A l'angle de deux rues, sur l'île Saint-Germain à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), un curieux signal émerge : des volumes géométriques et un mur vert bardé de cuivre. Telle apparaît la maison conçue par les architectes Vincent Griffon et Jean-Marie Doumbé. Une silhouette moderniste qui évoque les signatures des grands maîtres des années 1930. A aucun moment pourtant, Griffon et Doumbé n'ont voulu effectuer quelque « rappel stylistique » que ce soit, ils ont simplement « répondu à l'équation posée par les propriétaires ».
Achevée en juillet 2005 après treize mois de travaux, cette maison prend place dans une « dent creuse » en forme de « L ». Une paroi de cuivre (11 x 15 m) lui donne sa singularité. « Ce mur joue un double rôle : structurel et esthétique », soulignent les architectes. A l'extérieur, comme colonne vertébrale sur laquelle se greffent les volumes parallélépipédiques du bâtiment. A l'intérieur, comme frontière qui réunit et sépare tout à la fois les différents espaces. Réalisée en maçonnerie et bardée de plaques de cuivre, cette paroi assume par ailleurs sa vocation esthétique. « Nous aimons ce métal, c'est un matériau noble qui vit avec le temps. Comme la nature, il se métamorphose en passant par toutes les nuances du vert et offre un élément de séduction supplémentaire », confient les architectes qui expliquent que, si l'idée de ce mur s'est « imposée à eux », ils ont passé beaucoup de temps à ajuster les proportions des volumes.
Mur de cuivre, blocs géométriques, puits central de lumière, plancher en verre donnant sur le balcon côté jardin : cet ensemble de solutions a permis de répondre aux exigences des propriétaires. « Côté visuel nous souhaitions une maison aux formes anguleuses, sans luxe ostentatoire ; mais une belle maison tournée vers l'intérieur, avec un vrai confort de vie. Sans être coupées du monde extérieur, nous voulions nous retrouver nous-mêmes », décrivent les maîtres d'ouvrage, deux jeunes femmes. Au plan fonctionnel, elles souhaitaient disposer de trois espaces indépendants - living, enfants, parents -, d'un jardin et de grandes chambres.
Rez-de-chausséehors inondation. Un programme qui a conduit Griffon et Doumbé à proposer un bâtiment en R 2 (11,25 m de hauteur), construit sur 16 pieux en béton qui cherchent le bon sol à 18 m de profondeur. Les murs sont en maçonnerie de blocs béton de 20 cm. Les percements des façades ont été âprement discutés entre les architectes et leurs clientes. Pour rééquilibrer l'austérité des volumes géométriques, des volets coulissants animent la façade. Réalisés en aluminium par un artisan francilien, ils affichent une sorte de perfection horlogère et constituent l'autre élément marquant de la maison. Deux terrasses complètent l'ensemble, sur rue pour l'une et, pour l'autre (150 m2), sur la Seine. Le garage (deux voitures) est de plain-pied, en l'absence de sous-sol.
Les architectes ont en effet surélevé le rez-de-chaussée de 1,50 m pour tenir compte des risques d'inondation. A l'intérieur, au rez-de-chaussée, sur une hauteur de 6,80 m, un grand espace fluide de 120 m2 (salon, salle à manger, cuisine) prend le jour par deux immenses baies vitrées au sud, mais aussi par un puits de lumière. Au premier étage, l'espace des enfants avec trois chambres, un vide sur le séjour, une salle de jeu, une salle de bains, un balcon. Au second étage, l'espace « parents », avec chambre, dressing, terrasse et bureau. Objectif atteint : créer trois espaces indépendants tout en conservant une unité à la maison.
Dialogue permanent. « Le puits de lumière, les ouvertures, une dalle de verre permettent un dialogue lumineux d'un étage à l'autre », notent les architectes. « La lumière, c'était l'un de nos souhaits. Et c'est une réussite. Le matin, le soleil entre par la verrière. Le soir, on a une magnifique couleur orangée dans les escaliers. La nuit, on a les lumières de Paris », racontent les propriétaires. Et puis, construire une maison suppose une connivence jamais démentie entre architectes et propriétaires, des mois durant. « Dialogue permanent, humilité de part et d'autre », confient les architectes qui disent avoir eu une « liberté totale ». Les propriétaires soulignent qu'un duo d'architectes permet « une plus grande stimulation et davantage de créativité ». Des points ont été longuement débattus : le cellier près de la cuisine - « Nous y tenions » -, et une extension de plain-pied prolongeant le séjour - « Nous avons fait accepter une solution réversible : un parquet au lieu de la végétation ». Un seul regret : l'absence d'un espace en sous-sol.



