Intitulé « Travaux de dépollution pour la reconversion de friches », l’appel à projets lancé le 6 novembre par l’Agence de la transition écologique (Ademe) se démarque des consultations récurrentes qui ont marqué les dix dernières années sur ce même thème. Sans équivalent par leur montant et sur des périmètres géographiques plus larges, les aides financeront des composantes d’opération jusqu’ici non traitées.
Périmètre élargi
Outre la dépollution qui en constitue le cœur, « les fonds mobilisés par l’Ademe contribueront à la démolition, au désamiantage, ainsi qu’aux travaux de génie écologique, lorsqu’ils contribuent à des solutions fondées sur la nature », détaille Cécile Grand, cheffe de projets Sites et sols pollués à l’Ademe.
Dédié aux anciennes emprises minières et aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), l’appel à projets pourra prendre en compte des surfaces limitrophes intégrées à des opérations globales. Son lancement marque le premier aboutissement visible du fonds Friches décomposé en trois parties : 40 millions d’euros pour les deux éditions de l’appel à projets de l’Ademe, 259 millions pour les appels à projets régionaux destinés au recyclage foncier, placés sous la responsabilité du ministère de la transition écologique, et 1 million pour les outils numériques d’accompagnement.
Deux outils numériques
A la manœuvre sur ce dernier volet, le centre d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) développe d’une part l’inventaire Cartofriches, d’autre part le système de structuration de réseaux territoriaux UrbanVitaliz.
Une logique ascendante caractérise ces deux outils explicitement rattachés au fonds Friches, et qui s’ajoutent à Urban Simul, dédié à l’évaluation du potentiel foncier, en cours de déploiement en région Provence-Alpes Côte d’Azur et en Corse. « L’inventaire national harmonisé s’appuiera largement sur des démarches locales à consolider », annonce Stéphane Lévêque, directeur de projets Ouverture et qualification des données au Cerema. Après la diffusion d’une version test en juillet, la finalisation de Cartofriches interviendra au printemps 2021. Sa gestation découle du conseil de défense écologique (CDE) de l’été 2019.
Facilitée par l’inventaire national, l’émulation territoriale découlera aussi d’une autre impulsion donnée par le CDE sous le nom d’UrbanVitaliz, avec le cahier des charges suivant : « Un service numérique gratuit pour la mise en réseau des collectivités concernées par les friches, en zone détendue », résume Perrine Rutkowski, chargée de ce projet au Cerema.
Au bout du tuyau
Depuis le lancement d’Urban Vitaliz fin septembre avec un budget initial de 200 000 euros, l’équipe du projet explore le concept avec la structure transministérielle Beta.gouv, incarnation de l’approche dite Start-up d’Etat. Trois territoires pilote désignés en octobre contribuent à la phase expérimentale : les Côtes d’Armor, l’Aveyron et la Somme. Comme pour tous les projets de Beta.Gouv, un comité d’investissement vérifiera la pertinence du concept au bout de six mois, soit en février prochain.
Le déploiement du fonds Friches se poursuivra d’ici à la fin de l’année, avec la publication du cahier des charges national qui présidera au lancement des appels à projets régionaux, sous la responsabilité de préfets.
Piloté au sein du ministère de la Transition écologique par la direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN), le fonds obéit à une règle constante : « Le gestionnaire du site doit prouver que malgré l’optimisation des aides préexistantes, il reste un déficit à combler », décrypte Jean-Baptiste Butlen, sous-directeur de DGALN et président du comité de pilotage. « Au bout du tuyau », le fonds intervient alors pour équilibrer l’opération.
Une piste pour la désartificialisation
La montée en puissance du fonds Friches prépare une étape clé de l’agenda parlementaire de 2021 : la loi issue des propositions de la convention citoyenne pour le climat précisera les définitions qui structureront la politique dite Zéro artificialisation nette. L’un des enjeux concerne la possibilité de sortir des friches renaturées des sols classés comme artificiels, au profit des espaces naturels, agricoles et forestiers.