis de mesurer la turgescence des branches occasionnée par la remontée capillaire des eaux captées par les racines.

Les arbres partagent leur bien-être à travers l’évapotranspiration, dont l’effet s’ajoute à celui de l’ombre pour diminuer la température ressentie en période de canicule. En cas d’interruption du phénomène pour cause de stress hydrique, la connexion des microdendromètres permet un déclenchement automatique de l’arrosage.

Aides à la décision

Non contents d’intégrer les acquis de Biotop dans Cooltrees, le Piaf anticipe les étapes suivantes : « Dans le cadre d’une démarche coordonnée avec Porto et Louvain au Portugal et en Belgique, nous nous sommes concentrés sur les tilleuls. La modélisation d’autres arbres répondrait à la tendance des villes à diversifier les essences, pour prévenir les risques de transmission de maladies ou de parasites », développe Marc Saudreau.

Sans attendre la concrétisation de ces perspectives, le coordonnateur de Cooltrees imagine les retombées possibles : « La plupart des métropoles disposent de bases de données géographiques sur lesquelles elles pourraient faire tourner le modèle ». La mesure prédictive de l’impact climatique d’une densification végétale constituerait selon lui une précieuse aide à la décision.

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