Accident du travail
Faute inexcusable : point de départ du délai de l’action en justice du salarié
Un salarié est victime le 28 mai 2002 d’un accident du travail, pris en charge par la caisse primaire d'assurance-maladie. Il perçoit, à ce titre, des indemnités journalières entre mai et juin, puis reprend son travail. Le salarié est de nouveau arrêté entre septembre 2002 et septembre 2004. Le 9 janvier 2006, soit presque quatre ans après son accident, il saisit le tribunal des affaires de sécurité sociale d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.
Le salarié dispose d’un délai de deux ans pour exercer cette action en justice. La loi admet notamment que ce délai débute sa course à compter de la cessation du paiement des indemnités journalières. Les juges de première instance déclarent l’action du salarié prescrite : les certificats médicaux relatifs aux arrêts de travail prescrits à compter de septembre 2002 doivent être considérés comme des certificats de rechute, et non de « prolongation ».
Question : Quand le délai de deux ans pour agir en reconnaissance de la faute inexcusable devait-il commencer à courir ?
Réponse : A compter de la date de consolidation de l’état de santé de l’accidenté du travail, soit à compter du 30 septembre 2004. En conséquence, le 9 janvier 2006, jour de la saisine du tribunal, moins de deux ans s’étaient écoulés La demande du salarié était bien recevable (Cass. soc. 20 juin 2013, n° 12-16576).
Commentaire : Dès lors que le salarié avait perçu des indemnités journalières pour le même accident jusqu'au 30 septembre 2004, la discontinuité du versement des indemnités journalières au titre de différents certificats médicaux importait peu. La consolidation, qui correspond à la stabilisation de l’état de santé de la victime, permet de fixer la date où le salarié passe du système des indemnités journalières à celui de la rente pouvant être versée en cas d’accident ou de maladie professionnelle.
Représentation du personnel
Un risque de stress ne suffit pas à justifier une expertise du CHSCT
Trois comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) désignent un cabinet d’experts, en invoquant l’existence d’un risque grave, pour « rechercher les facteurs de risques et analyser les accidents et les conditions de travail des situations et accidents liés au stress et/ou aux situations stressantes, et aider le CHSCT à avancer des propositions de prévention des risques professionnels et d'amélioration des conditions de travail. »
Question : La désignation d’un expert pour risque grave est-elle dans ces conditions justifiée ?
Réponse : Non. La Cour de cassation considère en effet que le risque grave, au sens du Code du travail, s'entend d'un risque identifié et actuel (Cass. soc. 14 novembre 2013, n° 12-15206).
Commentaire : Si les CHSCT faisaient bien état du risque général de stress lié aux diverses réorganisations mises en oeuvre dans l'entreprise, ils ne justifiaient pas, selon la Cour de cassation, d'éléments objectifs susceptibles de caractériser un risque avéré. Cette décision pourrait contribuer à donner un coup de frein à la propension observée ces dernières années dans les CHSCT de nombreuses entreprises à considérer, en soi, le stress comme un risque grave permettant la désignation d’un expert rémunéré par l’employeur.
Accident du travail
Manquement à l’obligation de sécurité de l’employeur et sinistre professionnel : le Tass est compétent
Une salariée est victime d’un accident du travail. Elle est, peu de temps après, déclarée définitivement inapte à son poste par le médecin du travail, puis licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Elle saisit le Conseil des prud’hommes pour demander la condamnation de l'employeur à lui payer des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d’une part et pour manquement à son obligation de sécurité d’autre part.
Question : La salariée pouvait-elle demander, outre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnisation en réparation du préjudice subi du fait de son inaptitude devant le juge prud’homal ?
Réponse : Non. En effet, si la juridiction prud'homale est seule compétente pour connaître d'un litige relatif à l'indemnisation d'un préjudice consécutif à la rupture du contrat de travail, l'indemnisation des dommages résultant d'un accident du travail, qu'il soit ou non la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité relève, en revanche, de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale (Tass) (Cass. soc., 29 mai 2013, n° 11-20074).
Commentaire : Sous couvert d'une action en responsabilité contre l'employeur pour manquement à son obligation de sécurité, la salariée demandait en effet, en réalité, la réparation d'un préjudice né de l'accident du travail dont elle avait été victime.