Financement de l’apprentissage dans le BTP: une négociation sous très haute tension

Une première réunion s’est tenue le 22 mai dernier, à l’initiative de la FFB, autour du financement de la formation professionnelle et de l’apprentissage. CFDT, CGT et Capeb s’opposent à une proposition jugée radicale, mettant notamment en cause l’existence du CCCA-BTP.

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Les CFA du réseau de l’apprentissage BTP

Très techniques, mais majeurs. Ainsi se résument les enjeux de la négociation de branche qui vient de s’ouvrir sur le financement de l’apprentissage et de la formation professionnelle dans le BTP. Découlant de la loi du 5 septembre 2018 sur la liberté de choisir son avenir professionnel, cette négociation s’est ouverte le 22 mai dernier, sur la base d’un texte proposé par la FFB.

Or, la CFDT et la CGT pour les salariés dénoncent la volonté de la FFB et de la FNTP de vouloir faire disparaître le CCCA-BTP dès début 2020. Et la Capeb dans le camp patronal s’oppose aussi catégoriquement à ce projet de la FFB, elle relève en outre qu’il s’agit d’une rupture grave pour l’avenir de l’apprentissage BTP, notamment chez les artisans qui emploient 80 % des apprentis,  associée à une orientation globale du texte clairement trop favorable aux grandes entreprises.

Cotisations conventionnelles

Pour bien comprendre l’enjeu, rappelons ce que paient aujourd’hui les entreprises du secteur de la construction.

Outre les 0,55 % ou les 1% légaux, selon l’effectif, de la masse salariale brute dédiée à la formation professionnelle pour l’ensemble des employeurs, les entreprises du BTP paient des cotisations additionnelles, négociées au niveau des branches du bâtiment et des travaux publics.

►Les entreprises de moins de 11 salariés sont ainsi soumises à une cotisation conventionnelle de 0,35 % au titre de la formation continue, à quoi s’ajoute une cotisation spécifique pour l’apprentissage, finançant l’apprentissage et le CCCA-BTP, et fixée à 0,30 % pour le bâtiment et 0,22%  pour les travaux publics ;

►Les entreprises de 11 salariés et plus sont soumises à une cotisation conventionnelle de 0,20 %, et à la cotisation apprentissage dite « CCCA-BTP » également fixée à 0,30 % pour le bâtiment et 0,22 pour les travaux publics.

«Taxe Opco»

La proposition de la FFB ne fait plus apparaître de cotisation spécifique pour l’apprentissage, mais une « taxe OPCO », abondant directement l’OPCO de la construction et non plus le CCCA-BTP et son réseau de CFA.

La contribution actuelle CCCA-BTP, transformée en taxe OPCO, chuterait à 0,20 % pour l’ensemble des entreprises. Par ailleurs, la cotisation conventionnelle du bâtiment serait ainsi découpée :

► 0,25 % pour les entreprises du BTP de moins de 11 salariés ;

► 0,10 %  pour les seules entreprises du bâtiment de 1 à 299 salariés.

Les entreprises du bâtiment de 11 salariés et plus ne paient plus ainsi que 0,10% (au lieu de 0,20% jusqu’alors)

Ainsi, la contribution historique de 0,35% des TPE du bâtiment à la formation professionnelle est éclatée dans la proposition de la FFB, pour en  flécher 0,10 % vers toutes les entreprises, jusque 299 salariés. La FFB tire ainsi les leçons d’un des grands chambardements de la réforme de 2018, qui d’une part concentre les moyens vers les TPE et les PME et d’autre part permet aux entreprises – et logiquement plutôt aux grandes – de créer leurs propres CFA, à la fois pour leurs besoins internes d’évolution des compétences de leurs équipes, mais aussi pour accueillir des demandeurs d’emploi, des jeunes en formation initiale… Une cotisation entièrement gérée par l’OPCO prendrait ainsi tout son sens.

Opposition

Sauf que ni les syndicats majoritaires (CFDT et CGT), ni la Capeb ne l’entendent de cette oreille. Dans un communiqué de presse, la CFDT Construction Bois rejette la vision « libérale » de la FFB, tout en rappelant son attachement au CCCA-BTP, qui pilote aujourd’hui un réseau de près de 130 CFA et qui dans le schéma de la FFB disparaîtrait sous sa forme actuelle.

Une prise de position très proche de ce que dénonce la Capeb. Celle-ci ne devrait pas non plus se satisfaire de la création d’une cotisation spécifique pour les entreprises de 1 à 299 salariés, finançant in fine la création de CFA par les majors du BTP et, avec les cotisations des entreprises de moins de 11 salariés, la formation continue des entreprises plus importantes. La loi Avenir professionnel a acté un principe de solidarité « formation » entre entreprises, mais strictement inverse : des plus grandes vers les plus petites, estime-t-on à la Capeb.

Invalidation de l’accord constitutif

Dernier étage de la fusée,  l’invalidation jeudi 24 mai par les services du ministère du travail  d’une partie du texte des statuts de l’OPCO de la Construction, faute du respect des principes du paritarisme.

Une décision qui va contraindre les partenaires sociaux à se remettre autour de la table, dans un contexte où les rapports entre les deux grandes fédérations patronales du bâtiment (Capeb et FFB) sont plus tendus que jamais.

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