Quelles sont les évolutions en cours dans l'immobilier de bureau ?
C'est une réflexion que nous avons engagée "à fond" en 2009. En 2012, nous avons produit un travail de fond sur les évolutions sociologiques, techniques et économiques, qui font que les entreprises travaillent différemment. L'importance de plus en plus importante de l'innovation et de la créativité font que le management change et, qu'à terme, l'organisation spatiale change aussi.
Dans ce livre, nous avons décrit ces tendances. Depuis c'est presque devenu une tarte à la crème. Nous sommes arrivés à la conclusion que le développement du numérique et du digital, couplé à la course à l'innovation, ne signifiait pas la fin des bureaux mais qu'ils renforçaient au contraire les besoins de lieux d’échanges physiques, avec des bureaux qui offrent ces possibilités d'échanges.
"L'espace physique devient un moyen d'attirer les meilleurs talents"
Qu'est ce qui change, alors, dans l'organisation des sites ?
Auparavant, il s'agissait de concevoir des lieux de production avec un encadrement et un management verticaux. L'efficacité de l'organisation était la chose essentielle, ce qui se mariait bien avec une organisation spatiale de type militaire, verticale. Mais le paradigme du lieu de travail change. L'espace physique prend une désormais une dimension nouvelle. Il doit devenir un accélérateur de la course à l'innovation, dans laquelle se sont lancée tous les métiers depuis 10 ans. Il devient aussi un moyen d'attirer les meilleurs talents.
De « nouveaux » bureaux plus « sexy » pour attirer les créatifs ?
Exactement. Les créatifs sont devenus le « nerf de la guerre » des entreprises. Et le lieu de travail devient un argument d'embauche. Or, les jeunes qui sortent de l'école ne veulent pas travailler dans un bureau qui ressemble à un bureau. Ils ont besoin d'endroits où la frontière entre privé et professionnel s'efface. Ils veulent être comme à la maison, avec de la lumière naturelle, des jardins, des terrasses. Il faut que ce soit cool. Il faut pouvoir s'allonger 5 minutes en réfléchissant, car ça fait partie intégrante du boulot.
Le bureau doit aussi représenter les valeurs de l'entreprise. Il doit surtout faciliter les échanges. Être innovant de façon disruptive nécessite plus d'agilité et plus d'intelligence collective.
"Nous avons imaginé la programmation avant la forme"
Comment les lieux de travail peuvent-ils favoriser l'innovation et l'intelligence collective ?
Cela ne se résume pas à des espaces ouverts, du mobilier de couleur ou à un baby foot ! C'est beaucoup plus profond que ça et implique que l'organisation humaine change aussi en amont. Quand on regarde comment naissent les idées, on se rend compte que l'essentiel de innovation et des découvertes sont le fruit de rencontres non prévues. Les espaces de rencontre deviennent donc primordiaux. Et le sujet de l'immobilier de bureau n'est plus un sujet de direction technique mais un sujet de RH, voire de direction générale.
C'est le cas sur le Shake ?
Sur le Shake, contraction de Share and Work, nous avons poussé très loin le concept en inventant en amont le programme avec le promoteur (Nacarat) et le principal futur utilisateur (La Caisse d'Epargne Hauts-de-France).
Le bâtiment propose une mixité d'usage (crèche, restaurants divers, hôtel, espaces partagés, conciergerie, terrasses, potagers, incubateur high -tech, salle de fitness, auditorium de 350 places, commerces...) et des surfaces de rencontres et d'échange inédites (NDLR : 4000 m² sur 30 000 m² du programme). Nous avons imaginé la programmation avant la forme. Elle a été conçue ensuite pour être optimum, pour accueillir tous les usages et espaces partagés, avec une très grande ouverture sur le quartier. Le public pourra accéder aux terrasses, aux jardins et aux commerces. C'est un bâtiment privé qui sera d'utilité publique.