Au Mipim, avec Linkcity et Crédit agricole immobilier, vous avez présenté « Demi-Lune », lauréat de l'appel à projets urbains innovants (APUI) « Empreintes » lancé par Paris La Défense. Quelles en sont les caractéristiques ?
Parmi les quatre projets lauréats de l'APUI, Demi-Lune est techniquement le plus compliqué mais aussi, potentiellement, le plus porteur de promesses pour l'avenir. Conçu par l'AUC et l'agence XDGA, ce programme mixte de plus de 50 000 m2 à dominante résidentielle incluant des bureaux et des locaux d'enseignement, prendra place derrière le centre commercial des 4 Temps. Il se compose de trois bâtiments implantés autour d'un parc de 5 000 m2 : deux de 50 m de haut chacun et une tour culminant à 110 m qui serait la première en France à respecter le seuil 2025, voire 2028 de la RE 2020.
Cet objectif étant très difficile, voire impossible à atteindre dans l'état actuel de la réglementation, nous avons engagé un travail d'expérimentation avec les services de l'Etat, le CSTB et des bureaux d'études. Il vise à déterminer comment nous pouvons adapter les normes, sans dégrader ni la sécurité incendie, ni l'ambition d'exemplarité environnementale, pour permettre la construction d'immeubles de grande hauteur (IGH) bas carbone. Le projet Demi-Lune a valeur de cas d'école. Si nous parvenons à trouver une solution, elle devra être reproductible. Les travaux devraient démarrer en 2027 pour une livraison en 2031.
Envisagez-vous de lancer un autre appel à projets ?
Aujourd'hui, notre priorité est de mener à bien ces quatre projets de construction neuve à dominante résidentielle et de restructurer ou transformer environ 1 million de m2 de bureaux obsolètes ou en voie d'obsolescence [sur un parc total de 3,7 millions de m2 , NDLR]. Néanmoins, La Défense reste densifiable. Quelques emprises pourraient accueillir de nouveaux programmes, et tout particulièrement l'ancien site des tours Hermitage dans le quartier Saisons, à l'entrée de La Défense, en bord de Seine. Ce projet [de deux tours jumelles de 320 m de haut que portait le promoteur russe Hermitage, NDLR] s'étant administrativement éteint l'année dernière, nous allons pouvoir inventer autre chose sur le terrain d'assiette dont nous détenons toujours les droits à construire.
Nous travaillons actuellement au lancement d'une nouvelle démarche urbaine et immobilière sur ce secteur. Nous devrions être en mesure de présenter les premiers jalons de ce projet, « Rives Défense », avant l'été.
Les propriétaires des bureaux obsolètes sont-ils prêts à les transformer en un autre usage ?
L'une des difficultés auxquelles nous nous heurtons est celle de l'ajustement des valeurs. La plupart des propriétaires n'ont pas encore suffisamment acté la dépréciation de leurs biens.
A La Défense, un immeuble obsolète et vide vaut environ 1 000 euros/m2 , parfois même moins, mais il peut encore être valorisé cinq à dix fois plus dans leurs comptes. Il faut faire preuve de conviction et laisser du temps au temps pour que les investisseurs concernés intègrent cette nouvelle donne.
Cela étant, trois opérations de transformation d'immeubles tertiaires en hôtels ou résidences étudiantes et/ou pour jeunes actifs ont déjà été livrées et d'autres projets sont à l'étude.
Comment accélérer la phase d'ajustement des valeurs ?
A l'été 2024, André Yché [ancien président du directoire de CDC Habitat, NDLR] avait proposé de taxer la vacance.
Peu avant, des idées avaient commencé à circuler pour favoriser ces reconversions à travers des incitations fiscales ou réglementaires, des propositions restées en suspens.
De notre côté, nous avons lancé des réflexions avec les services de l'Etat, les investisseurs, les architectes… sur les évolutions réglementaires qui faciliteraient les transformations de bureaux en logements dans le quartier d'affaires. Elles y sont en effet techniquement plus complexes qu'ailleurs en raison de l'urbanisme sur dalle, de la hauteur et de l'âge des bâtiments.
Ce travail pourrait aboutir d'ici la fin de l'année, comme l'ont annoncé le 5 mars Georges Siffredi, président de Paris La Défense, et Alexandre Brugère, le préfet des Hauts-de-Seine.