Bâtir une ville durable ne saurait se résumer à réaliser des écoquartiers. La ville durable ne peut se concevoir à la seule échelle de la ville centre car la ville contemporaine dépasse les limites de la ville agglomérée. Elle s'inscrit dans un territoire plus large, le bassin de vie, qui englobe les villes périurbaines et les communes rurales situées dans sa sphère d'attraction. Malgré la volonté constante des pouvoirs publics de contrôler et d'organiser de façon cohérente le développement des villes, l'étalement urbain ne cesse de s'amplifier. On estime, au début de la décennie 2010, que le seuil de 20 000 communes périurbaines est atteint, accueillant plus de 15 millions d'habitants.
Urbanisme malthusien
La maison individuelle est souvent décriée comme étant la cause principale de cet étalement urbain. En réalité, le moteur de l'étalement urbain réside dans un urbanisme malthusien. Les terrains non bâtis à proximité des agglomérations existent, mais ils sont peu urbanisables, voire gelés à l'urbanisation. Dans les premières couronnes périurbaines, les extensions urbaines sont extrêmement restreintes et plus de 80 % des terres restent occupées par l'agriculture et les espaces naturels. Entre 1990 et 1999, lors de la dernière période intercensitaire, à peine plus de 2 % des communes périurbaines ont été intégrées à un pôle urbain. La ville ne se fait plus par extension naturelle sur ses périphéries immédiates, mais de manière émiettée, fragmentée, diffuse sur le territoire. L'habitat se disperse de manière désorganisée. Ceux qui cherchent à se loger en maison individuelle sont de fait repoussés sur des petites communes de plus en plus éloignées des centres urbains. En 2007, le Snal dénonçait déjà dans son « Livre blanc du foncier » la rareté des zones effectivement ouvertes à l'urbanisation et le malthusianisme des documents d'urbanisme. La situation n'a fait que s'aggraver depuis, et avec elle l'étalement urbain, faute de véritable programmation urbaine. Ainsi, la part de maisons individuelles construites sur des opérations d'aménagement (lotissement ou ZAC) est passée de 50 % en 2000 à 29 % en 2008, au profit de la construction sur des terrains diffus isolés. C'est moins la périurbanisation qui est préoccupante que son inorganisation, ses conséquences environnementales, sociales et économiques.
La ville durable nécessite de mieux programmer les extensions urbaines, de relancer l'urbanisme opérationnel et d'ouvrir l'espace aux opérations d'aménagement. Nous souhaitons que la loi « Grenelle 2 », dont l'approbation doit intervenir dans quelques mois, réforme en profondeur la manière dont est pensé l'urbanisme dans nos territoires en consacrant le principe de la programmation urbaine, notamment en intégrant les plans locaux d'habitat dans les plans locaux d'urbanisme, et en revisitant le niveau de gouvernance et la répartition des compétences entre les collectivités territoriales.
Notre pays a besoin de logements, mais pour bâtir une ville durable ces logements doivent répondre aux aspirations de nos concitoyens et ne pas se faire n'importe où, n'importe comment. Il est urgent de relancer l'urbanisme opérationnel et de privilégier les zones d'aménagement d'ensemble, planifiées en concertation avec les collectivités locales, c'est-à-dire les ZAC et les lotissements. Il faut également travailler à la reconnaissance du lotissement, devenu depuis la réforme de 2007, permis d'aménager. Bien qu'on continue de lui adjoindre une image déplorable, le lotissement est une véritable procédure d'aménagement, parfaitement adaptée aux exigences de densification, d'intégration, de mixité et aux exigences environnementales des collectivités de toutes tailles. Pour faire connaître des opérations remarquables, nous lancerons le 15 juin prochain à Reims les Trophées de l'Aménagement.
Guide méthodologique
Notre métier est au cœur du développement durable. Tout aménagement du territoire a une portée sur le très long terme. On détruit des bâtiments, mais on ne détruit pas des routes et on requalifie difficilement l'espace public. Conscients de nos responsabilités, nous avons en 2003 adopté une charte éthique. Dès 2004, nous avons travaillé avec l'association HQE à l'écriture d'un guide méthodologique « HQE Aménagement » auquel de nombreuses organisations professionnelles ont participé. Ce guide constitue un référentiel pour l'élaboration d'un écoquartier dans le cadre d'une opération de lotissement ou de ZAC. L'association HQE le présentera lors d'un colloque organisé le 30 mars prochain, auquel le Snal se réjouit de participer. La réalisation d'écoquartiers ne prendra tout son sens que lorsque l'ensemble des collectivités locales se saisiront du sujet et que ces écoquartiers, fondés sur un projet urbain partenarial, pourront se faire avec l'adhésion de leurs futurs habitants. -
