Il y a deux ans le groupe de travail « Efficacité Energétique des Bâtiments » du think thank The Shift Project rendait public les résultats de ses travaux sur le passeport énergétique. Un outil visant à massifier les travaux de rénovation énergétique dans les logements, notamment en accompagnant les propriétaires dans leur démarche et en les amenant à passer à l’acte.
Depuis, force est de constater que rien ne s’est passé. Ou pas tout à fait quand même, puisque les membres de ce groupe de travail : le Cercle Promodul, Edf, Saint-Gobain Habitat, Schneider Electric et The Shift Project viennent de créer l’association Expérience P2E pour expérimenter le passeport, tel qu’ils en avaient posé les bases. Ce dernier, à la fois portail internet et support technique, doit permettre à la suite d’un audit assisté, et ce grâce à une combinaison de performances des différents éléments et paramètres pris en compte dans l’efficacité énergétique du bâtiment, la définition d’une trajectoire de travaux à réaliser pour les ménages.
L'expérimentation pour être au plus près des besoins
L’idée est de capitaliser sur l’expérimentation de ce dispositif via les territoires souhaitant s’engager dans des projets de transition énergétique et de passer de quelques maisons à des milliers.
Cette expérimentation qui durera 18 mois, s’articulera autour de trois axes.
Le premier consiste à mieux cerner les conditions permettant de faire du P2E une démarche de massification de la rénovation énergétique pour atteindre une classe énergétique équivalente A ou B sur l’ensemble du parc dans le respect des objectifs de la Stratégie nationale Bas Carbone à l’horizon 2050.
Le deuxième axe est de mettre à disposition des collectivités territoriales un outil accessible depuis internet, s’adressant aux particuliers, aux auditeurs et aux professionnels, à travers une interface graphique reflétant l’état des lieux des logements audités. Cet outil propose des bouquets de travaux élaborés par la société d’ingénierie Enertech, un suivi du plan travaux et des possibilités de financement.
Enfin, il conviendra de capitaliser les retours d'expérience sous forme de traitement statistique via une base de données indépendante dans le but de tirer des enseignements selon les différentes typologies des logements et les zones géographiques.
Jouer la carte de la psychologie des propriétaires
Après le lancement de l’expérimentation des passeports dans les territoires à énergie positive pour la croissance verte par Engie fin 2015 ou encore celui plus récent en août dernier avec le fournisseur de gaz et d'électricité Direct Energie, des programmes qui s’inscrivent dans le cadre des certificats d’économie d’énergie, l’initiative menée par Expérience P2E s’appuie sur une approche différente, différente même de tout ce qui existe déjà dans les territoires.
Ainsi, plutôt que d’aborder le marché de la rénovation énergétique par les aspects techniques, ce qui ne séduit pas les ménages, c’est l’aspect psychologique des propriétaires qui est ici privilégié. « On veut éclairer les propriétaires sur le potentiel de leur logement, sur les capacités d’amélioration, et leur montrer tous les avantages qu’ils pourront tirer des travaux de rénovation, notamment en termes de confort et de valorisation de leur bien, explique le président de l’association Frank Hovorka (1). La période des 18 mois doit être mise à profit pour travailler sur l’aspect marketing de la démarche, car l’objectif est bel et bien que les gens s’approprient la rénovation énergétique, qui doit se transformer en réflexe à chaque fois que l’occasion se présente ».
La démarche étant récente, il reste encore de nombreuses pistes à explorer. « Nous réfléchissons avec d’autres associations spécialisées sur certains sujets, comme par exemple l’évolution de nos outils, l’identification des auditeurs et leur accompagnement, une définition plus pointue du parcours client, élément essentiel pour accompagner les propriétaires dans leur démarche jusqu’au passage à l’acte », ajoute le président qui reste convaincu qu’il est nécessaire de créer une chaîne de confiance entre les particuliers et les professionnels.
L’association, qui espère que le passeport sera expérimenté dans un millier de maisons en 18 mois et attend de grands enseignements de cette expérimentation, a créé autour de son conseil d’administration trois collèges : les membres fondateurs, les partenaires et les territoires.
Animés et pilotés par Benoît Montels, ingénieur thermicien spécialisé dans la performance énergétique, six groupes de travail (outil, démarche client, base de données associée à l’outil, déploiement de l’expérimentation, formation des auditeurs et communication) ont été lancés. Histoire d’avancer plus vite.
