La croisade de la Fédération des acteurs du commerce dans les territoires (Fact) monte en puissance. Son président Jacques Ehrmann, également directeur général d’Altarea, pense avoir convaincu Olivia Grégoire. Selon lui, la ministre déléguée chargée des petites entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme, se prépare à intégrer sa proposition choc dans le futur plan de transformation du commerce.
Prime à la casse
La Fact espère appliquer à la France moche la recette qui fait ses preuves dans les vieilles voitures : « Sur le modèle de la prime à la casse utilisée pour éliminer les véhicules les plus polluants, je propose un financement public dédié à la démolition progressive des « boîtes à chaussures » commerciales obsolètes », énonce Jacques Ehrmann.
Selon ses promoteurs, cette mesure accélérerait un processus rendu inéluctable par le décret Tertiaire : aucun des bâtiments commerciaux périphériques construits dans les dernières décennies ne survivrait à son application. Le financement public débloquerait la réticence des locataires, dont les exploitations restent rentables à court terme.
L’e-commerce dans le viseur
En contrepartie du sacrifice de leurs actifs, les propriétaires revendiquent des droits à construire qu’ils mettraient au service de quartiers mixtes et durables. « Les opérations de revitalisation des territoires créent un cadre adapté à de tels déplacements de droits », soutient Stéphane Girard, directeur du développement et des relations institutionnelles de Mercialys.
Certes, « cette idée est un peu chère », concède Jacques Ehrmann. Pour la financer, il lorgne sur l’e-commerce : « Sa contribution rétablirait l’égalité des chances avec le commerce physique », développe le président de la Fact. Son confrère de Mercialys le rejoint dans la dénonciation des « privilèges fiscaux indécents ». Jacques Ehrmann et Stéphane Girard soulignent que la contribution demandée réduirait la pollution générée par les livraisons au domicile des consommateurs.
Front uni
Les troupes de la Fact se sentent d’autant plus fortes que sur les thèmes du développement durable, elles présentent un front uni avec celles de la fédération des entreprises immobilières (FEI), dont les membres construisent des commerces, des bureaux et des logements. Cette organisation soutient une cause parallèle à celle de la Fact et tout aussi déterminante pour la transformation des entrées de ville : la reconversion d’actifs tertiaires en logements.
Membre de la FEI, Frey Immobilier illustre cette convergence, depuis l’annonce, le 6 décembre 2022, de la création d’un véhicule de portage foncier. Détenteur de 30 % de cette société dotée de 200 millions d’euros pour son lancement, l’opérateur privé la partage avec la Caisse des dépôts, actionnaire majoritaire via la Banque des territoires (40 %) et CdC Habitat (30 %).
Un gisement prometteur
Les trois partenaires veulent lancer à court terme sept opérations phare. Dans 21 des plus grandes aires urbaines françaises, ils ciblent un gisement de 55 000 ha répartis sur 243 zones commerciales, soit un potentiel théorique de 70 millions de m2 de densification à usages mixtes. Assez pour construire 1 million de logements. Ces chiffres donnent la mesure de l’enjeu, et peut-être de l’élan rendu possible par la conjugaison des volontés et des moyens publics et privés.