Interview

"Nous devrons dialoguer davantage avec les opérateurs économiques", Charlotte Gagné, CA de Bastia

Depuis maintenant plus d'un mois, la France est entrée en confinement. La Corse est l'un des territoires les plus touchés par cette crise et l'impact sur le tissu économique est encore incertain. Charlotte Gagné, cheffe du service affaires juridiques et achats publics de la communauté d'agglomération de Bastia témoigne.

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Charllote Gagné
Selon Charlotte Gagné, les acheteurs publics devront revoir leur façon de travailler après la crise.

Quelles mesures d’urgence votre service a-t-il prises pour faire face à la crise ?

Au moment où le confinement a été décidé par le gouvernement [le 17 mars, NDLR], nous avions la chance d’avoir très peu de consultations en cours. Et, comme les délais de réponse étaient suffisamment avancés, nous n’avons pas eu de procédures infructueuses.

Nous avons, par ailleurs, pris la décision de suspendre tous les lancements de nouveaux appels d’offres. En effet, le tissu local, qui représente la majeure partie de nos prestataires, n’est pas en capacité à l’heure actuelle de répondre à nos marchés. Nous préparons donc les futures consultations en amont de manière à les ouvrir dès que les entreprises seront opérationnelles. En ce qui concerne les travaux, nous avons suspendu l’exécution de l'ensemble de nos marchés sur le territoire via des ordres de service après discussion avec les entreprises. Nous avons reporté tous les délais contractuels et fait le choix de n'appliquer aucune pénalité à partir du moment où les difficultés d’exécution sont en lien avec la situation sanitaire.

Le deuxième tour des élections municipales n’a pu avoir lieu du fait de la crise. Quel en a été l’impact pour la communauté d’agglomération de Bastia ?

Pour le moment, notre président est toujours en place, son mandat ayant été reconduit par intérim. Mais prochainement va avoir lieu le renouvellement des conseils municipaux dans quatre communes où les candidats ont été élus dès le premier tour. Il risque donc d’y avoir un président intérimaire en attendant les résultats du deuxième tour pour la Ville de Bastia. A ce moment-là, il devrait y avoir encore un nouveau président, cette fois-ci définitif. Jusqu’ici, les lignes directrices en matière de politique d’achat étaient très claires, c’est moins le cas maintenant.

L’ordonnance du 1er avril 2020 confie de plein droit aux exécutifs locaux, sans qu'une délibération ne soit nécessaire, les attributions que les assemblées délibérantes peuvent habituellement leur déléguer par délibération. Comment avez-vous accueilli cette disposition ?

Cette ordonnance nous a rassurés, car elle signifie que notre président est autorisé par les textes à signer nos documents contractuels tels que les avenants aux marchés. Jusque-là, nous avions un vrai doute ce qui était problématique, car nous avions besoin de prises de décisions. Nous pouvons maintenant travailler plus sereinement avec les titulaires de nos marchés.

Par ailleurs, alors que nous sommes en télétravail, nous nous efforçons de mettre en place un process au niveau du comité de direction afin de garder un semblant de procédure comme c’est le cas quand nous sommes dans nos locaux. Un ordre du jour est arrêté, des rapports relatifs aux décisions sont communiqués afin de garantir la traçabilité des décisions et la transmission de l’information.

Pensez-vous que cette crise va faire évoluer vos pratiques d’achats ?

Il faut savoir que, tous acteurs confondus, le budget relatif aux marchés publics pour la Corse avoisine le milliard d’euros par an. Il est donc important que les entreprises soient en capacité de répondre, qu’elles comprennent les documents de consultation et que nous les accompagnions, d’autant plus que cette crise sanitaire va avoir des répercussions économiques importantes. Nous devrons donc dialoguer davantage avec les opérateurs économiques afin de connaître leur mode de fonctionnement, mais aussi leurs difficultés.

Nous allons aussi devoir revoir notre façon de travailler. Par exemple, concernant le seuil à 40 000 euros [en-dessous duquel il est permis de passer des marchés sans publicité ni mise en concurrence, NDLR], nous ne savions pas quelle attitude adopter. Or, aujourd’hui, il semble indispensable de mettre en concurrence les candidats même sous ce seuil, car il sera délicat de confier un marché à une entreprise en particulier alors que d’autres sur le même secteur sont en difficultés. Il est préférable qu’elles se départagent sur la valeur technique.

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