Ses panoramiques sont célèbres dans le monde entier et ont même, sous l’impulsion de Jackie Kennedy, décoré le bureau ovale de la Maison Blanche à Washington. La Manufacture Zuber, plus ancienne manufacture de papiers peints encore en activité en France, fondée en 1790 à Rixheim (Alsace), préserve l’histoire du papier peint. Elle conserve des exemplaires de ses créations depuis la fin du XVIIIe siècle et utilise toujours les techniques manuelles pour une partie de sa production.
« La famille, qui continue de porter l’héritage du fondateur Jean Zuber, est très attachée à la promotion des artisans qui défendent les valeurs du papier peint et les techniques traditionnelles », confie Arnaud Fouassier, maître peintre et tapissier d’art dans l’Orne. C’est donc à ce dernier que les descendants de la famille Zuber ont fait appel pour mettre en lumière un ancien décor Mandarin, stocké depuis les années 1980, dans leurs toilettes.
« Ce revêtement s’adresse à de fins connaisseurs, avec sa couture de joints subtile mais visible, ses vibrations, ses petites anomalies… Ce modèle en particulier, imprimé aux cylindres, a nécessité des raccords faits à la main », souligne l’artisan. Dans les toilettes désormais parées d’un décor d’art, le peintre a d’abord préparé les murs avec une impression solvantée et peint les soubassements en rouge finition satin. « La pièce étant petite, nous avons posé directement le papier au mur sans liner ni papier d’apprêt, car nous savons qu’il ne sera pas récupéré», précise le tapissier.
Les mesures, raccords et angles ont dû être anticipés et les lés préparés en atelier, « car tout doit être découpé au plus juste ». Et pour cause, ce revêtement de moins de 100 g/m², 100 % cellulosique – fabriqué à base de fibres de bois et de chiffon – est extrêmement fin. « Une fois détrempé par la colle, il peut se déchirer comme du papier toilette mouillé », image l’artisan. « Quand on le pose, il faut savoir exactement ce que l’on fait, et sentir la matière. Comme un chef cuisinier avec sa poêle sur le feu. » Une pose tout en délicatesse pour un décor d’exception aux motifs mandarins retrouvés.
1. La préparation des lés
La première étape a consisté en un relevé sur site. En atelier, le calepinage précis anticipe l’implantation du décor. Le couple de personnages, positionné sur l’axe central du mur du fond, organise la suite de la disposition des motifs. Le papier est débité en lés de largeur 47 cm et hauteur exacte. Chaque lé est numéroté pour aligner parfaitement le décor et gagner du temps sur le chantier.

2. Un encollage lé par lé
La colle est badigeonnée avec une brosse sur l’envers du papier peint. Il est maintenu par des poids aux extrémités pour éviter qu’il s’enroule. Ensuite, il est plié en portefeuille, afin que la colle soit répartie de manière homogène sur la surface, et tout de suite appliqué sur le support. En raison de la finesse du papier, il est impossible d’encoller plusieurs lés en avance.

3. Un marouflage minutieux
La colle, particulièrement douce, met du temps à sécher et le papier, très fin, se tend pendant plusieurs jours. Le tapissier passe le balai de manière très légère pour assurer le marouflage traditionnel et le positionnement du papier, tout en évitant de poser les doigts sur le décor pour ne pas endommager la couleur.

4. Des retouches au pinceau
Une fois le décor stabilisé sur son support, des retouches en couleur ont dû être réalisées. Le papier peint étant très délicat, il a poudré: des éléments ont pu disparaître lors de son stockage ou être mal reproduits lors de l’impression. Les pigments qui se sont perdus ont donc été rafraîchis et restaurés par petites touches. Sur ce chantier, la mise en œuvre, d’environ 5 m², a été réalisée en une journée, après une préparation en atelier d’une demi-journée.

Entreprise : Fouassier Aménagement
Siège : Alençon (Orne)
Création : 2023
Dirigeant : Arnaud Fouassier
Activité : peinture, pose et fourniture de papiers peints d’art