Dans quelles conditions avez-vous établi le rapport sur l’assurance construction ?
Après le toilettage du régime de l’assurance construction par l’ordonnance du 8 juin 2005, les ministres de l’Economie et de l’Equipement ont voulu aller plus loin et ont chargé l’Inspection générale des finances et le Conseil général des Ponts & Chaussées d’établir un rapport. Objectif : disposer d’un état des lieux du régime, d’une comparaison avec les mécanismes existant à l’étranger et de propositions pour faire évoluer le système. L’étude comparée portant sur vingt pays a finalement fait l’objet d’un fascicule séparé au vu de l’intérêt des résultats obtenus. Les deux rapports ont été remis aux ministres en octobre dernier.
Quels constats avez-vous faits ?
Les objectifs de la loi Spinetta de 1978 sur l’assurance construction ont été atteints avec la diminution des contentieux et l’accélération des réparations et de leur financement. Le régime est proche de l’équilibre comptable et la sinistralité semble ne pas connaître de tendance structurelle à la hausse. La prudence est de mise sur ce point car l’on manque d’instruments de mesure vraiment fiables de la sinistralité, en France comme à l’étranger.
Autre constat, le régime actuel a un effet déresponsabilisant sur les acteurs. C’est inhérent à tout mécanisme assuranciel ; mais l’intervention systématique de l’assureur dommages ouvrage (DO), même lorsque le constructeur responsable des désordres est identifié, est un facteur aggravant.
Par ailleurs, l’application d’un cadre juridique unique à des situations extrêmement différentes pose problème. La pratique donne lieu à des dérives. C’est le cas en matière de maisons individuelles : une construction sur six est réalisée sans dommages ouvrage. Quant aux très gros chantiers, la couverture de responsabilité civile décennale (RCD) des constructeurs y est souvent inférieure à l’étendue de leur responsabilité en raison des limites du marché de la réassurance.
Enfin, la comparaison internationale montre que le coût de l’assurance est plus élevé en France qu’à l’étranger, et que les dispositifs existants sont très variés selon les pays (assurance obligatoire, caution obligatoire, ou encore période de garantie de parfait achèvement beaucoup plus longue qu’en France).
Que propose le rapport pour améliorer la situation ?
Il y a tout d’abord des mesures visant à accroître la connaissance et la transparence du dispositif. Sont notamment concernés les efforts engagés par l’agence qualité construction pour une meilleure exploitation de ses bases de données grâce à la convention passée avec les organisations professionnelles et les assureurs pour optimiser le recensement des sinistres, et une harmonisation minimale des attestations de l’assurance RCD. Le rapport préconise aussi que soient portés systématiquement sur les documents commerciaux des constructeurs, le nom de leur assureur et le numéro de leur police.
Deuxième volet de mesures, celles tendant à la prévention des sinistres. Nous proposons ainsi que chaque vendeur de terrain à bâtir soit tenu de délivrer à l’acheteur toutes les informations dont il dispose sur les caractéristiques du sol et d’affiner les connaissances de cette sinistralité.
Et concernant les assurances elles-mêmes…
Nous suggérons dans le rapport d’autoriser le plafonnement des garanties offertes par l’assurance décennale du constructeur pour les grandes opérations hors logement. Cette idée est en passe d’aboutir puisqu’elle a été intégrée à l’article L.243-9 du Code des assurances par une loi du 30 décembre dernier ; reste à attendre la parution du décret d’application pour connaître les modalités pratiques de ce plafonnement.
Autre proposition, rendre effective l’obligation d’assurance DO pour les maisons individuelles construites hors du cadre réglementé du contrat de construction de maison individuelle avec la création d’une DO allégée ne couvrant que les dommages liés à la solidité de l’ouvrage (les autres risques pouvant faire l’objet de garanties facultatives) et souscrite par l’entreprise de gros œuvre pour le compte du maître d’ouvrage.
Enfin le rapport propose (parmi de nombreuses autres mesures qu’il est impossible de citer toutes) de privilégier la réparation directe en revalorisant le service après vente du constructeur par rapport à l’intervention de l’assureur pour retarder au maximum le recours à celui-ci. Cette proposition s’appuie sur une garantie de parfait achèvement de deux ans au lieu d’un.
