Le Groupement des autorités responsables de transport (Gart) vient de déplorer publiquement le mauvais fonctionnement des commissions d'enquête publique. Il souhaite que le gouvernement mette en place une commission chargée de faire des propositions sur cette question, au moment où débute la réforme de la procédure (voir « Le Moniteur » du 6 février 1998, p. 60). Le Gart estime, en effet, que les projets de transports collectifs en site propre sont victimes du mauvais fonctionnement des enquêtes publiques. Plusieurs projets de transports en commun sont retardés : à Caen, le projet de TVR (transport sur voie réservée) est compromis par l'avis défavorable de la commission d'utilité publique. A Orléans, à Strasbourg, les commissaires-enquêteurs ont émis des réserves sur les projets de tramways qui leur étaient soumis. Le Conseil d'Etat a ensuite infirmé les avis des commissaires-enquêteurs.
En cas d'avis défavorable du commissaire-enquêteur à un projet, il faut un décret en Conseil d'Etat, ce qui prolonge de plusieurs mois (18 mois pour Orléans) la procédure. Ce dispositif permet, certes, de protéger l'intérêt des citoyens ; mais il pèse lourdement sur les projets. Autre problème soulevé par le Gart : la qualité du travail des commissaires-enquêteurs. Ces derniers ne sont pas des professionnels de l'urbanisme. Sont-ils compétents pour juger du projet ? Afin d'essayer d'apporter des réponses, le Gart a mis en place un groupe de travail chargé de formuler des propositions.
Lien entre la consultation et l'enquête publique
La première piste de réflexion concerne le lien entre la procédure de concertation prévue par l'article L 300-2 du Code de l'urbanisme et l'enquête publique. « Pendant ces deux phases qui précédent toute opération d'aménagement importante, les citoyens sont consultés à deux reprises, ce qui accentue la complexité de la procédure. Peut-être serait-il préférable de ne faire qu'une procédure unique », suggère Eric Ritter, chargé du service juridique du Gart.
Les compétences du commissaire-enquêteur pourraient être améliorées. Mais, pour cela, encore faut-il que le statut des commissaires-enquêteurs soit clarifié. Le Gart évoque leur professionnalisation ; mais « il faut alors réfléchir à leur rémunération afin qu'ils aient les moyens de faire un travail sérieux », répond Rémi Koltirine, commissaire-enquêteur à Paris. Reste que la professionnalisation ne doit pas enlever leur indépendance aux commissaires-enquêteurs, qui est l'un des éléments de base de cette procédure.
Avec la parution d'un décret relatif à l'établissement des listes d'aptitudes aux fonctions de commissaire-enquêteur le 20 juillet dernier, ce problème est à nouveau sur la sellette. « Nous sommes inquiets de ce décret et nous estimons la transparence de l'enquête publique menacée », explique Michel Sablayrolles, président de la Compagnie nationale des commissaires enquêteurs.
Listes d'aptitudes à établir avant le 15 octobre
La loi du 2 février 1995 dispose que les commissaires et les membres de commissions d'enquête doivent être choisis sur une liste d'aptitude établie dans chaque département par une commission présidée par le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il délègue. Ce dispositif devait être complété par un décret. C'est chose faite depuis le 20 juillet 1998.
La commission départementale chargée d'établir la liste d'aptitude aux fonctions de commissaire-enquêteur comprend les principaux représentants de l'Etat dans le département, un maire du département, un conseiller général et deux personnalités qualifiées en matière de protection de l'environnement désignées par le préfet du département après avis du directeur régional de l'environnement. Les demandes d'inscription sur les listes départementales d'aptitude aux fonctions de commissaire-enquêteur doivent être adressées avant le 15 octobre prochain, et les postulants doivent fournir des indications sur leurs diplômes et sur leur disponibilité.
La Compagnie nationale des commissaires-enquêteurs s'inquiète du fait que les commissions départementales sont trop liées aux maîtres d'ouvrage, aux administrations, et aux associations. En outre, les critères d'aptitude susceptibles d'être examinés par la commission consistent en un cursus professionnel et un curriculum vitae. Les moyens ne sont pas systématiquement mis en oeuvre pour apprécier l'indépendance du commissaire.
Reste à voir ce qu'apportera la réforme de l'enquête publique.
(*) Voir le cahier « Textes officiels » de ce numéro.