Réflexion Transmission d’entreprise : comment se préparer ?

La transmission d’entreprise est une étape complexe car elle cumule non seulement des aspects techniques, mais touche également à une part d’intime du dirigeant.

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«Le secteur du négoce connaît un réel problème de transmission, observe Hugues Pouzin, directeur général de la Confédération Française du Commerce Interentreprises (CGI). C’est un secteur dont l’importance est peu connue puisqu’il représente 120 000 petites entreprises dont la taille moyenne varie entre 5 et 20 salariés. Ainsi, le nombre d’entreprises visibles est faible et le secteur a ainsi du mal à être identifié alors, qu’au regard de la pyramide des âges des dirigeants, la part des 55/60 ans progresse. »

L’étape incontournable de la réflexion

À partir de quand un dirigeant doit-il s’interroger sur la transmission de son entreprise ? Dans quelles conditions et à qui va-t-il transmettre ? Ces questions essentielles nécessitent du temps qu’aucun candidat au départ ne peut éviter. « Il ne faut pas vieillir trop longtemps avec son affaire, suggère un expert. Si l’on s’accroche à son poste de dirigeant, avec un personnel vieillissant, des structures obsolètes, une rentabilité en chute, il est trop tard pour la vendre. Tout repreneur potentiel préfèrera alors créer son entreprise. Il est naturel de ne pas avoir envie d’imaginer ce qu’il peut se passer après soi. Mis il arrive un âge où l’on est à bout de souffle! ».

Pour le cédant, le critère de l’âge de la retraite entre certes en ligne de compte, mais l’arrivée de nouveaux concurrents ou une mutation nécessaire pour permettre à l’entreprise de passer un cap de développement entre aussi en jeu.

« En général, le dirigeant pense d’abord à la transmission quand l’entourage est susceptible d’être intéressé, ajoute Hugues Pouzin. Si personne n’est intéressé, ce peut être perçu comme une blessure car la transmission est aussi celle d’une part intime de la vie du chef d’entreprise. » Plusieurs années avant de passer le relais, il importe de repérer ceux qui, au sein de sa famille, disposent des compétences nécessaires pour diriger l’entreprise. Peut-être ces compétences ne sont-elles pas suffisantes. Il existe ainsi des formations dont certaines peuvent être spécifiques au négoce, comme c’est le cas de l’Ecole de Négociants BigMat (ENB) dont l’une des missions est de préparer ses élèves aux responsabilités de futur dirigeant, avec une culture d’entreprise propre à l’enseigne.

Si un membre de la famille est successeur potentiel, le dirigeant devra, pour lui permettre de prendre la direction effective, clairement le privilégier dans le montage financier qui s’en suivra. Si aucun membre de sa famille ne semble intéressé ou disposer des capacités nécessaires, le dirigeant pourra se tourner vers un collaborateur ou un groupe de cadres. Le penser en amont permet d’analyser les possibilités de financement externes ; éventuellement d’y associer un partenaire extérieur ou de participer à un holding de reprise. Un laps de temps sera également nécessaire à parfaire la formation du ou des collaborateurs.

On l’aura compris : l’attrait fiscal ne peut être la motivation qui pousse le dirigeant à partir. L’étape de la réflexion est essentielle, notamment pour chercher un repreneur extérieur quand les options familiales ou de reprise par un collaborateur ne trouvent pas d’issue.

Connaître la situation de son entreprise

Le temps de recherche du profil de son successeur, soit au sein de son entourage familial, soit dans l’entreprise, soit encore à l’extérieur avec un repreneur potentiel, tend à assurer au mieux la continuité de l’entreprise. C’est un point essentiel : « Je connais une entreprise qui avait été vendue à un repreneur qui n’avait pas la sensibilité nécessaire pour s’adapter à l’entreprise, explique Remy Fasquelle, un expert en transmission d’entreprises. La situation était à tel point bloquée que c’est l’ancien vendeur qui l’a rachetée avant de la revendre à nouveau ! ». Ce profil défini, le dirigeant doit, dès l’âge de 50 ans si possible, procéder à l’inventaire d’un certain nombre de points conseillés par le CRA, l’association nationale pour la transmission d’entreprises : le positionnement de l’entreprise par rapport à ses marchés, l’adéquation de ses produits par rapport aux tendances du marché, le profil de la clientèle, l’immobilier, le matériel et l’outil. Avant toute négociation, il convient de procéder à un certain nombre d’arbitrages : sortir du bilan de vieilles créances non recouvrées, effacer des stocks anciens invendables, renégocier des emprunts trop lourds pour la trésorerie… Il est peut-être temps de transformer le statut de son entreprise (SARL en SA), de vérifier l’état des cautions, l’existence de contrats…

L’inventaire physique des immobilisations qui permet par exemple de supprimer la taxe professionnelle sur des équipements inutiles, le transfert éventuel de l’immobilier dans une SCI si l’entreprise est propriétaire de ses murs, permettront de toiletter correctement son entreprise avant d’en optimiser la valeur et de la présenter à la vente.

Savoir s’entourer de conseillers

Notamment en matière de transmission, une mauvaise préparation peut entraîner une majoration des frais de succession. Il existe désormais un certain nombre de montages financiers comme le LBO (leverage buy out), une technique de rachat d’entreprise avec effet de levier, le LMBO (leverage management buy out) en cas de rachat par les salariés. L’OBO (owner buy out) qui permet par exemple, via la création d’un holding, de dégager du cash et d’emprunter des fonds auprès d’établissements de crédit. Il convient aussi de signaler l’importance du pacte Dutreil qui permet d’alléger fiscalement une transmission d’entreprise avec une exonération des droits de donation à hauteur de 75 % de la valeur de l’entreprise. L’enjeu consiste à être correctement conseillé par des professionnels, entre autres des fiscalistes mais pas seulement : « En fonction de la solution retenue, l’implication ne sera pas identique. Mais, lors de ce passage de témoin, certains freins psychologiques peuvent apparaître, constate Hugues Pouzin. Faire alors appel à des confidents extérieurs peut s’avérer fort utile. Le fait d’avoir des rendez-vous réguliers avec des réseaux spécialisés dans la transmission pousse le dirigeant à préparer ses dossiers durant les six à quinze mois d’accompagnements qui seront nécessaires pour lui permettre de réussir cette étape ».

Parmi les interlocuteurs qu’il ne faudra pas négliger, le banquier figure évidemment en bonne place, à la fois en amont du projet mais aussi lors de la phase d’accompagnement avec le repreneur ou le membre de la famille à qui l’on aura transmis. Outre l’aspect financier, les clients qui constituent la richesse de la société, devront être informés. Le dirigeant sortant présentera son successeur sous une forme qui restera à définir. Il en sera de même, avec un calendrier et des enjeux différents, pour les fournisseurs, les conseils (experts-comptables, commissaires aux comptes…), confrères, assureurs…

L’essentiel est fait. Vient alors le moment pour l’ancien dirigeant, assuré de voir son entreprise lui « survivre » en quelque sorte, de progressivement laisser sa place.

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