Vous avez entamé il y a trois ans, la digitalisation de vos ouvrages. Quel était l’enjeu à l’époque ?
En préambule, il est important de rappeler que SNCF Gares & Connexions gère 3000 gares sur l’ensemble du territoire, dont des grandes gares très connues, mais aussi des ouvrages beaucoup plus petits, qui représentent un patrimoine historique parfois, diffus et dispersé la plupart du temps. Notre responsabilité est grande pour gérer de façon pérenne et efficace l’ensemble de ces bâtiments. Or, nous souhaitions améliorer notre performance dans cette gestion. A l’époque, et c’est encore le cas aujourd’hui, la connaissance de ce patrimoine nécessitait de se rendre sur place, de rechercher des plans ou de réaliser de nouveaux relevés souvent à la main.
Ce fonctionnement est à la fois coûteux, chronophage et finalement trop inefficace. La numérisation de ces ouvrages va nous permettre d’améliorer nos performances et les services à nos clients. Et par clients, je pense naturellement aux voyageurs, soit 10 millions/jour dans l’ensemble de nos gares, mais aussi aux commerçants, aux entreprises ferroviaires, etc.
Comment a débuté cette digitalisation ?
Chaque année, nous investissons 400 millions d’euros dans les travaux de modernisation et de transformation des gares. Nous avons donc saisi l’opportunité de ces travaux pour travailler en BIM, lors des phases de conception et de réalisation. Il est important de souligner que la plupart des opérations se déroulent alors que les gares sont en activité. Les travaux ne concernent donc, le plus souvent, qu’une partie des ouvrages.
Malgré tout, nous avons choisi de modéliser ces opérations en 3D pour les enrichir au fur et à mesure, jusqu’à constituer des dossiers des ouvrages exécutés (DOE) numériques.
"Nous lancerons bientôt un AMI pour développer une plateforme interopérable"
Quel exemple concret pouvez-vous citer ?
Le meilleur exemple est celui de notre prototype, en cours de finalisation, sur la gare d’Angers (Maine-et-Loire). Depuis janvier 2018, nous avons réalisé un jumeau numérique à partir de scanner laser 3D de l’enveloppe et des infrastructures de l’ouvrage. Nous avons également numérisé tous les équipements électro-mécanique que sont les ascenseurs, les escaliers mécaniques, les pompes de relevages, la CVC, etc. A noter que nous utilisons des niveaux de détails (LOD) différents en fonction de nos besoins, orientés avant tout vers la gestion maintenance assistée par ordinateur (GMAO), la GTB et la GTC. Ainsi, les données relatives à l’enveloppe sont disponibles dans un niveau de détail sommaire.
En revanche, les informations relatives au fonctionnement des équipements (leur marque, le modèle, la date de mise en œuvre…) sont très détaillées. A partir de ce prototype, nous sommes en train de finaliser notre cahier des charges. Nous serons bientôt prêts à lancer un appel à manifestation d’intérêt afin de développer une plateforme interopérable.
Quel est l’enjeu de cet AMI ?
L’objectif est de concevoir un système interopérable qui utilise le BIM d’un côté et l’interface avec nos outils classiques de GMAO et de GTB. En complément de la mise au point d’un outil de ce type à nos besoins existants, nous poursuivons la réalisation du jumeau numérique de la gare d’Angers orienté vers la gestion et la maintenance de cet ouvrage qui accueille 6 à 8 millions de voyageurs par an. Cette plate-forme d’échanges de données interopérables sera ensuite déployée sur 10 gares de Bretagne, afin d’être à la fois industrialisée mais aussi testées et améliorée au fil des retours d’expérience. Une fois les maquettes numériques de ces sites réalisées et exploitables, ce premier réseau de jumeaux numériques constituera le point de départ de notre système et processus BIM pour l’exploitation des gares.
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Quelles seront les prochaines étapes ?
Notre objectif est bien de travailler sur le très long terme. Les gares sont des ouvrages appelé à durer. En complément des étapes de développement d’un outil innovant et interopérable, et de la création d’un premier réseau de jumeaux numériques en Bretagne, Gares & Connexions démarre une opération appelée SmartStations. Cette opération d’intégration d’intelligence dans les gares via différents capteurs nous permettra d’avoir des données en temps réel sur nos équipements.
D’ici 3 à 5 ans il s’agira de coupler les données BIM de nos gares avec ces informations en temps réel. Ainsi nous souhaitons réaliser la gestion dynamique de nos ouvrages. Dans ce même horizon, nous prévoyons d’organiser la maintenance prédictive de nos équipements, là aussi grâce aux outils numériques au sens large. Enfin à plus long terme, il s’agira de prendre en compte tout le cycle de vie de nos gares dans une vision de gestion des actifs cette fois. Les jumeaux numériques nous aideront à scénariser différentes opérations de transformation, renouvellement de nos actifs.
