La construction de la Route des Tamarins à la Réunion est une course de saut d’obstacles de 34 kilomètres. Ces obstacles, ce sont les ravines, plus de 120 au total. Des brèches abruptes et profondes, typiques du relief chahuté de l’île, et qui donnent l’occasion aux ingénieurs de faire preuve d’imagination. Pour compliquer encore leur tâche, les ouvrages doivent, d’une part, s’appuyer sur un sous-sol hétérogène souvent de piètre qualité, alternance de coulées basaltiques et de couches de scories plus ou moins épaisses. D’autre part, faire face à des conditions de vents et de crues cycloniques tant en phase définitive qu’en phase provisoire.
La Route des Tamarins se dessine à « mi-pente » dans le sud-ouest de l’île, entre la ville de Saint-Paul et celle de l’Etang-Salé. Elle part du niveau de la mer à Saint-Paul, flirte avec des altitudes comprises entre 200 et 300 mètres jusqu’à Saint-Leu avant de redescendre sur le littoral à l’Etang-Salé.
Trois piles à géométrie différente. Quelque 120 ravines à franchir, ce sont autant d’ouvrages à construire. Neuf des vingt ouvrages d’art non courants que compte le tracé sont des ponts « monotravée » à culée contrepoids permettant de franchir des ravines de 60 à 100 mètres d’ouverture. S’y ajoutent de nombreux ouvrages hydrauliques, une vingtaine d’ouvrages courants et un tunnel bitube de 300 mètres. Mais ce menu déjà copieux est complété par quatre ouvrages qualifiés d’« exceptionnels » par leur technicité : le pont sur la Ravine Fontaine (200 m d’ouverture, 110 m de profondeur), le pont sur la « grande ravine » (300 m d’ouverture, 170 m de profondeur), le viaduc de Saint-Paul et ses 750 m de long et enfin, le pont sur la ravine des Trois Bassins ou « viaduc de Trois Bassins ». Ce dernier, construit en bétons hautes performances, accompagne la dissymétrie de sa ravine. Il comporte quatre travées dégressives (126,00 m ; 104,40 m ; 75,60 m ; 43,20 m) tandis que les mâts (ou déviateurs sur piles) sont également de hauteurs différentes (9 et 18 m).
Même recherche au niveau des appuis : les trois piles offrent une section constante sur toute leur hauteur, mais chacune d’elle offre une géométrie différente : cercle parfait, ellipse ou ovoïde. Du fait de cette dissymétrie, une partie de l’ouvrage sera construite en « surencorbellement » de 25 m. Une technique peu courante de précontrainte extradossée à nappe axiale est utilisée.
Comme l’explique Michel Placidi, conseiller scientifique et technique de Razel, « les câbles extradossés jouent un peu le même rôle que des haubans tout en étant moins excentrés. En effet, le ou les pylônes sont beaucoup plus courts que dans un pont à haubans classique. L’objectif est d’augmenter le bras de levier des câbles, en allongeant leur distance au centre de gravité de la section, afin d’améliorer sensiblement leur efficacité. » La précontrainte extradossée mise en œuvre sur l’ouvrage de Trois Bassins accroît ainsi la résistance aux moments de flexion négatifs qui apparaissent au droit des appuis en partie supérieure de la section. Gageons que ce résultat aurait pu être obtenu avec une précontrainte classique mais certainement au détriment de la finesse du tablier.
Maître d’ouvrage : Région Réunion.
Assistance à maître d’ouvrage : DDE/Setra/Cete/Cetu.
Maîtrise d’œuvre : DDE service grands travaux (section I), Scetauroute (section II), groupement Greish/Tremblet/Coyne et Bélier/Zirk/Dezeuze (Ravine Fontaine), groupement Setec TPI/Spielmann (Grande Ravine), groupement Arcadis/Coteba/Strates (Trois Bassins), DDE de La Réunion (Saint-Paul).
Entreprises
uniquement pour les ouvrages exceptionnels) : groupement Demathieu & Bard/GTOI/Cimolaï (Ravine Fontaine), groupement Dodin/Vinci Construction Grands Projets/Eiffel (Grande Ravine), groupement Eiffage/Matière/Razel (Trois Bassins), groupement Razel/Bilfinger Berger/Eiffage Travaux Publics/Heaven Climber/Matière (Saint-Paul).







