Usine : un bunker de béton pour l'hydrogène

A l'heure de la réindustrialisation, un site de production unique par sa superficie et les montants engagés sort de terre à Saint-Fons (Rhône). C'est ici, sur un terrain de huit hectares au cœur de la vallée de la Chimie, que la plus grande usine de piles à combustible à hydrogène d'Europe a élu domicile.

A la fin de l'été 2023, la jeune entreprise Symbio doit y accueillir, moyennantun investissement total de 100 millions d'euros au bas mot, plus de 700 salariés. Les 19 000 m² SDP comprendront une usine de production, un centre de recherche et de formation, un magasin logistique, ainsi que les bureaux du siège dans un bâtiment réhabilité.

« Nous avons choisi ce site pour sa taille, mais aussi pour sa proximité avec des réseaux de distribution d'hydrogène, de manière à assurer la production et l'exploitation de notre centre de recherche », introduit Loïc Le Flem, directeur de projets industriels chez Symbio. « Il y a un immense enjeu industriel à livrer rapidement une usine de cette dimension, capable de produire jusqu'à 16 000 unités par an », poursuit-il. Et la société ne souhaite pas s'arrêter là. Elle prévoit déjà la construction de son propre électrolyseur, et envisage une extension pour porter sa capacité à 50 000 unités en 2025, contre 16 000 actuellement.

Activités dangereuses. En plus des délais restreints imposés par cette course folle à l'hydrogène, qui ont impliqué de réaliser des travaux en moins de quinze mois et de s'adapter à un programme évoluant en cours de chantier, la construction présente des risques intrinsèques liés à l'explosivité des usines voisines, puis, quand l'usine sera en activité, à la forte inflammabilité de l'hydrogène. Cet ouvrage devient ainsi un véritable bunker industriel de grandes dimensions. « Le projet est soumis à un plan de prévention des risques technologiques (PPRT), qui contient certaines préconisations constructives », explique Franck Chopard, directeur commercial Eiffage Construction Centre Est.

La première est de s'éloigner du périmètre concerné par le risque d'explosion, en construisant au sud de la parcelle. Ces aléas ont aussi imposé d'opter pour une structure en béton, moyennant des calculs spécifiques pour dimensionner des poteaux et poutres 1,5 fois plus gros que pour un bâtiment de ce type.

Les ossatures et châssis métalliques ont également été renforcés, notamment pour les murs rideaux, nécessairement dotés de verres feuilletés. Pour prévenir les dangers de toxicité liés aux fumées, des locaux de confinement ont été créés à l'intérieur du bâtiment. « Concernant l'hydrogène, qui est un gaz inflammable, la construction devait aussi prendre en compte la gestion du risque d'explosion d'Atex (Atmosphère explosive), imposant la réalisation de mur coupe-feu 2 h, de système de désenfumage naturel et de salles blanches ISO 8 en surpression », poursuit Franck Chopard. La maîtrise de l'air à l'intérieur de ces dernières impose la mise en œuvre d'importants réseaux aérauliques concentrés autour d'un rack aérien, et l'emploi de gros équipements tels que les centrales d'air et les recycleurs. La chaleur fatale de ces équipements et des bancs process de la R&D sera d'ailleurs récupérée pour chauffer l'ensemble du site. Pour finir, l'installation est classée pour la protection de l'environnement (ICPE), afin de limiter ses impacts sur l'eau, l'air ou les sols.