Le choix de la ville verticale toujours sujet à controverse

La grande hauteur alimente le débat. Dans quelles mesures les tours peuvent-elles être écologiquement vertueuses et répondre aux besoins de densification urbaine ?

Réservé aux abonnés
Image d'illustration de l'article
PHOTO - _MG_8775.eps

Françoise-Hélène Jourda, architecte « L'empreinte écologique des tours est désastreuse »

Au-delà de 100 m, une tour n'est pas durable. Il suffit d'en mesurer l'empreinte écologique pour le vérifier. Au plan énergétique, aucune ne descend en dessous de 180 kWh ep/m2.an, à comparer avec l'objectif de 50 kWh ep/m2.an. Et les tours existantes consomment entre 500 et 1 000 kWhep/m2.an ! Passé cinq niveaux, même en couvrant le toit de panneaux photovoltaïques, on ne sait pas construire un immeuble à énergie zéro. Et la norme Bepos (bâtiment à énergie positive) sera applicable en 2020 ! Par ailleurs, les matériaux utilisés (béton, acier, verre) incorporent un maximum d'énergie grise. De plus, pour 1 m2 habitable, il faut construire 1,40 m2 (contre 1,10 m2 si on «couchait» la tour), en raison des épais noyaux de circulations verticales. Le faible impact sur le sol et le sous-sol se vérifie seulement si on ne touche pas à la nappe et que l'on ne construit pas de parkings. Quant à densifier. Si on éloigne les tours les unes des autres, on ne densifie pas ! Financièrement, une tour est 2 à 3 fois plus chère? au m2 qu'un immeuble classique. Elle est réservée de fait aux classes supérieures et aux sièges d'entreprises. On n'y construira jamais de logements sociaux ! Où est alors la mixité sociale ? La mixité fonctionnelle ?. La ville verticale est une idée généreuse mais irréaliste. Le filtrage de sécurité interdit d'en faire un quartier de ville, avec ses espaces publics libres d'accès.

Philippe Gazeau, architecte « La grande hauteur répond aux besoins en logements et en densité de la ville durable »

La métropole ne doit pas devenir mégalopole. La grande hauteur, par l'occupation ponctuelle et dense du territoire, permet de réaliser des clusters d'activité qui limitent le recours à l'automobile. Elle permet aussi de réaliser les logements qui manquent dans la capitale, là où l'espace est le plus rare. Mais où situer la grande hauteur ? Au-dessus de 37 m à Paris ? Des tours de logements atteignent facilement 50 m sans être classé IGH (28 m pour les bureaux). De tels édifices s'inscrivent en ville à condition d'en travailler la silhouette en finesse. La grande hauteur revalorise et revivifie des quartiers entiers, à l'image de l'ex-tour Franklin à Montreuil. Ce sont des catalyseurs qui obligent à imaginer de nouvelles typologies architecturales et urbaines, à inventer la mixité programmatique, à tester la flexibilité, etc. À condition de réfléchir sur l'intrication étroite des programmes, de mettre à plat les relations fonctionnelles. Panacher des logements avec de petites unités tertiaires est déjà ce que nous propose la ville haussmannienne ! Enfin, il n'y a aucune impossibilité technique, pour une tour de 50 m, à être BBC. La grande hauteur est affaire de volonté politique. Mieux vaut refondre des réglementations absurdes que de continuer à étaler la ville sans limites.

Image d'illustration de l'article
PHOTO - _MG_8775.eps PHOTO - _MG_8775.eps

Image d'illustration de l'article
PHOTO - BAT debat 2.eps PHOTO - BAT debat 2.eps

Image d'illustration de l'article
PHOTO - TOUR Grande 2.eps PHOTO - TOUR Grande 2.eps
Newsletter Week-End
Nos journalistes sélectionnent pour vous les articles essentiels de votre secteur.
Construction et talents
Les services Le Moniteur
La solution en ligne pour bien construire !
L'expertise juridique des Éditions du Moniteur
Trouvez des fournisseurs du BTP !
Détectez vos opportunités d’affaires