Kaufman & Broad vend moins de logements mais gagne des parts de marché

La vente en bloc, qui a représenté l’an passé 72% du volume des réservations de logements de Kaufman & Broad, a compensé en partie le recul des ventes au détail. Pour limiter son exposition au marché résidentiel neuf, le sixième promoteur national mise, entre autres, sur la réhabilitation de bureaux et la reconversion de friches.

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Kaufman & Broad a récemment livré le programme Effigie à Versailles (Yvelines). Imaginé par Fresh Architectures, celui-ci comprend 60 logements dont 15 HLM.
Kaufman & Broad a récemment livré le programme Effigie à Versailles (Yvelines). Imaginé par Fresh Architectures, celui-ci comprend 60 logements dont 15 HLM.

La crise de la demande n’épargne pas Kaufman & Broad. De décembre 2022 à novembre 2023, le promoteur immobilier coté a vendu 5 332 logements, pour un total de 1,079 Md€ (TTC), selon ses résultats annuels. A l’époque de l’argent gratuit, en 2018 et 2019 notamment, il en vendait plus de 8 000 par an.

En valeur, la baisse est de -24,7% par rapport à la même période en 2022. En volume, de -14,2%. Pourquoi un tel écart ? « Parce que le mix comporte plus de résidences hôtelières ou de logements sociaux vendus en bloc et ni le prix unitaire ni le coût de construction ne sont les mêmes » que ceux d’un programme de logements libres vendus au détail, explique Nordine Hachemi, le P-DG, en conférence de presse le 1er février.

Or, les particuliers qui achètent un logement neuf pour l’occuper n’ont représenté que 15% de sa clientèle, contre 22% en 2022. La part des investisseurs locatifs a, elle, chuté de 33%, contre 13% un an plus tôt. Le dispositif Pinel, dans le viseur du gouvernement qui a acté son extinction fin 2024, n’a pesé que 4% des réservations totales.

Délai d’écoulement stable

Sur fond de rapide hausse des taux entre 2022 et 2023 qui a désolvabilisé les ménages et refroidit les investisseurs institutionnels, le sixième promoteur national fait mieux que le marché, qui a vu son volume de réservations chuter de 30% sur un an, selon les dernières estimations de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) au troisième trimestre 2023. « Mécaniquement, on gagne des parts de marché, car chez nous, la baisse des réservations est moins forte » que la moyenne nationale, observe Nordine Hachemi.

Comme Nexity et les autres poids lourds du métier, Kaufman & Broad s’en est remis à la vente en bloc, qui a pesé 72% du volume de réservations, contre 45% en 2022. Le promoteur ne précise pas combien d’opérations qui peinaient à atteindre le taux de pré-commercialisation exigé par les banques ont fait le bonheur d’Action Logement et CDC Habitat, qui ont réservé respectivement 30 000 et 17 000 logements neufs depuis l’été dernier. « Les institutionnels nous ont demandé des efforts pour tenir leurs objectifs de production de logement social et intermédiaire », reconnaît Bruno Coche, directeur général chargé des finances.

Ce recours aux bailleurs sociaux et acteurs du logement intermédiaire se ressent sur le délai d’écoulement des programmes de 4,8 mois en 2023. Stable depuis plusieurs années, celui-ci est beaucoup plus bas que celui du marché, qui avait besoin en moyenne de 19,7 mois pour vendre la totalité d’un programme au T3 2023, contre 11,3 mois au T3 2022, selon la FPI.

68% du CA dépend du logement

Le chiffre d’affaires (CA) résidentiel de Kaufman & Broad s’est élevé à 958M€, contre 1,155Md€ en 2022. Cette baisse s’explique non pas par le recours massif à la vente en bloc, qui entraîne une décote à deux chiffres et moins de dépenses de commercialisation par rapport à un logement vendu au détail, mais par « le décalage voire l’abandon de certaines opérations en fonction de la rentabilité attendue, de la commercialisation », commente Bruno Coche.

Le logement représente 68% du CA du groupe, qui peut compter sur son vaste programme près de la gare d’Austerlitz à Paris, où l’Agence française de développement y installera son siège. Cette opération à livrer en 2027 a dopé le CA du pôle tertiaire à 438M€, contre 150M€ en 2022. A noter que sa filiale Concerto, dédiée à la logistique, a livré deux opérations.

Les autres activités de Kaufman & Broad, comme l’exploitation de résidences étudiantes, ont généré un CA de 14M€, contre 12M€ en 2022.

Au global, le CA s’est élevé à 1,409Md€, alors que le groupe visait 1,5Md€. Son taux de marge brute s’est établie à 18,3%, contre 17,4% en 2022.

Prêt pour le rebond en 2026

Prévoyant de continuer à privilégier la marge au volume, le groupe se dit prêt pour le rebond du marché résidentiel en 2026 ou 2027. « Il faut s’attendre à une baisse des prix des logements, bénéfique pour les promoteurs qui seront là encore dans deux ans, prédit Bruno Coche. Nous pourrons alors augmenter le nombre de réservations et le nombre d’opérations. Cette dynamique se traduira dans les marges dans les deux à trois années de reprise post-crise. »

Ce scénario optimiste est possible si et seulement si les opérateurs en concurrence feront preuve de « rationalité » au moment d’acquérir le foncier, insiste Nordine Hachemi. « Les prix de terrains doivent prendre en compte la nouvelle réalité : la hausse des taux et la fin des dispositifs fiscaux », ajoute-t-il. Ainsi en évitant la surenchère foncière, les bilans des opérations de demain seront sécurisés et la machine à produire repartira. Sauf si les logements sont vendus en dernier recours à des bailleurs sociaux, et pas à des particuliers comme prévu.

En 2024, Kaufman & Broad continuera de vendre en bloc car ses produits, « majoritairement situés en zone tendue, répondent aux besoins des institutionnels », assure Noredim Hachemi. Parmi ses relais de croissance, citons le marché de niche des bureaux à transformer qui représente un potentiel de 2 300 logements, sur une surface totale de 149 600m². En matière de réhabilitation, le groupe basé à Courbevoie (Hauts-de-Seine) déclare 700 000m² de friches en développement, de l’Occitanie aux Hauts-de-France.

Le pari de la maîtrise d’ouvrage déléguée

Pour le tertiaire, chahuté depuis les confinements de 2020, Kaufman & Broad compte enfiler de plus en plus souvent le costume de maître d’ouvrage délégué (MOD). « Un prestataire du maître d’ouvrage qui ne prend aucun risque, rémunéré sous forme d’honoraires de gestion et apprécié des grands propriétaires de bureaux parisiens » à réhabiliter, décrit David Laurent, directeur général chargé de l’immobilier tertiaire, de l’aménagement et du résidentiel en Ile-de-France. Un exemple ? L’immeuble Potocki de 13 500m², siège historique à Paris de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) Paris Ile-de-France. Le permis a été obtenu le mois dernier. Reste à trouver le futur locataire...

Enfin, Kaufman & Broad déclare un backlog résidentiel de 25 mois, stable depuis 2021. En valeur, les projets à lancer ces prochaines années, qu’ils soient sous promesse ou autorisés à la construction, représentaient fin novembre un CA de 2,053Mds€, soit une baisse annuelle de 13%. Sa réserve foncière de plus de 34 000 logements est également stable. Et l’emmène jusque 2029.

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