Grippe A : les employeurs en première ligne face au risque de contamination

Mise en place d'un plan de continuité d'activité, actualisation du document unique et du règlement intérieur... Risque de pandémie grippale oblige, les employeurs, tenus d'une obligation de sécurité de résultat, doivent agir sans tarder.

Image d'illustration de l'article
Risque de pandémie grippale oblige, les employeurs, tenu, d’une obligation de sécurité de résultat, doivent agir sans tarder.

Le point avec Emmanuelle Destaillats, avocate spécialiste en droit social au cabinet Landwell et associés.

La circulaire DGT du 3 juillet 2009 sur la pandémie grippale recommande vivement la mise en place dans l'entreprise d'un Plan de continuité d'activité (PCA). Comment élaborer ce document ?

Il s'agit, dans un premier temps, de mener une phase de diagnostic, afin d'anticiper l'absentéisme et d'identifier certains paramètres, dont les besoins humains: Par exemple les personnes habilitées à remplacer, le cas échéant, le chef d'entreprise, les salariés mobiles, ceux éventuellement concernés par le télétravail. Il convient, ensuite, de prévoir un certain nombre de mesures comme l'aménagement de la durée du travail ou des postes de travail.

Ce travail doit être mené en collaboration avec les institutions représentatives du personnel (comité d'entreprise ou délégués du personnel et CHSCT). La circulaire préconise en outre d'associer d'autres acteurs de la vie de l'entreprise : DRH, service juridique, service santé au travail, syndicats, service hygiène sécurité environnement... Le texte prévoit même la consultation des salariés : on peut notamment envisager ce cas de figure pour les entreprises de moins de 11 salariés, dépourvues d'institutions représentatives du personnel.

Il ne faut pas hésiter, dans le cadre de la construction du PCA, à envisager les scenarii les plus graves, afin de ne pas être pris au dépourvu. Ainsi, la circulaire conseille de prendre en compte à la fois le risque d'un taux d'absentéisme de 25% sur 12 semaines, et celui d'un taux de 40% sur deux semaines au cours du pic pandémique.

Dans le cadre de son obligation de sécurité de résultat, quelles autres mesures l'employeur doit-il prendre ?

L'employeur est tenu d'une obligation générale de sécurité à l'égard de ses salariés. Mais s'agissant de la pandémie grippale, risque environnemental, la circulaire évoque une seule obligation de moyens. Je conseillerais toutefois aux entreprises de raisonner à l'aune de l'obligation de résultat.

Quant aux autres mesures à prendre : l'employeur sera tout d'abord impardonnable, en cas de problèmes, d'avoir omis de mettre à jour le document unique d'évaluation des risques de l'entreprise -par exemple en y annexant un volet « Pandémie ». L'idée : identifier le risque de contamination poste par poste, et prévoir les mesures adéquates. En association avec le médecin du travail, il s'agira de déterminer l'aptitude des salariés au port des équipements de protection (masques...), puis de prévoir à leur attention des formations aux règles d'hygiène et de sécurité renforcées.

Autre mesure à prendre : actualiser le chapitre « Hygiène et sécurité » du règlement intérieur, en y faisant figurer les nouvelles mesures à mettre en place dans l'entreprise. Et ce en lien également avec le médecin du travail, le CHSCT et les représentants du personnel.

Enfin, la circulaire recommande, quant au suivi général du risque dans l'entreprise, de solliciter au maximum les services du médecin du travail. Parmi les pistes évoquées : la tenue d'une visite médicale indépendante de la visite périodique.

En cas d'épidémie, dans quelle mesure les salariés pourront-ils exercer leur droit de retrait ?

Un salarié peut en effet se retirer d'une situation de travail s'il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé. Mais son utilisation, en cas de pandémie grippale, devrait rester exceptionnelle. Pour exercer son droit de retrait, le salarié doit en effet avoir un motif raisonnable de craindre pour sa vie ou sa santé. Aussi ne peut-on imaginer une telle d'hypothèse qu'en cas de contamination dans l'entreprise et qu'à défaut, pour l'employeur, d'avoir pris toutes les mesures de prévention nécessaires.

En tout état de cause, l'utilisation préalable du droit d'alerte - signaler à l'employeur l'imminence d'un danger menaçant gravement la sécurité des travailleurs - me semble plus raisonnable.

Que se passerait-il en cas de contamination d'un salarié dans l'entreprise ?

Si l'employeur n'a pas pris toutes les mesures de nature à protéger les travailleurs contre le risque de contamination, il pourrait voir sa responsabilité engagée pour faute inexcusable. On peut par ailleurs imaginer qu'un salarié contaminé dans l'entreprise puisse demander à la CPAM la prise en charge de son affection au titre de législation sur les risques professionnels.

Propos recueillis par Caroline Gitton

En lien au format Pdf, la circulaire DGT 2009/16 du 3 juillet relative à la pandémie grippale

Newsletter Week-End
Nos journalistes sélectionnent pour vous les articles essentiels de votre secteur.
Construction et talents
Les services Le Moniteur
La solution en ligne pour bien construire !
L'expertise juridique des Éditions du Moniteur
Trouvez des fournisseurs du BTP !
Détectez vos opportunités d’affaires