La notoriété internationale n’implique pas la prospérité. Les plus de 90 000 habitants d’Avignon en font l’expérience, à l’ombre du Palais des papes inscrit au patrimoine mondial de l’humanité, et malgré les 18 000 emplois recensés à l’intérieur des remparts : un profil atypique parmi les territoires du programme Action Cœur de Ville dont bénéficie le chef-lieu du Vaucluse, à côté de 12 autres agglomérations de la région Provence Alpes Côte d’Azur.
Au début de cet été, ces spécificités ont conduit à enrichir la convention initiale du 16 novembre 2018 par un avenant qui engage la Ville, l’agglomération du Grand Avignon, l’Etat, la Caisse des dépôts et de consignations et Action Logement.
Mise en réseau
Pour la maire Cécile Helle, la mise en réseau renforce et conforte les actions engagées depuis 2014. L’élue socialiste n’a en effet pas attendu le programme d’Etat pour lancer la dynamique de revitalisation de son centre-ville, qui a perdu intra-muros plus de la moitié de la population depuis les années 1970, soit 14 000 habitants aujourd’hui.
Le poids du commerce périphérique complique l’inversion de la tendance, avec ses 500 000 m2 de grandes et moyennes surfaces pour 300 000 habitants. En cours d’adoption dans les 24 communes du bassin de vie (770,79 km2 , 312 262 habitants), le schéma de cohérence territoriale (Scot) vise à limiter les nouvelles implantations jusqu’en 2035 : pas plus de 10 000 m2 supplémentaires de surface de vente, uniquement en densification des zones commerciales existantes.
Retour des enseignes et réhabilitations par centaines
Pour son cœur de ville, la commune inscrit sa stratégie dans les orientations générales du programme national : mise en valeur des formes urbaines, de l’espace public et du patrimoine ; développement économique et commercial équilibré et garanti par une foncière commerce à créer ; mobilité ; meilleur accès aux équipements et services publics.
« Dès 2014 et au regard de la situation de notre cœur de ville, notamment en termes de vacance des logements et des commerces, la ville a engagé des actions très fortes. Elle en ressent les premiers effets. Pour preuve, intra-muros, le nombre d’enseignes est passé de 1 150 fin 2013 à plus de 1 400 trois ans plus tard. Parallèlement, nous avons missionné notre SEM Citadis pour mener des opérations de restauration immobilière (NDLR : ORI). Les 50 logements remis sur le marché bar ce biais viennent s’ajouter à une quantité équivalente, portée par des investisseurs privés grâce au dispositif de défiscalisation de la loi Malraux associé au plan de sauvegarde et de mise en valeur », raconte Sébastien Giorgis, adjoint au maire, délégué à l’attractivité territoriale et touristique, au patrimoine historique et aux grands événements. L’OPAH-RU renouvelé en 2020 poursuit sur cette lancée, avec un objectif de 310 logements à produire en cinq ans.
Le modèle de Sainte-Anne
En parallèle, la Ville a développé une stratégie originale de valorisation de lieux emblématiques, cédés à des opérateurs privés en contrepartie du respect d’un cahier des charges strict. La prison Sainte-Anne sert de modèle à ce type de montages.
Mandataire du groupement de promoteur-investisseur-concepteur, le promoteur LC2I commercialisera une offre mixte de logements, en échange de la rétrocession d’ateliers d’artiste aménagés au sein de l’ensemble. La même logique a présidé à l’acquisition des anciens bains publics Pommer et des immeubles attenants. L’investisseur qui réhabilitera les logements vacants devra aussi créer un espace muséal à rétrocéder gratuitement à la commune : une opération conçue par l’atelier PELLEN&DAUDE associé au Bureau d’Etudes Techniques TPFI.
Vers un label Ville d’art et d’histoire
Deux projets du même type vont suivre : la ville négocie avec un investisseur lyonnais la reprise de deux anciens hôtels particuliers (Monnaie et Niel) situés en face du Palais des papes. Outre un boutique-hôtel, l’ensemble abritera le centre d'interprétation de l'architecture et du patrimoine (CIAP), élément essentiel pour obtenir le label Ville et pays d’art et d’histoire pour la Cité des papes. Le produit des ventes de ces biens immobiliers financera les équipements et les espaces publics.
Un essai à transformer
Malgré ces efforts, le regain d’attractivité en matière d’habitat reste à prouver. Par exemple, la hausse des transactions servirait à de la résidence secondaire. Par ailleurs, Action Logement n’a pas encore concrétisé un seul dossier ni organisé une soirée investisseur, faute d’immeubles fléchés et maîtrisés par la collectivité ou l’établissement public foncier Paca.
« Produire du logement locatif ou en accession sociale, adapté en termes de typologie et de confort thermique, est un des axes principaux sur lesquels nous allons travailler sur les cinq prochaines années. Nous connaissons le potentiel en matière d’immeubles qui pourraient être réhabilités par des investisseurs privés ou des bailleurs sociaux. Reste à le confirmer.
Au tour des Faubourgs
Le dispositif Action Cœur de Ville étant prolongé, nous avons bon espoir d’avancer sur le sujet », déclare Sergio Rolleri, directeur régional adjoint investissements Action Logements services Paca-Corse. La progression de la vacance justifie cette détermination : selon l’Insee, le phénomène touchait 6139 logements en 2009, contre 7439 en 2014.
Avignon n’oublie pas pour autant ses faubourgs, où vit les trois quarts de sa population. Un plan récemment adopté vise à resserrer leurs liens avec la ville médiévale, grâce à des efforts sur la mobilité et les espaces publics.