Vous venez de préciser votre feuille de route pour 2026. Quels sont vos objectifs ?
Notre plan stratégique porte de nouvelles ambitions pour accompagner la construction sur le sujet de la transition écologique, qui se fait de plus en plus prégnant. L’enjeu est de nous positionner comme un acteur fort pour convaincre les jeunes du rôle essentiel que le secteur est appelé à jouer dans ce cadre. Nous avons récemment fait évoluer notre plateforme de marque et notre identité visuelle, afin d’incarner notre mission de former une nouvelle génération de professionnels pour bâtir les infrastructures et la ville de demain, et notre vision d’un monde ouvert, numérique, décarboné et durable.
Afin d’intégrer les problématiques liées aux mutations climatiques, nous allons continuer à faire évoluer et élargir notre offre de formation, mais aussi à intensifier nos activités de recherche pour soutenir l’innovation. Renforcer notre ouverture à l’international constitue un autre axe majeur de notre feuille de route.
Quelles sont vos nouveautés en matière de cursus ?
Nous avons tout d’abord fait fusionner les quatre spécialités historiques de l’école -bâtiment, TP, génie mécanique et électrique et topographie- au profit d’un nouveau programme Grande école d’ingénieur plus généraliste, qui marque aussi un élargissement au génie urbain, une ouverture sur le domaine de l’énergie et un renforcement des sujets numériques.
Nous avons par ailleurs ouvert cette année un mastère spécialisé « Responsable bas carbone de projets de construction », bâti avec l'Ecole supérieure du bois de Nantes. Et nous accueillerons, en février prochain, la première promotion du mastère spécialisé « Maîtrise d'œuvre en travaux de génie écologique », conçu en partenariat avec AgroParisTech et plusieurs entreprises, comme Vinci Construction et Egis, ainsi qu’avec l'Union professionnelle du génie écologique (UPGE).
Comment appréhendez-vous la conjoncture économique, et notamment la crise du logement neuf ?
Le retournement du marché va induire des conséquences sur nos programmes : nous allons devoir former davantage sur les sujets de réhabilitation et de rénovation. Des thèmes sur lesquels nous travaillons actuellement avec EGF.BTP dans la perspective de faire évoluer nos enseignements. Nous avons aussi identifié dans ce cadre deux autres thèmes de premier plan dans le domaine du bâtiment : l’industrialisation et les matériaux biosourcés.
Vous venez d’inaugurer un nouveau campus à Orléans (Loiret). Dans quel contexte s’inscrit cette ouverture ?
Cette implantation s’insère dans un projet urbain impulsé par un appel à manifestation d’intérêt (AMI) de la métropole d’Orléans, qui souhaitait voir émerger en cœur de ville un pôle d’excellence d’enseignement supérieur. Une première promotion de 32 étudiants a fait sa rentrée en cursus ingénieur sur le site historique réhabilité de l’ancien hôpital Porte Madeleine. Ils le partageront avec les élèves de la Faculté de droit, économie et gestion de l’université d’Orléans, ce qui permet d’imaginer, à moyen terme, la création de doubles parcours entre nos deux établissements.
Après Troyes (Aube) en 2017 et Dijon (Côte-d'Or) en 2019, ce nouvel élargissement de notre maillage, au plus près des besoins des territoires, répond aussi à ceux des employeurs locaux de pouvoir recruter sur place des professionnels qualifiés. A Orléans, nous proposerons à partir de 2025 un bachelor technologique de conducteur de travaux. Nous avons pour objectif d’accueillir sur ce campus quelque 400 élèves à l’horizon 2031.
Quelles sont vos ambitions à l’international ?
Nous comptons actuellement 25 % d’étudiants internationaux dans nos effectifs : le but est de passer progressivement à 30 %. Cette volonté de croissance répond à un besoin lié au positionnement de nos entreprises, le BTP faisant figure de secteur d’excellence à l’international. Avec aujourd’hui 97 écoles et universités partenaires à l’étranger, l’idée est donc d’attirer davantage d’élèves en nouant des partenariats plus forts. Nous avons identifié des zones prioritaires, parmi lesquelles l’Europe de l’Est, le Liban ou encore le Vietnam. Nous travaillons aussi beaucoup en Afrique subsaharienne, en particulier en Côte-d’Ivoire, au Cameroun, ainsi qu’au Sénégal et au Gabon, où nous organisons notamment des concours décentralisés à destination des étudiants.
Quelle est votre actualité en matière de recherche ?
Dans le sillage de la création du mastère spécialisé que nous lancerons début 2024, nous venons de signer, avec AgroParistech et en partenariat avec l’UPGE, Vinci Construction ainsi que le groupe Eiffage, une nouvelle chaire d’enseignement et de recherche dédiée au génie civil écologique. Cette démarche vise, grâce à une montée en compétences des acteurs, à faciliter l’intégration de la biodiversité et de l’environnement naturel dans les projets de construction et d’aménagement. Les avancées réalisées en matière de connaissances scientifiques et techniques permettront également de nourrir les enseignements délivrés à l’école sur ce sujet.
Nous avons d’autre part repositionné nos autres projets de recherche autour de la construction décarbonée. Ils portent, entre autres, sur les matériaux (bétons bas carbone, réemploi de matériaux, matériaux bio sourcés…,) et le jumeau numérique, ainsi que la performance de l’enveloppe du bâtiment et le smart grid.
Où en êtes-vous en matière de féminisation ?
L’école compte 30 % d’étudiantes au sein de ses effectifs, contre 28 % pour la moyenne française des classes préparatoires et écoles d’ingénieurs -toutes spécialités confondues. Proposer des doubles cursus comme celui d’ingénieur- architecte, auquel sont inscrites 60 % de jeunes filles à l’ESTP, apparaît comme un vecteur pour attirer davantage d’étudiantes. Nous lançons par ailleurs cette année avec la FNTP la session pilote d’un programme de mentorat auprès d’une dizaine d’étudiantes. L’idée ? Permettre à des élèves de troisième année d’échanger une à deux fois par mois avec un grand patron du bureau de la fédération autour de questions liées au premier emploi, l’orientation de la carrière ou encore l’international.
La décarbonation actuellement en marche au sein du secteur devrait aussi concourir à attirer plus de jeunes filles. Prenons l’exemple de la spécialité en génie urbain : cette mixité dans les métiers de l’ingénierie s’impose si l’on veut que les professionnels puissent imaginer et construire des lieux à l’image de celles et ceux qui vont les habiter.