Marchés publics : le référentiel d’archivage enfin publié

Un guide du Service interministériel des archives de France détermine les règles et durées de conservation des documents issus de la passation et de l'exécution des marchés publics. Ce socle commun à toute la sphère publique doit faciliter à terme la dématérialisation des archives. A d'ailleurs paru, dans le même temps, un Guide pour l'archivage numérique de la commande publique.

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Un guide du Service interministériel des archives de France détermine les règles et durées de conservation des documents issus de la passation et de l'exécution des marchés publics.

C’était l’action 19 du Plan de transformation numérique de la commande publique 2017-2022 (PTNCP), et elle devait être effective en 2018-2019 : la mise en place d’un « archivage sûr » prend plus de temps que prévu. Mais enfin, début 2021, le référentiel de conservation attendu a été publié. Ce guide s’intitule « Cycle de vie des documents issus des marchés publics » et a été élaboré par le Service interministériel des archives de France (Siaf) avec le soutien de la Direction des affaires juridiques (DAJ) de Bercy.

Selon le PTNCP, il était en effet indispensable, pour une dématérialisation de bout en bout des marchés publics, de « définir les modalités d’un archivage électronique sûr et accessible ». D’autant plus, insistait le plan, qu’en vertu de l’article R. 2143-14 du Code de la commande publique, « l’entreprise n’est plus tenue de fournir les documents justificatifs et les moyens de preuve qui ont déjà été transmis au service acheteur concerné lors d’une précédente procédure et qui demeurent valables ».

Socle commun

Le présent guide devra être décliné, d’une part par les ministères des Armées, de l’Europe et des Affaires étrangères, de l’Economie et des Finances pour leurs propres archives ; et d’autre part, par le ministère de la Culture pour les archives du reste de la sphère publique. Il constitue ainsi un socle commun, pour toutes les personnes concernées (acheteurs, archivistes…), de préconisations concernant la sélection et la conservation des documents produits et reçus dans le cadre de marchés publics, qu’ils soient sous la forme papier ou la forme électronique.

A cet égard, le guide souligne d’ailleurs que, le plus souvent, les dossiers pour un même marché seront hybrides - mi-papier, mi-démat'. Et si le document parle finalement fort peu d'électronique, "il permettra d’anticiper les incidences de la dématérialisation notamment en termes de fiabilité et de pérennité dans le cadre de la mise en œuvre d’un processus de versement dans un ou plusieurs systèmes d’archivage électronique", indique la DAJ. Laquelle a contribué à l'écriture, par le Siaf, d'un Guide pour l'archivage numérique de la commande publique publié lui aussi en ce début d'année.

Construire un projet d'archivage numérique
 

Le Guide pour l'archivage numérique de la commande publique vise à fournir aux acheteurs publics les clés et les ressources indispensables pour construire un projet en la matière.
 

Il explique comment élaborer sa stratégie. L’entité doit « délimiter précisément le périmètre du projet qui, s’il doit à terme couvrir l’intégralité du processus de la commande publique, peut se déployer progressivement sur chacune des phases de ce dernier ». Puis définir sur cette base « le type de solution logicielle retenue ou la façon dont plusieurs solutions logicielles peuvent être combinées au service du projet », et « identifier les métadonnées qu’il est nécessaire de collecter et de conserver ».
 

Le guide éclaircit « les notions qu’il est indispensable de maîtriser (et notamment les notions de métadonnées, de profil d’archivage, de plan de classement, de référentiel, de convention de nommage), en rappelant le contenu et la portée du standard d’échange de données pour l’archivage (SEDA), en fournissant des critères sur lesquels l’identification des métadonnées utiles peut s’appuyer et en livrant la liste des métadonnées à considérer en priorité ».

 

Le droit administratif conçoit la vie des documents en deux temps. Tout d’abord, une étape de conservation des documents (« durée d’utilité administrative » [DUA]), variable selon les pièces, et dont le déclenchement est la date de notification du marché, la date de la décision d’infructuosité ou la date de fin de l’exécution financière du contrat. Au terme de cette durée d’utilité, le « sort final » des documents est décidé : élimination, ou conservation définitive par le service public d’archives compétent. Et tout cela mérite d'être anticipé.

Durée d'utilité administrative

La définition des différentes DUA est bien entendu au cœur du guide (point 2). Les règles générales applicables aux marchés publics sont simples, avec une DUA de 5 ans à compter de la notification pour les pièces relatives à la procédure de passation, et de 10 ans à partir du paiement du solde pour celles relatives à la procédure d’exécution.

Mais une myriade de règles particulières se greffe ensuite sur ces délais de principe, par exemple lorsque le marché concerné est cofinancé sur des fonds structurels européens. Certaines hypothèses sont laissées à l’appréciation de l’acheteur. Ainsi le guide invite à allonger au cas par cas la durée de conservation lorsque le marché comporte une exposition particulière à un risque pénal (favoritisme, faux en écriture publique…), la prescription en matière pénale allant jusqu’à 20 ans pour les crimes à partir de la date de l’infraction.

Surtout, « une attention particulière doit être portée aux marchés publics de travaux ». Il peut être pertinent de conserver les documents pendant toute la durée de vie du bâtiment lorsqu’ils concernent des travaux d’ampleur. De plus, là encore en fonction d’une évaluation in concreto, les marchés portant sur des travaux susceptibles d’engendrer des dommages à l’environnement (dont la réparation se prescrit par dix ans après que la victime a connu ou aurait dû connaître la manifestation du dommage) ou à la santé (amiante…) peuvent justifier une conservation allongée de leurs pièces.

Enfin, les marchés comportant une transmission de droits de propriété intellectuelle devront le plus souvent faire l’objet d’une conservation longue (jusqu'à 140 ans pour les droits d'auteur !), fonction de la durée de protection de ces droits.

Sort final

Reste, à la fin de cette période de conservation, à décider du sort final des pièces de marchés, pour en faire – ou pas – des pièces de collection… Les documents ont en principe vocation à être éliminés, mais uniquement sur autorisation de la personne en charge du contrôle scientifique et technique sur les archives publiques.

Mais ils peuvent aussi être conservés définitivement « à des fins historiques, mémorielles et patrimoniales », explique le guide (point 3). Deux motivations à cela. Il s’agira soit de « documenter le processus des marchés publics tel qu’exercé par l’institution ou la collectivité en conservant les documents les mieux à même d’en rendre compte » (tels que les PV de la commission d’ouverture des plis). Soit, de « conserver la trace de marchés dont l’objet représente un intérêt particulier pour l’histoire ou l’identité de la collectivité ou de l’institution ». Le guide préconise dans ce second cas une sélection qualitative des dossiers (entendus comme l’ensemble des pièces d’un marché).

Afin de simplifier la tâche des agents concernés, l’annexe 2 résume tout cela en fournissant un référentiel de conservation sous forme de tableau. Pour chaque type de pièce, sont indiqués la DUA et sa date de démarrage, le sort final, les textes de référence et des observations.

"Cycle de vie des documents issus des marchés publics - Référentiel de conservation" - Janvier 2021

Guide pour l'archivage numérique de la commande publique - Janvier 2021

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