L’investissement locatif pas perturbé par les mauvais DPE, selon les courtiers

Si de plus en plus de banques regardent le DPE avant de valider un crédit immobilier, les courtiers ne confirment pas l'alerte de la Fnaim sur le financement des passoires énergétiques.

Réservé aux abonnés
Image d'illustration de l'article
Un appartement parisien ancien en cours de rénovation énergétique.

Alerte sur l’investissement locatif. Auditionné le 2 juin dernier par la commission des affaires économiques du Sénat, le président de la Fédération Nationale de l'Immobilier (Fnaim) Jean-Marc Torrollion a pointé « les premiers refus de prêts immobiliers » à des investisseurs locatifs causés par le diagnostic énergétique.

En cause, la loi climat et résilience – adoptée en première lecture début mai à l’Assemblée Nationale – qui prévoit l'interdiction de mettre en location les passoires énergétiques. A compter de 2025 pour les biens de classe G, à partir de 2028 pour la F, et de 2034 pour la E.

« Le revenu ne sera pas au rendez-vous »

« Mettons-nous à la place d’une banque, dans le cadre d’un investissement locatif pour un appartement avec un DPE G. Si elle n’a pas l’assurance que des travaux sont programmés, elle doit refuser car le revenu ne sera pas au rendez-vous très vite. A l’avenir, le refus, ce sera un réflexe », avertit-il.

Christophe Demerson, président de l’Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI) et directeur de la revue mensuelle 25 Millions de propriétaires, « n’a jamais vu de refus » à cause d’une rénovation énergétique non programmée et « trouve ce motif bizarre ».

Exemple, fictif mais courant selon lui : « Un petit immeuble avec six appartements, tous des passoires énergétiques, se vend au tribunal. Vous le visitez, l’huissier vous ouvre, mais vous ne pouvez pas revenir pour faire le métré. Et vous avez un mois pour le payer. Il serait absurde qu’une banque demande les devis des travaux à réaliser avec un laps de temps si court… »

« Tirer la sonnette d’alarme »

« Jean-Marc Torrollion veut tirer la sonnette d’alarme car le temps de réaction du législateur est long », commente Philippe Taboret, directeur général adjoint de Cafpi, qui a traité plus de 30 000 dossiers de financement immobilier l’an passé. L’ancien président de l’Association professionnelle des intermédiaires en crédits (Apic), qui pèse 85 % du marché du courtage en France, n’a toutefois pas relevé de refus de crédit pour travaux énergétiques non prévus au sein de son réseau « ou alors c’est vraiment marginal ».

Dans la galaxie Cafpi, seules Banque postale – depuis deux ans – et Caisse d’épargne – depuis deux semaines – demandent à voir le DPE dans le cadre du dossier financier constitué par le futur emprunteur. « C’est juste pour connaître le bien, ce n’est pas un critère pour l’acceptation du dossier de financement », insiste-t-il. Et d’anticiper : « A court terme, si la loi – en discussion – est votée, le diagnostic énergétique peut rapidement devenir un critère d’analyse supplémentaire, mais pas de refus, pour des passoires énergétiques, destinées à la location. »

« Les banques regardent toujours le potentiel locatif »

De son côté, Cécile Roquelaure, directrice des études du réseau de courtiers Empruntis, qui traite, par mois, plus de 30 000 demandes d’accompagnement en crédits immobiliers, s’attend à ce que les banques « resserrent encore un peu » leurs conditions d’octroi. Mais pas forcément à cause d’un mauvais DPE.

« Si le bien à acquérir se trouve dans une zone détendue avec beaucoup de vacance locative, la banque sera moins favorable à accorder un prêt. Si en plus il s’agit d’une passoire thermique, elle risque d’être moins encline à financer l’opération », prévient-elle. Et d’ajouter : « Prudentes, les banques regardent toujours le potentiel locatif. Or, un sujet est monté avec la crise : la vacance locative, sur fond d’augmentation du risque d’impayés du fait de locataires qui perdent leur emploi par exemple. »

Reste que l’éventuel durcissement des banques à l’égard des investisseurs locatifs dans l’ancien n’en est qu’à ses balbutiements. « Seule une banque - mutualiste, régionale - nous demande, depuis le 2 juin, le DPE dans l’analyse du dossier. A ce jour, nous n’avons aucune consigne de la part de nos autres partenaires bancaires », confie-t-elle.

D’autres établissements vont-ils suivre ? Aucune des banques que nous avons sollicitées ne souhaite s’exprimer. Pour creuser le sujet, il faudra attendre la conférence de presse du 30 juin dédiée de la Fnaim, qui « affine » les chiffres, assure son service communication. Rendez-vous pris.

Abonnés
Baromètre de la construction
Retrouvez au même endroit tous les chiffres pour appréhender le marché de la construction d’aujourd'hui
Je découvreOpens in new window
Newsletter Week-End
Nos journalistes sélectionnent pour vous les articles essentiels de votre secteur.
Les services Le Moniteur
La solution en ligne pour bien construire !
L'expertise juridique des Éditions du Moniteur
Trouvez des fournisseurs du BTP !
Détectez vos opportunités d’affaires