Inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques mais abandonné depuis presque quinze ans, l'ancien siège du quotidien « L'Humanité » va enfin revivre. L'immeuble de bureaux imaginé par Oscar Niemeyer (1907-2012) entre 1987 et 1989 face à la basilique de Saint-Denis avait été acquis par l'Etat en 2009. En 2020, l'Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la Culture (Oppic) a été mandaté pour étudier sa réhabilitation. Les 7 700 m2 accueilleront la Direction interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (Drieets). Le groupement lauréat du marché global de performance compte l'entreprise Eiffage Construction Equipements, l'agence B. Architecture, le bureau d'études Bérim (structure et fluides), déjà présent à l'origine, et Arcora (façades), ainsi qu'Eiffage Services pour son exploitation-maintenance pendant cinq ans.
Après le curage, les travaux débuteront au printemps 2023 pour s'achever en 2025. L'Etat finance le budget de 40 M€ dans le cadre du plan de relance, au titre de l'amélioration énergétique des bâtiments publics. « Ce chantier s'inscrit dans une rénovation en profondeur de la ZAC Basilique », explique le maire, Mathieu Hanotin. « Cela participe de l'énorme effort qui est fait pour le département et pour la ville car nous avons plus que jamais conscience qu'il nous faut réparer un certain nombre d'inégalités », confirme Marc Guillaume, préfet de la région Ile-de-France. Le 6 juillet dernier, les deux hommes ont signé un protocole d'accord pour définir les modalités d'accès ponctuel au hall et à la toiture-terrasse par les collectivités territoriales de Seine-Saint-Denis pour des activités de valorisation du patrimoine, notamment l'observation du remontage de la flèche de la basilique.
Etages suspendus. La présidente de B. Architecture, Vera Matovic, travaille en étroite collaboration avec l'ABF et la conservatrice de la Drac et en association avec Jean-Maur Lyonnet, architecte d'opération d'Oscar Niemeyer. C'est lui qui avait géré entièrement ce projet sans que l'architecte brésilien vienne une seule fois sur place, à Saint-Denis. Sur un difficile terrain triangulaire, le bâtiment affiche un plan en Y tout en mouvement qui accompagne le visiteur vers la basilique voisine. Son mur-rideau semi-réfléchissant est réalisé grâce à la technique du vitrage extérieur collé (VEC) et couronné par une ceinture en béton percée d'oculus. « Le bâtiment repose sur des pilotis et un rez-de-chaussée transparent. Il est tout en légèreté et en sensualité. Oscar a utilisé le béton brut avec les planches appareillées comme la marque de la main de l'homme », raconte Jean-Maur Lyonnet.
Le calepinage des vitrages sera respecté ainsi que leur teinte d'origine, choisie pour sa correspondance avec celle de la toiture de la basilique. Suspendus au dernier étage à une énorme poutre de béton, les planchers comportent peu de porteurs et offrent donc une grande flexibilité de cloisonnements. « Même si elle n'est pas inscrite, nous respecterons aussi l'architecture intérieure : le palier généreux à chaque niveau, la colorimétrie brésilienne, les magnifiques salles circulaires. La notion de patrimoine vivant nous tient à cœur », insiste Vera Matovic.