Du champ au chantier : la paille peut-elle s'imposer dans la construction ?

Paille porteuse, paille sur ossature bois, paille sous enduits … les possibilités sont multiples et les programmes variés. Preuve s’il en fallait avec l’exposition Du champ au chantier, la révolution d’une botte de paille. « Au travers de cet évènement, nous souhaitons montrer la diversité de projets réalisables avec une botte de paille, qui sera la même chez un auto-constructeur que pour un major du BTP », explique Benoit Rougelot, co-président du Réseau français de la construction en paille (RFCP).  Au sein de la galerie Permarchitecture, instituée par la coopérative d’architectes constructeurs baptisés les Architecteurs, les démonstrations foisonnent sur 60 m² de surface.

Programmation, modélisation et cycle de vie

L’exposition y est décomposée en trois volets. Le premier met en valeur la matière et sa mise en œuvre au moyen de photographies. « De la moisson à la construction, elles montrent le rapport direct qui existe entre le matériau et ceux qui le façonnent », souligne Benoit Rougelot, qui est aussi le co-fondateur de l’agence Landfabrik. « Pour nous les architectes, ces images rappellent que la paille ne contraint pas le projet à un type particulier, mais qu’elle laisse place à toute créativité, quel que soit le programme », poursuit-il. Bâtiment résidentiel de sept étages, hangar de stockage d’archives, caserne de pompier... sont autant d’édifices isolés de bottes de paille.

Le plus grand programme employant de la paille en France à ce jour étant le lycée Saint-Jean à Clermont-Ferrand (Auvergne-Rhône-Alpes), ou près de 15 000 ballots pour un bâtiment de 15 000 m² on était mis en œuvre verticalement sous la mandature d’Eiffage.

Le deuxième volet de l’exposition porte sur les techniques constructives. « Nous avons sorti 12 modèles BIM qui représentent autant de techniques différentes de construction en paille, que les constructeurs peuvent intégrer dans leur propre modélisation », indique l’expert. Des données indiquent aussi la résistance thermique des parois, dont le R est de 7, ce qui participe fortement à l’obtention d’un niveau bâtiments passifs. D’autres données sur le déphasage dont la durée varie entre 12 et 16h par exemple sont expliquées, ou encore sur les capacités d’un enduit terre avec des fibres de paille à protéger le mur durant deux heures. 

Un dernier volet expose le cycle de vie de la paille et son poids carbone. A ce propos, Benoit Rougelot indique que « pour certains agriculteurs qui fournissent historiquement de la paille pour la construction, la part de ces ventes avoisinent les 50 % là où elle n’était encore qu’un revenu complémentaire auparavant ».

La paille à l’échelle 1

En plus des documents, films et photographies, l’exposition propose aux mains des visiteurs des prototypes. On y trouve des blocs de paille porteuse avec enduit, comme elle a pu être expérimentée sur un étage pour la construction du centre de loisirs Jacques Chirac livré en 2020 à Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). Pour le co-président de la RFCP, « cette technique est la première qui a été développée mais elle reste celle pour laquelle les recherches sont les plus fortes afin de caractériser sa résistance mécanique ».

La technique la plus courante, qui consiste à remplir de bottes de paille des caissons de bois, est aussi déployée à échelle 1. A côté, unpersuadeur est exposé. Il s’agit un gros maillet en bois dont se servent les constructeurs pour persuader la botte de paille de rentrer dans l’ossature sans risquer de l’abimer ni de créer de poinçonnement.

De la paille utilisée en isolation par l’extérieur est aussi installée, à l’image de ce qui a été réalisé par Paris Habitat, rue de la Convention (Paris 15e), en R+7.

Les deux mois d’exposition serviront aussi à mener des ateliers, des formations … Déjà sur la liste, des experts de la MAF doivent venir se former à la construction en paille.