Marseille : et au milieu du parc des Aygalades coule le ruisseau

Faire pousser en 2031 un parc urbain sur les rives du ruisseau des Aygalades, rayé du paysage depuis des décennies. Tel est le défi lancé par l'établissement public d'aménagement Euroméditerranée (Euromed) au groupement conduit par l'agence Michel Desvigne Paysagiste (MDP), attributaire en décembre dernier de l'accord-cadre de maîtrise d'œuvre. La future coulée verte de 16 ha sera créée sur la gare de triage du Canet occupant 25 ha, au sein de l'opération d'intérêt national (OIN) Euroméditerranée, à l'orée des quartiers nord de Marseille (Bouches-du-Rhône).

Le projet est la traduction du plan-guide de l'extension qui, en 2007, ajoutait 170 ha au périmètre initial de 310 ha de l'OIN. Elaboré par l'agence Leclercq et associés, il avait posé comme principe de réintroduire la nature dans ces secteurs très urbanisés, ainsi que de remettre en scène les cours d'eau, enfouis et canalisés au gré du développement de l'activité portuaire depuis le XIXe siècle.

En comptant les 200 m du ruisseau des Aygalades mis à découvert dans le cadre de l'aménagement des 4 ha du parc Bougainville (conception : D'ici là), et les 600 m de son affluent le ruisseau des Lions, respectivement situés au sud et au nord-est de la zone du projet, plus de 2 km de cours d'eau seront remis à ciel ouvert pour être renaturés. « La finalité est d'offrir de nouvelles aménités aux habitants, de relier des quartiers aujourd'hui barrés par le faisceau ferroviaire, de créer un îlot de fraîcheur et une réserve de biodiversité, mais surtout de réduire le risque inondations », rappelle Anaïs Cadier, directrice générale opérationnelle au sein d'Euromed et maître d'ouvrage.

Le plan de prévention du risque inondation (PPRI), arrêté en 2019, a classé en zone rouge l'emprise de la gare de triage du Canet. « Ouvrage de régulation hydraulique, le parc servira à maîtriser la crue centennale. Ensuite, l'Etat pourra envisager de réviser le règlement du PPRI et d'ouvrir à l'urbanisation des quartiers périphériques aujourd'hui touchés par l'aléa », précise Mathieu Sebire, directeur adjoint technique à l'établissement public d'aménagement et de gestion des eaux Huveaune-Côtiers-Aygalades (Epage Huca), partie prenante du projet de parc inondable. Ce dernier constitue la première étape d'une opération à plus grande échelle visant la restauration écologique et l'amélioration du fonctionnement des Aygalades en remontant jusqu'à sa source dans le massif de l'Etoile.

Nouveau lit de rivière. Choisi au terme d'un dialogue compétitif d'un an, le groupement de maîtrise d'œuvre s'appuie, en termes de modelé de terrain et de fonctionnement hydraulique, sur l'étude de faisabilité de l'agence Leclercq et associés, ainsi que sur la modélisation hydraulique réalisée par Setec-Hydratec. A partir de ces données, MDP a proposé des solutions basées sur la nature tel l'aménagement de trois zones d'expansion des crues dans la partie est du parc. « Formant des dépressions, celles-ci auront pour fonction de collecter les eaux de débordement qui, après la crue, seront réinjectées dans le canal existant où transitera la majorité des flux des Aygalades », précise Sébastien Brisson, chef de projet chez Egis. Un nouveau lit de rivière, issu d'une dérivation de 2 m3 /seconde, sera créé en parallèle de l'actuel canalisé. Légèrement sinueux, il s'écoulera au sein d'un talweg terrassé en déblai, avec des berges aménagées au plus près d'une configuration naturelle.

Avant de lancer les aménagements hydrauliques fin 2027, date butoir pour bénéficier des financements de l'Etat au titre du programme d'action de prévention des inondations (Papi), deux années d'études sont prévues. Elles auront pour objectif de limiter les évacuations et les apports de matériaux, et aussi d'identifier les éléments à réemployer de l'ancienne gare que la SNCF laisse en l'état.