«Pour la LGV Bordeaux-Toulouse, ne nous engageons pas dans un PPP très coûteux», Carole Delga, présidente de Languedoc-Rousillon-Midi-Pyrenées

Lors du débat d’orientations budgétaires, le 15 avril à Montpellier, la présidente de la région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, Carole Delga, a présenté aux 158 conseillers régionaux les principes de la nouvelle commande publique qu’elle souhaite mettre en place. L’élue socialiste fait un tour d’horizon des enjeux dans la grande région.

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Carole Delga, présidente de la région Languedoc-Roussillon/Midi-Pyrénées.

Vous avez annoncé un «plan Marshall» de 800 millions d’euros en faveur du BTP. Pourquoi avoir ciblé ce secteur ?

Carole Delga: Le BTP a perdu un quart de ses effectifs en sept ans. Il faut une action forte pour recréer des emplois, d’autant plus qu’il s’agit d’emplois non délocalisables et répartis sur l’ensemble du territoire. Cela permet aussi d’équiper la région. Rappelons qu’elle connaît la plus forte croissance démographique en France. Nous gagnons 50 000 nouveaux habitants par an, soit l’équivalent de la population de communes comme Albi ou Narbonne.

Les deux régions, pour le BTP, c’était 600 millions d’euros à peu près. Au prochain budget primitif en mai, nous allons voter 800 millions. Ca sera aussi 200 millions que nous allons dépenser cette année. A la fin de l’année, au compte administratif, apparaîtront plus de 800 millions d’euros pour le BTP.

Quelles opérations n’auraient pas été lancées sans le «plan Marshall» ?

C. D.: Nous allons pouvoir amplifier notre soutien aux programmes d’équipement en très haut débit et accentuer notre politique de rénovation énergétique. Nous venons, en outre, de voter la construction de cinq nouveaux lycées, à Nîmes-Ouest, à Montpellier-Ouest, dans le cœur d’Hérault, au nord de Toulouse et en Volvestre-Comminge. Les études vont démarrer dès cette année pour des ouvertures en 2019 ou 2020. J’ai également demandé à mes services de recenser les projets qui avaient fait l’objet de décisions mais qui n’avaient pas encore été lancés, comme la restructuration du lycée Joffre à Montpellier, la construction du CEA Tech à Labège ou la réhabilitation du lycée Peytavin à Mende. Les marchés sont lancés ou sont sur le point de l’être.

Vous souhaitez réformer la commande publique régionale. Dans quel but ?

C. D.: Je suis très attachée à ce que nos investissements soient répartis dans tous les départements et accessibles aux petites entreprises. Nous allons mettre en place un système de pré-information qui permettra aux entreprises de connaître six mois à l’avance les marchés en préparation. Nous allons aussi mettre en ligne un logiciel simplifié d’accès aux marchés, avec un didacticiel. Nous introduirons également dans nos marchés des critères pour prendre en compte l’innovation, sociale, mais aussi dans les matériaux et les modes de construction.

Quelles dispositions comptez-vous prendre pour lutter contre la concurrence déloyale ?

C. D.: Dès qu’un chantier sous maîtrise d’ouvrage régionale sera lancé, je saisirai l’inspection du travail pour demander des contrôles. Nous allons limiter à deux ou trois les niveaux de sous-traitance. Nous signerons en septembre des conventions dans ce sens avec les organisations professionnelles.

Quelles mesures entendez-vous prendre pour favoriser l’apprentissage ?

C. D.: Nous allons accorder des aides aux entreprises qui accueilleront des apprentis et des stagiaires. Nous prévoyons d’accueillir 8 000 apprentis supplémentaires à l’horizon 2021.

Vous annoncez un contrat de filière BTP. En quoi se distinguera-t-il du contrat signé fin 2015 par l’ex-région Languedoc-Roussillon avec la FFB et la Capeb ?

C. D.: Nous allons étendre ce contrat à l’ensemble de la région et au secteur des TP. Nous allons également l’enrichir, notamment pour favoriser les transferts de technologies et promouvoir les filières innovantes.

Vous lancez, le 21 avril, les états généraux du rail et de la mobilité. S’agit-il d’un gage donné aux écologistes ?

C. D.: Non, il y a un vrai enjeu. Notre région est la seule en France à connaître une augmentation du nombre des usagers des trains au quotidien. Ils sont passés de 13 à 21 millions par an entre 2002 et 2014. Avec ces états généraux, nous voulons écouter les usagers et faire connaître aux non-usagers les ressources existantes en matière de mobilité et de transport collectif.

N’est-il pas contradictoire de vouloir une relance du BTP et de laisser planer le doute sur la réalisation de la gare TGV de Montpellier ?

C. D.: Quand je dépense de l’argent, je le dépense utile. La SNCF ne peut pas me dire aujourd’hui combien de TGV passeront par la gare de la Mogère, ni me garantir qu’il y aura des sillons supplémentaires entre Montpellier et Sète. Elle s’était pourtant engagée contractuellement à augmenter de 30 % les trains du quotidien aux heures de pointe sur cet axe. Donc, je suspends les paiements. Je n’investis dans une gare nouvelle que si des TGV s’y arrêtent.

Le groupement Icade/Fondeville a livré, le 5 avril, la dalle-pont qui constitue une part importante de cette nouvelle gare. Peut-on encore stopper ce chantier ?

C. D.: Je le répète. Je ne financerai cette gare que si elle a une utilité. Je l’ai écrit au préfet et à Guillaume Pepy, P-DG de la SNCF. A eux de m’apporter des réponses.

N’est-ce pas un mauvais signal donné pour la poursuite du projet de ligne nouvelle Montpellier-Perpignan ?

C. D.: Cela n’a rien à voir ! Je me permets de rappeler que j’ai été élue le 4 janvier et que, fin janvier, Alain Vidalies, secrétaire d’Etat en charge des transports, annonçait le tracé de la ligne nouvelle Montpellier-Perpignan. Je l’avais rencontré dès mon élection pour lui demander d’accélérer ce dossier. L’enquête publique aura lieu à l’automne.

Le gouvernement a renvoyé la réalisation de cette ligne au-delà de 2030. Pensez-vous pouvoir raccourcir ce délai ?

C. D.: 2030 c’est très loin. Si l’on fait l’enquête publique en 2016, on peut espérer une mise en service à l’horizon 2025.

Vous êtes hostile au PPP pour la réalisation de la LGV Bordeaux-Toulouse. Comment la financer ?

C. D.: J’ai demandé au président de la République de mettre en place un comité de financement. Cette ligne sera rentable. Donc ne nous engageons pas dans un partenariat public-privé qui fera supporter des coûts très élevés aux collectivités locales. Outre la participation de l’Etat, nous pouvons obtenir des crédits européens. Et puis les collectivités s’impliqueront, parce que les élus sont conscients qu’en matière d’attractivité du territoire, cette ligne est indispensable. En 2017, Bordeaux sera à 2 heures de Paris et Toulouse à 4h20. Ce n’est pas suffisant pour la quatrième ville de France !

La grande région Languedoc-Roussillon/Midi-Pyrénées compte deux métropoles, Montpellier et Toulouse. Comment améliorer la liaison ?

C. D.: Nous y travaillons avec le préfet. Nous allons inscrire les études pour la modernisation de cette ligne dans le contrat de plan Etat-région (CPER) à la faveur de sa révision, en septembre. Le nombre de trains va être augmenté. Il faut ensuite adapter la grille horaire aux trajets professionnels et diminuer le temps de parcours. Cette durée est aujourd’hui de 2h10. Nous devons descendre en dessous d’1h30.

Quel grand projet d’équipement peut donner un sens à la nouvelle région ?

C. D.: Le canal du Midi. C’est la voie royale qui nous relie. Nous travaillons avec l’Etat sur la création d’un groupement d’intérêt public pour avoir une unité d’action sur ce patrimoine exceptionnel. Nous allons engager un projet de valorisation qui sera inscrit dans le contrat de plan Etat-région. C’est un projet de plusieurs dizaines de millions d’euros qui porte, notamment, sur la réfection des bâtiments limitrophes et le renforcement des berges.

Quels grands projets aimeriez-vous financer à Montpellier et à Toulouse ?

C. D.: Je souhaiterais financer dans ces deux villes une cité des start-up, c’est-à-dire un campus qui réunirait, sur un même lieu, des incubateurs, des accompagnateurs et des financeurs.

Vous avez affiché votre ambition de faire de cette région la première région à énergie positive en France. Comment ce projet va-t-il se concrétiser ?

C. D.: Il s’agit de diminuer nos consommations énergétiques et de développer les énergies renouvelables. Nous allons généraliser le dispositif de l’éco-chèque, pour aider les particuliers à financer des travaux. Nous subventionnons également la rénovation des bâtiments publics engagée par les communes et les intercommunalités. Enfin, tous les nouveaux lycées seront désormais des bâtiments à énergie positive. Cette année nous consacrerons au moins 30 millions d’euros à cet objectif.

L’ex-région Midi-Pyrénées est la moins endettée de France

Bonne gestion financière, insuffisance de la fonction achat et une gestion des ressources «perfectible» sont les trois points retenus par la chambre régionale des comptes (CRC) de Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées qui a rendu public, le 14 avril dernier, son dernier rapport d’observations définitives sur la gestion de l’ex-conseil régional de Midi-Pyrénées.

Avec un niveau d’endettement de 174420747442074 euros/habitant au 31 décembre 2744207414, la collectivité est ainsi la région la moins endettée de France. «Les dépenses d’investissement ont par ailleurs bénéficié d’un très bon niveau de couverture par des ressources propres: de 67442074 % à 87442074 % entre 2744207417442074 et 2744207413», précise le rapport.

Concernant la fonction achat, la CRC relève des insuffisances liées à «l’absence de centralisation de l’information relative aux marchés et l’anticipation incomplète des besoins ont eu des conséquences dommageables». Elle note ainsi l’existence «de marchés négociés conclus sans mise en concurrence, d’achats hors marchés, ou des cas de dépassement de l’enveloppe des marchés».

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