«Autorisations d’urbanisme:le champ du contrôle s’est restreint»

Yves Jégouzo, professeur à l’Université Panthéon-Sorbonne (Paris I), directeur scientifique du « Code pratique de l’urbanisme » et du « Droit de l’aménagement », fait le point sur la réforme de l’urbanisme qui entre en vigueur le 1er octobre.

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La réforme s’est traduite par une réécriture du Livre IV. Est-ce pour cette raison que vous refondez le Code pratique de l’urbanisme ?

Si on lit bien l’ordonnance du 8 décembre 2005 et le décret du 5 janvier 2007, on s’aperçoit qu’en fait ils ne modifient pas seulement le Livre IV consacré aux autorisations d’urbanisme mais aussi le Livre Premier pour ce qui est des règles générales d’urbanisme et, notamment, le nouveau Règlement national d’urbanisme. Le Livre III est aussi modifié, s’agissant des lotissements qui sont reclassés dans la case « autorisations d’urbanisme ». La loi du 31 décembre 1975 les avait sortis en considérant qu’ils constituaient des opérations d’aménagement plus que des travaux soumis à autorisation (en attendant peut-être qu’une loi future leur fasse prendre le chemin inverse). Si on ajoute à cela diverses réformes récentes comme la loi d’engagement national pour le logement par exemple, il a semblé finalement plus clair de rééditer un nouveau Code. Cependant, dans bien des cas, la renumérotation des articles ne signifie pas une réforme fondamentale.

Les praticiens sortent difficilement d’une période transitoire. Le nouveau Code pratique leur fournit-il une aide particulière ?

Le transitoire est le propre du droit de l’urbanisme, car les réformes vont souvent plus vite que les chantiers. On peut donc commencer sous l’empire d’une loi, poursuivre sous le règne d’une autre et terminer pendant une troisième réforme. Cela va être le cas pendant quelques années.

Le choix opéré pour le Code pratique de l’urbanisme est d’offrir aux lecteurs un ouvrage qui soit totalement refondu, de manière à présenter l’ensemble du droit de l’urbanisme applicable, sous réserve des dispositions spécifiques prévues par le législateur, aux opérations qui commenceront à partir du 1er octobre 2007. Mais bon nombre de constructions ou d’opérations d’aménagement entreprises antérieurement resteront encore concernées par les textes antérieurs applicables à la date à laquelle elles ont été autorisées. L’ancienne version du CPU continuera à s’appliquer pendant quelques années encore et, notamment, à régir les contentieux qui auraient pu naître entre-temps. C’est la raison pour laquelle, il est conseillé de la conserver. Une reliure spéciale a d’ailleurs été prévue à cet effet.

La réforme modifie-t-elle le droit de l’aménagement ?

C’est moins le droit de l’aménagement que le régime des autorisations qui est profondément modifié. Dans ce domaine, la réforme est d’ampleur. Elle touche à la fois l’architecture générale du système, les autorisations étant regroupées en trois grandes catégories : le permis de construire, le permis de démolir et le permis d’aménager, mais aussi et surtout l’ensemble des procédures.

Je pense même que la partie essentielle de la réforme n’est pas celle qui est la plus visible mais celle qui se dissimule dans les détails. Cela est compréhensible puisque ses auteurs ont concentré leurs efforts sur des questions telles que les délais, la composition des dossiers, les consultations des autres administrations avec un but précis : enfermer l’autorité qui délivre le permis dans des conditions formelles très précises.

On notera en passant que l’Etat a attendu que les autorisations d’urbanisme soient décentralisées pour imposer aux autorités locales des contraintes qu’il ne s’était pas données en des temps où elles étaient de sa compétence. S’agissant de l’aménagement, c’est surtout le lotissement qui voit son régime revu, ainsi que certaines opérations spéciales telles que les périmètres de restauration immobilière ou les secteurs sauvegardés.

Globalement, comment jugez-vous la réforme ?

Au fur et à mesure que l’on découvre une réforme qui ne se livre pas aisément, un constat émerge. Les autorisations d’urbanisme ont toujours pour but de contrôler en amont la bonne application des règles d’urbanisme mais le champ du contrôle s’est restreint. Le respect de règles telles que le coefficient d’occupation des sols, pour ne prendre que cet exemple, s’impose toujours aux constructeurs mais l’administration ne se fixe plus comme rôle de le vérifier et de conditionner la délivrance du permis à l’assurance que la règle a bien été respectée. En d’autres termes, un certain nombre de contrôles, auparavant effectués par l’administration qui assumait, au moins en partie, la responsabilité de la violation de la règle dès lors qu’elle ne l’avait pas sanctionnée par un refus de permis, sont désormais reportés sur le maître d’ouvrage et les divers maîtres d’œuvre. Il leur appartiendra d’assumer seuls la responsabilité du non-respect de certaines règles d’urbanisme.

Il y a donc simplification et assouplissement des procédures : les délais seront, sinon plus courts, du moins mieux respectés. Mais, pour les constructeurs, il n’est pas certain qu’il y ait plus de sécurité juridique puisque les règles demeurent alors que l’administration n’est plus toujours là pour le rappeler.

Quels conseils donner aux opérateurs ?

Lire le Code pratique de l’urbanisme ! Mais aussi et surtout développer les audits juridiques dans toutes les hypothèses où il existe des risques, dans la mesure où le parapluie qu’offraient les autorisations d’urbanisme voit son diamètre se réduire.

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