Décryptage

Le BTP sommé de trier ses déchets

Economie circulaire -

La loi impose de nouvelles obligations en termes de collecte et de recyclage des matériaux sur les chantiers.

 

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La promulgation de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire au JO du 11 février 2020 n'est que la première étape d'un renforcement des obligations du secteur de la construction vis-à-vis des déchets de chantier. Voici ce qui attend le BTP.

Un « diagnostic ressources et économie circulaire » obligatoire (article 51)

Ce que dit le texte. « Lors de travaux de démolition ou réhabilitation significative de bâtiments, le maître d'ouvrage est tenu de réaliser un diagnostic relatif à la gestion des produits, matériaux et déchets issus de ces travaux. »

Ce qu'en pensent les professionnels. « La conséquence de l'extension du diagnostic, c'est de pousser à terme les industriels à écoconcevoir leurs produits pour permettre une déconstruction sélective. Aujourd'hui, par exemple, dans le cas d'un parpaing enduit de plâtre, on peine à récupérer le plâtre d'un côté, et le parpaing de l'autre, explique Roland Marion, délégué général de la Confédération des métiers de l'environnement. Si le produit est écoconçu, cela facilitera les choses. »

Création d'une filière « Responsabilité élargie du producteur » au 1er janvier 2022 (article 62)

Ce que dit le texte. « Relèvent du principe de responsabilité élargie du producteur (REP) les produits ou matériaux de construction du secteur du bâtiment destinés aux ménages ou aux professionnels afin que les déchets de construction ou de démolition qui en sont issus soient repris sans frais lorsqu'ils font l'objet d'une collecte séparée et afin qu'une traçabilité de ces déchets soit assurée. »

Ce que craignent les entrepreneurs et les industriels de la construction. Dès les premières discussions autour de la création d'une filière REP pour les déchets du BTP, le collectif dit « des quatorze », regroupant notamment la Capeb, la Fédération française du bâtiment ou encore l'Union sociale pour l'habitat, a dénoncé un dispositif coûteux, et une « usine à gaz » qui viendrait perturber les filières de recyclage et de réemploi qui se développent depuis plusieurs années déjà. Surtout, le collectif anticipe « un renchérissement de 8 % à 10 % du prix des matériaux de construction, insupportable pour les maîtres d'ouvrage ». Un surcoût dû à la contribution versée à l'éco-organisme chargé de la REP, qui serait répercutée sur le prix des produits.

Ce qui pourrait les aider à s'en sortir. Le texte laisse la possibilité aux producteurs d'organiser par eux-mêmes la collecte séparée de leurs déchets, leur reprise sans frais et leur gestion. Les producteurs déduiraient alors ces actions de leurs contributions financières versées à l'éco-organisme.

Par ailleurs, dans son article 54, la loi facilite la sortie du statut de déchet des matériaux, équipements ou produits issus de chantiers de réhabilitation ou de démolition. Si un opérateur compétent effectue un tri et un contrôle de ces matériaux et qu'ils peuvent être réemployés, alors ces derniers ne prennent pas le statut de déchets. Et en l'absence de ce statut, il n'existe pas d'obligation de passer par la REP…

Enfin, la filière ne désespère pas de faire évoluer le texte dans son sens : « des discussions seraient possibles » dans le cadre du travail sur les futurs décrets d'application de la disposition, estiment « les quatorze ».

L'Ademe en organe de surveillance (article 76)

Ce que dit le texte. « L'agence assure le suivi et l'observation des filières à responsabilité élargie du producteur. Les coûts supportés par l'agence pour assurer [sa] mission sont couverts par une redevance versée par les producteurs ou leur éco-organisme, dont le montant est fixé par décret. »

La position des professionnels. Ils souhaitent être « co-acteurs » de l'étude de préfiguration de la filière REP, qui doit débuter en mars et être achevée en fin d'année. Le ministère de la Transition écologique l'a confiée à l'Ademe, et s'appuiera sur ses résultats pour finaliser le dispositif.

Le rôle de l'Ademe. A l'issue de l'étude de préfiguration, l'Ademe remettra sa copie au ministère le 1er janvier 2021. Celui-ci rédigera un cahier des charges au premier trimestre 2021, sur la base de ces travaux, et lancera un appel d'offres à l'été, au terme duquel il sélectionnera le ou les éco-organismes qui géreront la filière REP. Et, « au 1er janvier 2022, les entreprises du secteur de la construction devront avoir signé un contrat d'adhésion avec cet éco-organisme pour ne pas être en défaut vis-à-vis de la loi », prévient Jean-Christophe Pouet, chef du service mobilisation et valorisation des déchets à l'Ademe.

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