Ecomobilité et efficience énergétique : le pari chinois

Alsace -

Organisatrice des « 3e rencontres de la coopération décentralisée franco-chinoise », les 18 et 19 juin à Nankin, la région Alsace a inauguré son pavillon, le 22 juin à l'Exposition universelle de Shanghai.

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«Jamais un événement n'avait rassemblé autant d'Alsaciens au bout du monde », a remarqué Francis Parent, président d'Alsace Architecture and Design Institute (Aadi), ce 22 juin à l'Exposition universelle de Shanghai, avant le couper de ruban du pavillon Alsace, devant deux cents personnalités.

L'aboutissement d'un parcours du combattant justifie l'euphorie des huit agences alsaciennes réunies dans le groupement d'intérêt économique Aadi. Lauréats d'un concours lancé par le commissariat de l'exposition pour une implantation dans le quartier des meilleures pratiques urbaines (Urban best practices Area, Ubpa), les architectes n'avaient pas trouvé, jusqu'en 2009, les 2,5 millions d'euros nécessaires à la construction. Un « miracle chinois » a débloqué le dossier : séduit par un concept en phase avec le message d'Ubpa, le commissariat a pris la maîtrise d'ouvrage et assumé le financement du pavillon. Ce déclic a convaincu la région Alsace, suivie par les deux plus grandes agglomérations et par EDF, financeurs des 750 000 euros nécessaires au fonctionnement pendant les six mois de l'événement mondial, de mai à octobre.

Chasser en meute

Le rêve d'Aadi a pris forme au premier semestre, sur 2 100 m2 et quatre niveaux, dans la façade inclinée qui regarde au sud, vers le centre d'Ubpa : sa partie végétalisée évoque les coteaux viticoles, tandis que la métaphore de la peau humaine s'exprime dans la composante vitrée, protégée de la chaleur estivale par une transpiration qui prend la forme d'un arrosage en boucle. La symbolique architecturale se double d'une leçon économique administrée par Francis Parent : « En Alsace, nous nous battons les uns contre les autres, alors que nous abordons ensemble le marché chinois. »

L'Alsace saura-t-elle appliquer cette méthode de la chasse en meute dans les domaines de l'écomobilité et de l'efficience énergétique, thèmes des échanges programmés du 6 au 10 septembre et du 11 au 15 octobre au pavillon Alsace ? Président de la commission du développement économique du conseil régional, François Loos a présenté cette stratégie de l'agence Alsace International, le 19 juin à Nankin. Certes, l'énormité du défi saute aux yeux, dans la chaleur moite des autoroutes congestionnées, parsemées de tours en chantiers et de zones industrielles continues, sur les 400 km qui séparent Nankin de Shanghai. Pour accompagner sur la voie de la ville décarbonée sa partenaire du Jiangsu, forte de 74 millions d'âmes, de quel poids peut se prévaloir la plus petite région de France, avec ses deux millions d'habitants ?

Chef de file national

« L'homme ne se construit qu'en poursuivant ce qui le dépasse », a répondu Philippe Richert, président du conseil régional, citant André Malraux devant les quelque 500 cadres et dirigeants de collectivités françaises et chinoises réunis à Nankin. Le chef de l'exécutif alsacien leur a proposé de les accueillir en 2014 à Strasbourg, pour les 4e assises. Son ambition bénéficie d'un encouragement de poids, dans ce commentaire de Pierre Mayet, président d'Urba 2000, chargé de la mise en œuvre de l'accord franco-chinois pour le développement urbain durable : « Il faut se réjouir du rôle de chef de file joué par une région qui offre un excellent exemple. Le destin du monde se joue en partie dans la capacité de la Chine à inventer un modèle de ville durable, et la France dispose d'une disponibilité sans équivalent pour partager ses compétences et ses expériences en planification urbaine », analyse l'ancien vice-président du conseil général des Ponts et chaussées.

L'accompagnement national du volontarisme alsacien se matérialise également dans les 120 millions d'euros de « crédits verts » dédiés aux entreprises françaises qui parient sur la Chine : « Des financements à long terme, comme l'exige le développement durable », précise Philippe Percheron, représentant de l'Agence française de développement à Pékin.

Dans le domaine des transports publics, Strasbourg a profité des assises de Nankin pour nouer des contacts bilatéraux avec la capitale du Jiangsu : « J'ai expliqué aux dirigeants de la ville que le tramway n'implique pas la démolition du patrimoine », résume Nawel Rafik Elmrini, adjointe chargée des relations internationales. Au cours d'une prochaine visite, des experts de Nankin prendront connaissance de l'expérience strasbourgeoise de conduite de projet : une démarche dans laquelle l'agglomération de Toulouse a précédé Strasbourg depuis 2003, à travers des prestations d'assistance à la métropole de Chongqing (30 millions d'habitants). Luc Gaillet, directeur d'Alsace International, rappelle les atouts qui justifient l'engagement de l'Alsace : « La présence de Lohr dans le tramway de Shanghai s'ajoute à la fantastique expérience des trois principales autorités organisatrices des transports, dans les domaines du tram, du train régional et du tram-train. »

L'exemple de Fondis

Si l'écomobilité concerne surtout les grandes entreprises et les collectivités, l'efficience énergétique s'adresse à tous les acteurs du pôle Alsace Energivie, qui pèse 4 milliards d'euros de chiffre d'affaires et 14 000 salariés de structures de toutes tailles. Alsace International a vérifié les attentes locales, le 18 juin, au cours d'une rencontre avec l'association de la construction industrielle du Jiangsu, un syndicat du bâtiment dont les 16 000 entreprises totalisent cinq millions de salariés qui construisent 20 milliards de mètres carrés par an : « Les demandes de partenariat concernent en priorité la rénovation, et s'adressent à tous les métiers de l'enveloppe du bâtiment », précise Aurélie Le Digabel, chargée de l'Inde et de la Chine à Alsace International.

Certaines PME alsaciennes n'ont pas attendu le déclic de Shanghai : « Depuis deux ans, nous plaçons nos produits auprès de promoteurs spécialisés dans l'hôtellerie de luxe ou de particuliers fortunés », témoigne Jean-Marie Trotzier, directeur export de Fondis, leader européen des caves à vins climatisées et fabricant de radiateurs rayonnants à accumulation, fort de 9,5 millions d'euros de chiffre d'affaires et 46 salariés à Vieux-Thann (Haut-Rhin).

D'autres PME dotées d'un savoir-faire pointu pourraient lui emboîter le pas : du 19 au 23 juillet avec la chambre de métiers, le staffeur stucateur WereyStenger, implanté à Strasbourg (Bas-Rhin) et Gunsbach (Haut-Rhin) prospectera la Chine, aux côtés d'autres titulaires du label « Entreprises du patrimoine vivant ».

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