"Dans un contexte marqué par la rareté du foncier disponible et par la lutte contre l'artificialisation des sols", on estime, rapporte Stéphane Demilly, sénateur de la Somme (UC), "entre 90 000 et 150 000 hectares la superficie occupée par les friches industrielles en France [qui] pourraient être utilisés pour la construction d'équipements ou de logements". Les friches "sont multiples et peuvent revêtir différentes formes : un terrain nu déjà artificialisé, mais qui a perdu son usage, un bâtiment d'habitation à déqualifier ou bien des sites divers (commercial, portuaire, ferroviaire, minier, industriel, bureaux…)". Sans oublier les "friches tertiaires [...], avec la transformation des bureaux vides en logement" qui "nécessite des mises aux normes techniquement complexes et coûteuses, sur le plan de l'accessibilité, de l'isolation thermique, des installations électriques et sanitaires ou encore de l'aménagement intérieur".
Le parlementaire interroge le gouvernement afin de savoir si des mesures spécifiques aux friches industrielles, ainsi que des financements pour des réhabilitations, sont prévus.
Etat des lieux
"La reconversion des friches est l'un des leviers fondamentaux pour atteindre l'objectif de « zéro artificialisation nette des sols »", souligne le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires qui fait un état des lieux des friches en France. Un recensement effectué en septembre 2022 grâce à l'outil Cartofriches comptabilise "plus de 7 200 sites de friches d'activité pour une surface de plus de 100 000 ha". Par ailleurs, "le Cerema a dénombré 27 127 sites qualifiées de « friches de logements », correspondant à une surface de 73 160 ha et à un nombre de logements vacants de 79 090, dont plus de 26 000 logements individuels et plus de 52 000 logements collectifs".
Les outils
Le ministère cite ensuite divers outils numériques mis en place.
Afin d'"accompagner les porteurs de projet et les collectivités territoriales dans leur stratégie foncière, et la conduite de leurs projets de recyclage", Urbanvitaliz les aide à "mieux connaître le site de friche urbaine identifié, les acteurs et les outils pour lancer les premières études et diagnostics" et "la recherche de financements".
La plate-forme Aides Territoires fournit, elle, un appui pour l'identification des aides mobilisables.
Enfin, Bénéfriches, développé par l'Ademe, aide les acteurs à mesurer les retombées économiques, sociales et environnementales de la réhabilitation de friches.
Subventions de l'Etat
Après les outils, les sous. Dans le cadre du plan France Relance, l'enveloppe dédiée au « fonds friches » qui s'élevait initialement à 300 M€, "a été réabondée une première fois de 350 M€ en mai 2021, puis de 100 M€ supplémentaires en janvier 2022 compte tenu du très grand succès des premières éditions et des besoins exprimés par les territoires". Cela représente au total 750 M€ sur la période 2021-2022.
Ce fonds accompagne 1 382 projets lauréats et permettra de recycler à fin 2024 environ 3 375 ha de friches en générant près de 6 700 000 m² de surfaces de logements (dont plus d'un tiers de logements sociaux), plus de 4 850 000 m² de surfaces économiques (bureaux, commerces, industrie…) et plus de 4 079 000 m² d'équipements publics.
La pérennisation de ce fonds a été annoncée en septembre 2021 par le Président de la République et il sera intégré au fonds d'accélération de la transition écologique des territoires.
Bonus et mesures fiscales
Par ailleurs, diverses mesures ont été adoptées pour favoriser le recyclage de friches, commeun bonus de constructibilité de 30 % introduit par la loi Climat et résilience du 22 août 2021 "afin de faciliter l'équilibre économique de l'opération et de permettre une plus grande densité des projets réalisés dans des friches".
Des mesures fiscales en faveur de la sobriété foncière et du recyclage des friches ont également été prises. "Tel est le cas en matière de taxe d'aménagement, d'une part, de la faculté pour les conseils départementaux d'utiliser les fonds issus de la part départementale pour acquérir des terrains artificialisés en vue de réaliser des travaux de renaturation et, d'autre part, des exonérations concernant les surfaces de stationnement dites « verticales » ou bien encore dans les situations de reconstruction après sinistre".
Des mesures ciblées en matière de fiscalité des plus-values immobilières poursuivent les mêmes objectifs. La transformation de locaux (de bureaux, commerciaux, industriels) en locaux d'habitation est favorisée par un taux réduit d'impôt sur les sociétés sur les plus-values nettes des cessions de locaux et des taux réduits de TVA dans le cadre du logement locatif social ou intermédiaire. A noter en outre, un dispositif d'exonération d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux de la plus-value réalisée lors de la cession à des personnes physiques d'un droit de surélévation.
Et, pour favoriser plus spécifiquement la transformation des bureaux en logements, la loi Climat et résilience exige un diagnostic de changement d'usage, de destination en amont de tous travaux de démolition, mais aussi préalablement à tous travaux de construction d'un bâtiment.
Le mouvement se poursuit en 2023
Enfin, dans le cadre de la "loi de finances pour 2023, le gouvernement permet aux collectivités locales d'exonérer de la taxe d'aménagement,les constructions réalisées sur des sites qui ont fait l'objet d'une opération de dépollution ou d'une renaturation et effectuées dans des conditions permettant la réaffectation des sols à un usage conforme aux règles d'urbanisme applicables sur ces terrains".
QE n° 01985, réponse à Stéphane Demilly (Somme - UC), JO Sénat du 1er décembre 2022