Le 14 avril dernier, le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, annonçait vouloir faire construire 3000 places de prison grâce à des structures modulaires. L'argument du ministre : alors qu'aujourd'hui, sept années sont nécessaires pour construire une prison pour un coût d’environ 400 000 € par place, des constructions modulaires fabriquées hors site permettraient de ramener ce délai à 18 mois et le coût à 200 000 € par place construite. Le garde des Sceaux avait promis deux appels d'offres successifs pour ce faire.
Le premier, lancé sous la forme d'une « procédure avec négociation », a été publié le 16 mai 2025. Il s'agit d'un partenariat d'innovation (voir encadré) qui se déroulera en deux phases : recherche et développement sur une période contrainte, puis acquisition de quartiers de semi-liberté modulables et standardisés. « A ce stade il est envisagé le déploiement rapide de quartiers de l'ordre de 50, 75 ou 100 places », indique le texte de l'avis de marché publié au Bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP).
Un partenariat d'innovation qu'est-ce que c'est ?
Introduit dans le droit français en 2014, il s'agit d'une forme de marché public ayant pour objet la recherche et le développement (R & D) d'une solution innovante, puis son acquisition. Il permet à l'acheteur de répondre à un besoin qui ne peut être satisfait par des produits, services ou travaux déjà disponibles. Le premier partenariat d'innovation conclu dans le domaine de la construction date de 2021 et portait sur la création de bâtiments modulaires destinés à des hébergements d'urgence, des logements provisoires et des bureaux pour des activités temporaires pour la Banque des territoires, SNCF Immobilier, ICF Habitat et le conseil départemental de Seine-Saint-Denis.
« Deux à trois partenaires maximum (ce nombre sera fixé à la transmission du dossier de consultation des entreprises) proposeront dans un premier temps, des prestations de recherche et de conception et le développement, dont le prototypage, de solutions de bâtiments pénitentiaires de semi-liberté répondant aux besoins fonctionnels, techniques et calendaires dont l'expression détaillée sera fournie dans le DCE communiqué aux candidats admis à présenter une offre (phase n°1 - Recherche et développement) », est-il précisé dans l'avis de marché. Dans un second temps, ces partenaires devront fabriquer les bâtiments et tous les aménagements associés - VRD (phase n°2 - Acquisition). A l'issue de la première phase et en fonction de son résultat, le maître d'ouvrage, lors de la seconde phase, aura la possibilité de faire procéder à la construction d'environ 1500 places au total sur toute la France par le ou les partenaires.
Equipes pluridisciplinaires
« Ces constructions, réalisées sur le domaine public pénitentiaire, seront de petite taille pour répondre aux contraintes locales et aux attentes de l’administration pénitentiaire (50, 75 ou 100 places). Les prisons modulaires seront construites en usine (planchers, murs, façades, plafonds) par modules, selon un cahier des charges simplifié, et seront assemblées sur les sites retenus », a expliqué le ministère de la Justice dans un communiqué.
Les marchés de travaux seront conclus avec des équipes pluridisciplinaires regroupant « obligatoirement et au minimum »une entreprise générale de construction, un constructeur d'ouvrages préfabriqués modulaires 2D et/ou 3D (compétence qui peut être intégrée à l'entreprise générale de construction), un architecte inscrit à l'Ordre des architectes (ou équivalent pour les candidats non établis en France), un économiste de la construction, et un bureau d'ingénierie (thermique, acoustique, structure, fluides, courants forts et faibles, sûreté, impact carbone et environnemental).
Il est prévu de signer lors de la phase "acquisition" plusieurs accords cadre mono-attributaire de conception, fabrication et construction d'une durée de quarante-huit mois reconductible trois fois pour une durée de douze mois.