Réaliser une évaluation environnementale avant toute modification ou mise en compatibilité d’un document d’urbanisme avec un document d'urbanisme supérieur, lorsque ces évolutions ou mises en compatibilité peuvent impacter l’environnement. C’est ce qui est dorénavant imposé aux collectivités territoriales et à leurs groupements par le Conseil d’Etat dans un arrêt du 19 juillet.
A l’origine de cette décision, le recours en annulation intenté par l’association France Nature Environnement contre le décret du 28 décembre 2015 portant modernisation du contenu du plan local d’urbanisme. Etaient notamment mis en cause les articles R. 104-1 à R. 104-16, R. 104-21 et R. 104-22 du Code de l’urbanisme relatifs au champ d’application et à la procédure d’évaluation environnementale des documents d’urbanisme (1).
Tout d’abord, le Conseil d’Etat rappelle que les mises en compatibilité des documents d'urbanisme avec des déclarations d'utilité publique (DUP) ou avec des documents supérieurs peuvent constituer, en raison de leur ampleur, des évolutions de ces documents devant faire l'objet d'une évaluation environnementale. Mais, poursuit le Conseil, si les articles R. 104-1 à R. 104-16 du Code de l'urbanisme prévoient bien les conditions dans lesquelles les mises en compatibilité de ces documents sont soumises à évaluation environnementale dans le cadre d'une DUP ou d'une déclaration de projet, ils ne comportent pas de dispositions relatives à leur mise en compatibilité avec des documents supérieurs – comme un schéma de cohérence territoriale (Scot) par exemple. La Haute Juridiction annule donc ces articles, mais seulement « en tant qu’ils n’imposent pas la réalisation d’une évaluation environnementale dans les cas où la mise en compatibilité d’un document local d’urbanisme avec un document d’urbanisme supérieur est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement ».
Par ailleurs, les évolutions des plans locaux d’urbanisme (PLU) – révision ou modification – doivent aussi faire l’objet d’une évaluation environnementale (art. L. 104-3 C. urb.). Or, pour la procédure de modification, le décret du 28 décembre 2015 ne prévoit cette évaluation que dans deux situations : lorsque la modification permet la réalisation de travaux, aménagements, ouvrages ou installations susceptibles d’affecter de manière significative un site Natura 2000 et lorsqu’elle porte sur la réalisation d’une unité touristique nouvelle en zone de montagne. En dehors de ces hypothèses, aucune évaluation n’est prévue. Le Conseil d’Etat estime alors qu’ « en ne prévoyant pas les conditions dans lesquelles une évaluation environnementale doit obligatoirement être réalisée dans les autres situations, alors qu'il n'est pas exclu par principe que les évolutions ainsi apportées à ce plan soient susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement […], les dispositions attaquées ont méconnu l'article L. 104-3 du Code de l’urbanisme ».
Les juges du Palais Royal donnent également raison aux requérants en annulant le II de l’article 12 du décret relatif aux dispositions transitoires applicables à l’évaluation environnementale des cartes communales.
Enfin, pour justifier l’annulation des articles R. 104-21 et R. 104-22 du Code de l’urbanisme relatifs à la procédure d’évaluation environnementale, le Conseil d’Etat se fonde sur sa décision n° 365876 du 26 juin 2015. Dans cet arrêt, le Conseil avait annulé les dispositions des alinéas 1 à 7 de l'ancien article R. 121-15 du Code de l'urbanisme « en tant qu'elles désignent l'autorité administrative de l'État compétente en matière d'environnement pour l'élaboration du chapitre individualisé du Scot valant schéma de mise en valeur de la mer et la mise en compatibilité d'office par le préfet du PLU ou du Scot avec des documents supérieurs ». Ces dispositions ayant été reprises, « sans changement des circonstances de droit » par les articles R. 104-21 et R. 104-22, il semblait logique que la Haute Juridiction administrative les annule « dans la même mesure ». Pour Florian Ferjoux, avocat au sein du cabinet Gossement Avocats, l’effet de cette annulation devrait toutefois être limité dans la mesure où un décret du 28 avril 2016 a déjà modifié ces articles, dans un sens cohérent avec la décision du Conseil d’Etat du 19 juillet.
En revanche, pour l’annulation « partielle » des articles R. 104-1 à R. 104-16, l’avocat estime qu’il serait opportun que le pouvoir réglementaire adopte un nouveau décret pour d'une part, étendre le champ d’application de l’évaluation environnementale aux éléments manquants visés par l’arrêt du 19 juillet et d'autre part, préciser si l’évaluation exigée sera systématique ou au cas par cas.