L'étude prospective que vient de publier la Datar (Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale), « Quelle ambition pour la politique des transports de la France en Europe ? », provoque déjà des remous. Robert Savy, président du conseil régional du Limousin, vient de donner sa démission du Conseil national d'aménagement du territoire parce que l'étude de la Datar s'interroge sur la pertinence, vu son coût, d'un TGV pendulaire Paris- Limoges-Toulouse. Cela augure de la vivacité du débat sur les transports qui commencera le 13 mai à l'Assemblée nationale.
Remettre en avant les atouts du canal Seine-Nord
Pressentant les difficultés à venir, Jean-Paul Delevoye, ministre de la Fonction publique de la Réforme de l'Etat et de l'Aménagement du territoire, a déclaré lors de la présentation de l'étude, le 24 avril : « Le débat parlementaire sur les infrastructures ne doit pas être un marchandage politique, il nous faut définir une stratégie des transports pour une Europe à 25 qui tient compte des enjeux à venir. » C'est le rôle dévolu à la Datar dont l'étude va, tout comme l'audit réalisé par le Conseil national des ponts et chaussées et l'Inspection générale des finances, alimenter le débat parlementaire. Selon Nicolas Jacquet, l'audit a été sévère et a éliminé des projets auxquels on demandait un retour sur investissement trop court par rapport à leur portée.
La Datar se place dans une tout autre logique que la rentabilité financière, et privilégie développement économique et préservation de l'environnement. « Le système de transport doit être organisé pour créer de la richesse, la France ne doit pas être un simple pays de transit. Nous devons avoir en vue trois enjeux : renforcer les ports et aéroports de dimension internationale, développer l'activité logistique, garantir l'accessibilité des métropoles françaises à vocation internationale », a affirmé Nicolas Jacquet, délégué à l'Aménagement du territoire et à l'Action régionale. Mais a-t-il prévenu : « Nous devons aussi respecter le protocole de Kyoto concernant la lutte contre l'effet de serre. »
Préoccupation qui explique une stratégie favorisant d'autres systèmes de transports que la route. La Datar propose même de créer un vrai réseau ferroviaire à priorité fret et remet en avant les atouts du canal Seine-Nord. Ce dernier ouvrirait au port du Havre un plus vaste arrière-pays. Ne pas le réaliser dissuaderait les armateurs d'investir. Le Havre pourrait être également desservi par une ligne ferroviaire à priorité fret qui contournerait l'Ile-de-France pour passer par Amiens. Marseille, autre port que la Datar souhaite voir se développer, devra bénéficier de la création de la magistrale Eco-Fret, ligne ferroviaire Sud-Nord traversant l'est de la France.
Les TGV ouvrent des lignes de fret
L'intérêt des lignes TGV se mesure également à l'aune des flux de fret qu'elles peuvent dégager. Ainsi, Lyon-Turin, primordiale pour le trafic voyageurs, l'est moins pour le fret, du fait des projets suisses de tunnels et de Modalohr, la nouvelle autoroute ferroviaire de fret que mettra en place la SNCF en juin. Il en va autrement pour la ligne desservant Bordeaux : « Il est fondamental de traverser les Pyrénées par le Pays basque, le TGV Paris-Bordeaux doit être réalisé dans les plus brefs délais, puis Bordeaux-Toulouse et enfin l'Espagne », a déclaré Nicolas Jacquet.
Le désenclavement de Strasbourg par le TGV Est et son interconnexion avec l'ICE allemand pour atteindre Francfort, est également prioritaire. Francfort a vocation à devenir l'aéroport international de Strasbourg.
Parmi les aéroports français, le projet d'extension Lyon-Saint-Exupéry est fortement soutenu. Mais la Datar encourage aussi la création, notamment entre Marseille et Nice, d'aéroports desservant deux métropoles.
Côté routes, elle souhaite que l'on utilise de nouveaux corridors de circulation pour la logistique. Ceux-ci décongestionneraient les axes saturés. Par ailleurs, l'établissement d'un schéma national des plates-formes logistiques permettrait de se concentrer sur celles capables d'attirer des opérateurs de dimension européenne.
Les priorités ferroviaires
TGV Tours-Bordeaux
TGV Bordeaux-Toulouse
TGV contournement Nîmes-Montpellier
Seconde phase TGV Est Paris-Strasbourg, interconnexion TGV/ICE sur l'axe Strasbourg-Francfort.
Extension TGV Lille-Londres, Lille-Amsterdam
Jonction est-ouest des réseaux TGV au sud de Paris
TGV Côte d'Azur entre Marseille et Nice
Trains régionaux rapides Lyon-sillon alpin
TGV Paris-Rennes
Magistrale Eco-Fret